Intervention de Josiane Mathon-Poinat

Réunion du 14 octobre 2004 à 9h45
Simplification du droit — Article 23

Photo de Josiane Mathon-PoinatJosiane Mathon-Poinat :

En 1947, à Amsterdam, l'Union internationale des architectes a défini l'architecte comme « celui qui, maître en l'art de bâtir, conçoit et anime les lieux où passe et séjourne l'homme ».

L'architecte est nécessairement une personne de culture puisque la société lui confie la responsabilité de concevoir les espaces destinés aux activités humaines. Quelle que soit la composition de l'équipe de maîtrise d'oeuvre, l'architecte occupe et doit occuper une place centrale et conserve la responsabilité d'ensemble de la conception de l'ouvrage et de la conformité de sa réalisation.

La loi de 1977 avait pour ambition d'installer durablement l'intervention de l'architecte dans la société française, mais des décrets d'application sont venus limiter le principe du recours obligatoire à l'architecte pour les constructions d'une surface supérieure à 170 mètres carrés et, pour les bâtiments agricoles, à 800 mètres carrés.

Les Conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement, les CAUE, dont la loi prévoyait l'intervention obligatoire pour les projets situés en dessous des seuils, se sont vus délestés de cette obligation par un amendement voté en 1982, laissant tout ce secteur en friche.

Dès lors, sous la pression des puissants lobbies du bâtiment et de l'immobilier ainsi que des banques, les architectes, qui sont parmi les rares garants de ce rapport au site et à la culture, se voient retirer leur rôle traditionnel si nécessaire.

De plus, l'Europe est un continent de vieille culture architecturale et urbaine. Les hommes y ont façonné, siècle après siècle, le paysage rural et l'environnement urbain. Aujourd'hui, notre continent est une des sources de la création et de la pensée architecturales contemporaines. Il ne faut pas l'étouffer par des déréglementations à l'emporte-pièce qui entraînent des mutations aveugles.

Les architectes français attendent de nous des textes en faveur d'une profession européenne s'appuyant sur un haut niveau de formation et de compétences pour une capacité de création et de service à la hauteur des enjeux humains collectifs et individuels.

Le Comité pour les Etats généraux de la profession et pour un plan de sauvegarde de l'architecture et des architectes écrivait au printemps dernier : « La prochaine crise sera une crise du logement telle que nous n'en avons pas connue depuis la guerre ». Nous en sommes à trois millions de personnes mal logées selon la Fondation Abbé-Pierre. Il s'agit d'une crise sociale, humaine et sanitaire... Jamais depuis la guerre, il n'y a eu autant besoin de construire ! Jamais depuis cette époque, la profession d'architectes n'a eu autant besoin d'être exercée et développée !

L'architecture est un art qui s'impose au regard de tous. Elle n'est pas réservée au seul usage particulier, elle s'inscrit nécessairement dans l'espace collectif et il est du devoir de l'architecte de prendre en charge, au nom des valeurs collectives dont il est garant, la relation entre le projet et son environnement.

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