Intervention de Robert Badinter

Réunion du 4 juillet 2011 à 14h30
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Adoption des conclusions modifiées d'une commission mixte paritaire

Photo de Robert BadinterRobert Badinter :

N’oublions pas les millions de prisonniers, les centaines de milliers de combattants de la France libre et de la Résistance. Non seulement ces jeunes n’ont pas connu l’autorité paternelle – à l’époque, cette notion avait un sens –, mais ils ont grandi dans une atmosphère où tout système de valeurs avait disparu. Ils ont vu se succéder des gouvernements de collaboration, que l’on idolâtrait officiellement jusque dans les lycées ; ils ont vu régner l’argent roi, celui du trafic et du marché noir. J’ai connu des cours de lycée qui étaient les lieux de trafics illicites. Ainsi marchait cette époque !

Si, en 1945, les hommes et les femmes issus de la Résistance qui composaient le gouvernement du général de Gaulle ont voulu se consacrer sans délai à l’élaboration de cette ordonnance, alors même que la France était entièrement à reconstruire et poursuivait encore l’effort de guerre, c’est précisément parce qu’ils avaient conscience que, pour une part, l’avenir du pays dépendait de cette jeunesse.

Ma génération n’a pas, je peux le dire, connu que des succès, s’agissant notamment de la décolonisation, domaine dans lequel nous n’avons pas su répondre efficacement aux problèmes qui se posaient.

Mais ma génération, je me plais à le rappeler, a reconstruit la France ; elle lui a donné une force, un dynamisme, un esprit nouveaux. De surcroît, c’est à ma génération que l’on doit cette immense réalisation qu’est la construction européenne.

Les hommes et les femmes de 1945 ont voulu lutter contre les bacilles ou les microbes sociaux répandus dans la jeunesse à l’aide de textes spécifiques, et s’ils ont donné la priorité à la rénovation du droit pénal et de la justice pénale des mineurs, c’est parce qu’ils savaient que cela correspondait à une exigence nationale.

Les principes de l’ordonnance de 1945, la spécificité de son approche et la primauté donnée à l’éducatif à cette époque ont été, au regard des éléments en voie de perdition de ma génération, des moyens utiles.

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