Il y a plus grave encore, madame Debré : avec une telle disposition, s'ajoutant à celle sur les tests ADN et celle sur les statistiques ethniques, vous allez ainsi, monsieur le ministre, pouvoir ficher beaucoup de monde.
Je ne parle même pas du fichier du ministère de l'éducation nationale « Base élèves », qui permet, depuis 2005, de récolter des données, même confidentielles, sur chaque écolier comme, par exemple, la nationalité des enfants, leur date d'entrée sur le territoire français, leur culture et leur langue d'origine.
Sous la pression de parents et d'enseignants, le ministère de l'éducation nationale aurait décidé de ne plus recenser de telles données. Dont acte. Il n'en demeure pas moins que les questions de fond sur l'existence d'un tel fichier demeurent.
Avec ce texte qui permet les relevés d'empreintes digitales, les relevés d'empreintes génétiques, les relevés ethniques, vous allez pouvoir mettre en place des fichiers qui seront alors autant d'instruments de contrôle tous azimuts de la population, étrangère comme française.
La chasse à l'étranger est réellement ouverte et ce, à tous les niveaux de la société : dans les écoles, dans les centres d'hébergement, dans les préfectures, dans les hôpitaux, etc.
Ce n'est pas un hasard si les fichiers se multiplient depuis la modification de la loi « informatique et libertés » qui, en 2004, a réduit considérablement les pouvoirs de contrôle de la CNIL.
Ce n'est pas un hasard non plus si, dernièrement, des courriels émanant de certaines inspections académiques ont été adressés - par erreur ? - dans des écoles primaires ou des lycées afin de recenser, ici, les élèves majeurs sans papiers, là, les élèves dont les parents sont sans papiers.
Et que penser des récentes notes adressées par la Chancellerie aux chefs de cour et de juridiction leur demandant - sous couvert, bien sûr, d'études statistiques - de recenser les décisions civiles en matière de contentieux des étrangers et d'adoption, et de transmettre copie de ces décisions ?
Voilà donc le contexte dans lequel arrivent votre projet de loi en général et cet article 19 en particulier.
Dans ces conditions, vous comprendrez que nous ne partagions pas votre conception en la matière et que nous demandions la suppression pure et simple de cette disposition, dangereuse pour les libertés individuelles et publiques.