Cet amendement tombe à point nommé, puisqu'il nous permet d'aborder le thème de la régularisation des sans-papiers, au lendemain de l'annonce du ministre de l'intérieur au sujet des huit cents familles d'enfants sans papiers.
Ce qui pourrait apparaître comme la prise en considération de situations humainement difficiles n'est en fait qu'un effet d'annonce, comme le furent d'ailleurs ses déclarations sur la double peine juste avant le débat sur la loi du 26 novembre 2003 relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.
En effet, il est prévu que sera régularisée la situation des enfants nés ou arrivés dès leur plus jeune âge en France, n'ayant plus d'attaches avec leur pays d'origine, ayant toujours été scolarisés en France et ne parlant que le Français.
Ces conditions sont pour le moins difficiles à remplir. Comment exiger d'enfants qu'ils n'aient plus de lien avec leur pays d'origine s'ils y ont encore de la famille et comment exiger qu'ils n'en parlent plus la langue ? Ne peuvent-ils pas parler le français et une autre langue, monsieur le ministre ? Comment soumettre une régularisation à des critères aussi absurdes ?
Notre proposition va bien au-delà de ce que propose M. le ministre, puisque nous envisageons un éventail plus large de critères permettant de régulariser les sans-papiers.
En effet, dans la majorité des cas, ces étrangers justifient d'un certain degré d'intégration dans notre société, soit parce qu'ils y ont fondé une famille, soit parce qu'ils y travaillent ou y font leurs études.
Chacune de ces raisons justifie qu'ils obtiennent un titre de séjour. Mais depuis 2003, depuis le durcissement des conditions de séjour des étrangers en France, et surtout depuis les consignes données par le ministre de l'intérieur dans sa circulaire de février dernier, il est impossible pour les sans-papiers d'essayer de faire régulariser leur situation. Se rendre dans une préfecture revient aujourd'hui à se jeter dans la gueule du loup. En outre, les files d'attente sont très longues. À la préfecture de Marseille, par exemple, ces personnes commencent à faire la queue dès quatre heures ou cinq heures du matin.
Dans ces conditions, les sans-papiers se retrouvent condamnés éternellement à la clandestinité, avec tous les dangers qui découlent de cette situation, alors qu'ils sont dans la plupart des cas entrés régulièrement sur notre territoire.
Le problème est que cette clandestinité profite en premier lieu aux employeurs, qui n'hésitent pas à exploiter des sans-papiers en toute connaissance de cause, dans des conditions évidemment déplorables, conditions bien connues des services de l'État.
C'est pourquoi nous pensons que non seulement les enfants étrangers scolarisés et leurs parents doivent être régularisés, mais également les étrangers qui détiennent une promesse d'embauche ou disposent d'attaches familiales en France.
Comme le ministre de l'intérieur semble être prêt à faire un geste en faveur des sans-papiers, et sachant que la France n'est en aucun cas un pays d'immigration massive - elle est même devenue l'État européen dont la croissance démographique dépend le moins de l'arrivée d'étrangers -, nous ne perdons pas espoir, chers collègues, que vous adoptiez notre amendement.