Cet article 1er bis, inséré dans le projet de loi à la suite de l'adoption d'un amendement déposé par le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, M. Mariani, tend à créer un Conseil national de l'immigration et de l'intégration qui aurait trois missions : participer à l'élaboration des données statistiques et des indicateurs nécessaires dans le cadre d'une politique d'« immigration choisie » ; exprimer un avis sur les orientations de la politique d'immigration et d'intégration ; élaborer chaque année un rapport, annexé au rapport du Parlement.
M. Mariani précisait, dans son exposé sommaire, que ce Conseil, dont la composition serait fixée par décret, comprendrait deux collèges : un collège de représentants des ministres compétents en matière d'immigration et d'intégration, et un collège de personnalités qualifiées, choisies par le Gouvernement en raison de leurs compétences en matière d'immigration et d'intégration, notamment des dirigeants d'associations, des experts, des universitaires, etc.
Premièrement, il paraît pour le moins douteux de se prononcer sur la création d'une instance à propos de laquelle le texte n'apporte aucune précision. S'il est normal que les modalités précises de sa mise en place soient renvoyées à un décret, le principe des deux collèges représente plus, à mon avis, qu'une simple modalité.
Deuxièmement, je suis plus que circonspecte sur le principe même de la création de ce Conseil national.
Je n'insisterai pas sur la question des statistiques ni sur celle des quotas que vous souhaitez instaurer, et qui relèvent selon moi d'une politique aussi injuste qu'inefficace, car nous aurons l'occasion d'aborder ce sujet ultérieurement.
L'enjeu, et il est de taille, est celui du pilotage des politiques d'immigration. Or je crains que la création de ce nouveau conseil, qui s'ajoute aux organismes et aux missions interministérielles déjà en place, ne renforce la confusion actuelle.
Il est vrai que les besoins existent, notamment en termes de diagnostic. En effet, il est très difficile, aujourd'hui, d'obtenir des chiffres précis et clairs en la matière. C'est un problème très important, que je ne sous-estime pas.
Mais est-il vraiment utile de créer une nouvelle structure, s'ajoutant aux différents organismes existants ? Je les cite : le Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations, le FASILD, l'Office des migrations internationales, l'OMI, devenu l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations, l'ANAEM, la direction de la population et des migrations du ministère de l'emploi, l'INSEE, l'Institut national d'études démographiques, INED, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, l'OFPRA, le Haut Conseil à l'intégration, le HCI, l'Observatoire des statistiques de l'immigration et de l'intégration, etc. Les organismes ne manquent pas !
Ce qu'il faut, c'est clarifier les rôles et les missions de chacun. Je suis tout à fait partisane, pour plus de clarté et d'efficacité, d'une réforme du pilotage des politiques d'immigration, mais la solution proposée par l'article 1er bis ne me paraît pas être la bonne.
Cela ne coûte rien, me direz-vous, de rajouter un acteur à tout ce dispositif. Eh bien si, justement, cela coûte ! La politique d'immigration et d'intégration manque cruellement de moyens. La création d'un organisme faisant doublon avec d'autres instances serait un gâchis insupportable quand, parallèlement, nous constatons l'état des zones d'accueil, l'engorgement des tribunaux et des préfectures, ainsi que le manque de moyens consacrés à l'accueil et à l'intégration des nouveaux arrivants.
C'est la raison pour laquelle je suis défavorable à cet article, dont le groupe socialiste demandera la suppression dans un amendement qui va suivre.