Intervention de Annie David

Réunion du 13 juin 2006 à 21h30
Immigration et intégration — Article 24

Photo de Annie DavidAnnie David :

Le troisième alinéa de l'article 24 abroge la possibilité de régulariser les sans-papiers qui résident habituellement sur le territoire depuis plus de dix ans ou de quinze ans si, au cours de cette période, ils ont résidé en tant qu'étudiant.

Cette disposition a bien évidemment suscité de nombreux débats à l'Assemblée nationale, mais, surtout, de l'inquiétude au sein des associations de défense des droits des étrangers.

Loin de constituer une prime à l'irrégularité ou une récompense à une violation prolongée de la loi de la République, cette possibilité de régularisation est une preuve de la reconnaissance des attaches personnelles nouées par un étranger ayant vécu et travaillé en France. Elle n'est que la prise en compte des dix années passées sur notre territoire dans une situation précaire et difficile. La supprimer revient à condamner les étrangers concernés à la précarité sans aucun espoir de voir leur situation se régler. C'est les soumettre à une très grande précarité en matière de travail. Les employeurs peu scrupuleux continueront de disposer ainsi d'une main d'oeuvre corvéable à merci, totalement dépourvue en matière de protection sociale et d'accès aux soins.

Revenir sur cette disposition ne semble pas plus justifié au regard des chiffres. N'oublions pas que le nombre d'étrangers n'a pas augmenté depuis trente ans et que le nombre de personnes concernées par la régularisation au bout de dix ans a toujours été compris entre 2 500 et 3 000. Nous sommes donc loin d'une vague incontrôlable d'immigrés clandestins qui envahiraient la France.

Dans ces conditions, rien ne justifie l'abrogation d'une disposition voulue par Jean-Louis Debré en 1997, à la suite de la grève de la faim de sans-papiers à l'église Saint-Bernard. Si cette abrogation est maintenue, il y a fort à parier que d'autres événements de ce genre ne manqueront pas de se multiplier.

Le vendredi 9 juin, Le Figaro a publié un sondage dans lequel 63 % des Français se montraient favorables à la régularisation automatique des immigrés vivant en France depuis au moins dix ans. Même si cela n'a pas de rapport direct avec le texte, j'ajouterai que, dans ce même sondage, 68 % des Français se déclaraient favorables à l'octroi du droit de vote pour les élections municipales à tous les étrangers vivant en France depuis au moins dix ans. Or, parmi ces 68 %, 54 % se disaient sympathisants de droite.

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