Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 21 janvier 2009 à 15h00
Loi de finances rectificative pour 2009 — Discussion de deux projets de loi le second étant déclaré d'urgence

Christine Lagarde, ministre :

J’en viens maintenant aux effets escomptés de ce plan.

S’agissant des grands agrégats, comme l’a rappelé Patrick Devedjian, le plan de relance se chiffre à 65 milliards d’euros, dont 50 milliards d’euros au titre de la relance de l’investissement et de l’amélioration de la compétitivité et 15 milliards d’euros au titre des stabilisateurs automatiques.

Les mesures de relance stricto sensu de ce plan devraient avoir pour effet d’accroître le PIB respectivement de 0, 6 %, l’exonération de taxe professionnelle et les prêts à taux zéro de 0, 2 % et les stabilisateurs automatiques, pareillement, de 0, 2 %. Ainsi, l’ensemble du plan devrait engendrer un point de croissance.

Comme l’a souligné Éric Woerth, si l’on y ajoute les mécanismes d’amortissement qu’offre à d’autres égards notre système de prestations sociales, notre pays se trouve dans une situation nettement plus favorable qu’un certain nombre d’autres pays. C’est d’ailleurs ce dont a pris acte, malgré des prévisions pessimistes, la Commission européenne, puisque celle-ci prévoit, en 2009, une croissance de moins 1, 8 % pour la France, contre une moyenne de moins 1, 9 % pour la zone euro.

Nous ne souscrivons pas à ces prévisions. Pour autant, je ne vous indiquerai pas aujourd’hui quelles sont les nôtres puisque celles-ci dépendent d’un certain nombre d’éléments d’appréciation dont nous ne disposerons que dans le courant du mois de février, quand nous connaîtrons le chiffre de la croissance réelle pour le quatrième trimestre de l’année 2008.

Néanmoins, comme l’ensemble des autres pays de l’Union européenne, nous serons amenés de toute façon à réviser à la baisse notre prévision de croissance pour l’année 2009, qui devrait être un peu supérieure à celle de la zone euro et bien supérieure à celle de notre voisin allemand.

Certains feront des gorges chaudes et prétendront peut-être que, décidément, rien ne marche dans notre pays. Toujours est-il que, grâce aux 10 milliards d’euros de réductions d’impôt sur 2009, grâce à la revalorisation des prestations sociales pour un même montant avec le RSA, les prévisions pour notre pays sont moins mauvaises qu’elles ne le sont pour l’ensemble de nos voisins. Ainsi, l’Allemagne vient de réviser à moins 2, 5 % son taux de croissance pour l’année 2009. Même si l’on s’en tient aux prévisions pessimistes de la Commission européenne, qui estime que la France devrait connaître une croissance de moins 1, 8 %, notre situation est néanmoins plus favorable, dans un contexte économique dont chacun s’accorde à considérer qu’il est difficile et particulièrement incertain.

Notre stratégie consiste à engager nos efforts au service de deux objectifs : d’une part, le travail, d’autre part, la compétitivité des entreprises, afin de créer de la valeur et de lutter contre le chômage.

En conclusion, après avoir cité Jean-Paul Fitoussi, je citerai deux autres économistes.

Ainsi, Olivier Blanchard, économiste en chef au Fonds monétaire international, déclarait dans les colonnes du journal Le Monde daté du 24 décembre 2008 : « Les constructions de ponts ou les rénovations d’écoles risquent d’avoir plus d’effets sur la demande que des réductions d’impôts, que les ménages sont tentés de transformer en épargne de précaution […]. La prime à l’automobile décidée en France donne de fortes incitations et me paraît une bonne idée. »

Ces mesures s’inscrivent dans une démarche déterminée et inchangée qui consiste à valoriser le travail, à améliorer la compétitivité, à créer de la valeur et à soutenir, autant que nous le pouvons, l’emploi.

En outre, je citerai ce que John Maynard Keynes écrivait, en 1931, dans sa Théorie générale de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie : « Rien à l’évidence ne peut restaurer l’emploi sans d’abord restaurer le niveau des profits [...] et rien ne peut restaurer le niveau des profits sans restaurer d’abord le volume de l’investissement, c’est-à-dire, en d’autres mots, le volume des commandes de nouveaux biens en production. » C’est exactement le sens de la démarche que nous avons adoptée.

La démonstration que l’investissement public et privé est le seul moyen de faire repartir les rouages de la machine a donc été faite en son temps.

Keynes poursuit, et ce sera mon ultime citation : « La seule alternative théorique serait une vaste augmentation de la consommation des ménages aux dépens de leur épargne, extravagance collective qui, au moment où chacun est nerveux et hésitant, a peu de chance de se produire ».

C’est la raison pour laquelle, mesdames, messieurs les sénateurs, nous privilégions l’investissement.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion