Monsieur le président, madame, messieurs les ministres, mes chers collègues, l’examen du plan de relance par le Sénat intervient dans un contexte préoccupant. La France doit faire face à une crise financière mondiale, sans doute la plus grave depuis 1929, qui a dégénéré en crise économique internationale soumettant notre pays à rude épreuve.
Le projet de loi d’accélération des programmes de construction et d’investissement publics et privés, que je rapporte au nom de la commission des affaires économiques, est l’un des éléments de la réponse apportée par le Gouvernement à cette situation d’urgence. Il s’inscrit dans la continuité des mesures mises en œuvre depuis dix-huit mois, tout d’abord pour consolider le système bancaire français, puis pour soutenir les entreprises menacées par la raréfaction du crédit et, enfin, pour agir en faveur de l’emploi des salariés les plus vulnérables aux conséquences néfastes du ralentissement économique.
Ce texte constitue donc l’un des volets du plan de relance d’ensemble de l’économie française tel qu’annoncé par le Président de la République dans son discours de Douai du 4 décembre 2008, et pour lequel un total de 26 milliards d’euros est mobilisé. Ses dispositions juridiques s’articulent avec les mesures financières, fiscales et budgétaires du projet de loi de finances rectificative pour 2009, que nous examinons conjointement.
Le Gouvernement a fait le choix, que la commission des affaires économiques approuve sans réserve, d’axer son plan de relance de 26 milliards d’euros sur les investissements. En effet, ces derniers, qu’ils soient publics ou privés, préparent l’avenir et ont un effet d’entraînement sur l’économie. L’impact immédiat du plan de relance est estimé par le Gouvernement à 0, 6 point de PIB. Si les effets d’entraînement de la hausse des investissements sur la demande jouent à plein, son effet macroéconomique global pourrait atteindre 0, 8 à 1 point de PIB.
Pour autant, il serait faux de prétendre que le Gouvernement se désintéresse de la relance de la consommation et du soutien du pouvoir d’achat des moins favorisés.
Le 6 janvier dernier, lors de son audition commune par les commissions des affaires économiques, des finances et des lois du Sénat, Éric Woerth a justement souligné, comme il le rappelait tout à l’heure, qu’il convenait de tenir également compte des mesures parallèlement votées dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009, qui conduiront à une augmentation des transferts sociaux de 17 milliards d’euros par rapport à 2008. Cela correspondra à une progression supérieure d’au moins trois points à l’inflation prévue. La seule revalorisation des prestations sociales, telles les retraites, les minima sociaux et les prestations familiales, représentera un effort additionnel de 9 milliards d’euros.
Le Gouvernement veille donc à ce que la relance de l’économie française soit engagée de manière équilibrée : s’il fait prioritairement porter les efforts sur l’investissement, il agit également sur la consommation.
En ce qui concerne l’investissement, il faut impérativement que l’impulsion donnée fasse sentir ses effets rapidement, dès les premiers trimestres de l’année 2009, avant même que la France s’enfonce davantage dans la récession. Or rien ne servirait de mobiliser des fonds supplémentaires pour les investissements, si ces fonds ne pouvaient être engagés immédiatement. Il est donc essentiel d’aménager les conditions dans lesquelles peuvent être réalisés les investissements publics et privés en levant, avec toutes les précautions nécessaires, un certain nombre d’obstacles procéduraux.
Telles sont les conditions et les considérations qui ont inspiré le présent projet de loi dont les auteurs recherchent avant tout, comme l’intitulé l’indique, un effet accélérateur des programmes de construction et des investissements publics et privés.
Tel qu’il avait été adopté en conseil des ministres, le texte initial comportait en tout sept articles, visant principalement à faciliter la réalisation de projets de construction de logements, d’opérations immobilières dans les hôpitaux et d’installations classées, ainsi que le recours aux contrats de partenariat.
L’Assemblée nationale a considérablement élargi le champ du projet de loi en ajoutant à ses sept articles initiaux un total de dix-sept articles nouveaux, d’importance très variable, certains d’entre eux résultant d’amendements présentés par le Gouvernement.
L’Assemblée nationale a notamment autorisé les organismes d’HLM à acquérir directement sous le régime de la vente en l’état futur d’achèvement plus de 50 % des logements d’une même opération immobilière.
Elle a enserré dans des délais stricts la réalisation des opérations d’archéologie préventive et augmenté en contrepartie le taux de la redevance d’archéologie préventive.
Elle a donné à l’État une latitude supplémentaire lorsqu’il envisage de réduire ses créances sur une entreprise en difficulté. Elle a autorisé la ratification de l’ordonnance du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence, ordonnance prévue par l’article 97 de la loi de modernisation de l’économie, et habilité le Gouvernement à procéder par ordonnance à l’adoption de la partie législative du code de la commande publique.
Elle a permis que l’offre finale faite par le candidat à un contrat de partenariat puisse être présentée sans bouclage financier définitif et autorisé l’assemblée délibérante d’une collectivité territoriale à déléguer à l’exécutif la passation des marchés publics sans limite de montant.
Elle a également modifié la définition du délit de favoritisme, pour confirmer son caractère intentionnel et, enfin, en matière de zones de protection du patrimoine architectural, elle a transformé l’avis conforme des architectes des Bâtiments de France en avis simple.
Si la commission des affaires économiques du Sénat constate que certains des ajouts apportés au texte initial n’ont pas d’effet accélérateur évident sur l’investissement, elle vous propose néanmoins de prendre acte de l’extension du champ du présent projet de loi et d’intituler « Dispositions diverses » sa dernière division. C’est dans ce cadre élargi qu’elle a réfléchi aux moyens de perfectionner et de compléter l’ensemble des mesures soumises à l’appréciation du Sénat.
S’agissant des contrats de partenariat, la commission des affaires économiques vous proposera deux amendements.
Le premier tend à améliorer le mécanisme de la cession de créances prévu à l’article 3, en portant le taux d’acceptation des créances de 80 % à 90 %.
Le second porte sur l’article 3 bis, relatif aux conditions du bouclage financier des offres de contrats de partenariat afin, d’une part, d’autoriser les personnes publiques à supporter jusqu’aux deux tiers du coût d’un projet et, d’autre part, de préciser les modalités d’ajustement final des conditions financières. Toutefois, je tiens à préciser que le sort de cet amendement dépendra essentiellement du vote de notre assemblée sur l’amendement présenté sur le même sujet par M. Marini, qui modifie de manière générale les conditions de financement pour les contrats de partenariat.
S’agissant de l’article 5 quater relatif à la transformation de l’avis conforme de l’architecte des Bâtiments de France en avis simple, dans le champ des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager, la commission vous proposera de reprendre la rédaction proposée, sur le même sujet, par l’article 14 du projet de loi portant engagement national pour l’environnement, dit « Grenelle II ».
Dans le même esprit, l’article 2 ter enserre dans des délais les opérations de diagnostic et de fouilles archéologiques et relève, en contrepartie, le taux de la redevance d’archéologie préventive.
Personnellement, j’aurais été tentée de supprimer cette hausse des charges pesant sur les entreprises, qui me semble un peu paradoxale, à un moment où l’on cherche plutôt à encourager l’activité économique. La commission des affaires économiques vous proposera toutefois d’en rester à l’augmentation décidée par l’Assemblée nationale. En revanche, elle considère avec intérêt certains des amendements qui prévoient de réduire encore les délais proposés par les députés.
S’agissant de l’article 6 quater, qui est relatif à la ratification de l’ordonnance du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence, la commission des affaires économiques a été sensible à la nécessité de ratifier rapidement cette ordonnance, qui risque autrement d’être contestée devant les juridictions.
Néanmoins, comme toute ratification, celle-ci appelle un examen attentif du texte soumis. La commission vous proposera donc un amendement visant à assortir la ratification de deux réserves.
Il convient en effet, d’une part, de rétablir pleinement le pouvoir donné au président de l’Autorité de la concurrence d’adopter seul les actes de pure procédure, d’autre part, de confirmer la volonté du législateur que le conseiller-auditeur placé auprès de ladite Autorité de la concurrence possède la qualité de magistrat.
Enfin, la commission des affaires économiques proposera deux amendements portant articles additionnels et tendant, le premier à alléger les procédures d’attribution des aides en faveur de l’habitat privé, le second à favoriser le développement des réseaux de fibre optique. Ces deux dispositions visent à accélérer les procédures de construction et d’investissement et à les faciliter : elles s’inscrivent donc pleinement dans le cadre du plan de relance.
Du reste, la commission a également considéré favorablement d’autres amendements dont l’objet est d’introduire dans le texte de nouveaux dispositifs tendant à accélérer l’investissement. C’est en effet par ce biais que nous pourrons préparer efficacement l’avenir et la reprise économique.
Aussi, sous réserve de ces modifications, la commission des affaires économiques vous proposera, mes chers collègues, d’adopter les dispositions du présent projet de loi.