Les avis de M. le rapporteur et de M. le ministre ne m'ont pas convaincu car, à l'évidence, ce projet de loi a été élaboré dans le mépris de la consultation populaire, qu'il s'agisse de l'avis des organisations de salariés, des associations de consommateurs ou même de secteurs industriels Ma collègue Annie David a évoqué la situation de l'industrie papetière ; on pourrait également citer l'industrie verrière. Tous ces avis ont été ignorés !
Or, l'article 1er ouvre le projet de loi sur la question tarifaire au titre de laquelle les premiers concernés sont les consommateurs finaux, c'est-à-dire l'ensemble de nos concitoyens.
Comment prétendre qu'il pourrait être sage et opportun de procéder à l'ouverture complète des marchés de l'énergie alors que leur ouverture partielle depuis 2000 a eu tant d'effets néfastes sur l'industrie et sur l'emploi, comme le dénoncent ceux-là mêmes qui en sont victimes ?
De plus, l'ensemble du projet de loi, bien que vous vous en défendiez, signe la fin de la maîtrise des prix de l'énergie par l'État et le renoncement au principe de péréquation permettant une tarification unique sur l'ensemble du territoire à un coût relativement limité.
Votre article 1er, qui se veut rassurant dans ce domaine en garantissant en principe le maintien des tarifs régulés - mais pas le niveau de cette régulation ! - et une tarification sociale, expose en réalité l'ensemble des consommateurs finaux à une débâcle tarifaire sans que vous nous apportiez la moindre preuve d'un quelconque bienfait de l'ouverture à la concurrence pour les ménages et pour la société. Car, je le rappelle, aucun bilan étayé sur l'application des directives européennes n'a encore vu le jour !
En revanche, nous avons pu mesurer les conséquences de la libéralisation des tarifs de l'électricité pour les entreprises qui en avaient fait le choix. L'exemple californien, qui est un parmi tant d'autres, a de quoi nous inquiéter quant à l'avenir de telles mesures, puisque l'on constate, dans cet État, des augmentations allant jusqu'à 500 %.
Malgré les hausses déjà enregistrées et le danger de les voir s'étendre à l'ensemble de la population, vous prenez de surcroît le risque de voir ces augmentations se poursuivre et s'accroître en proposant l'absorption de GDF par un groupe dont le capital est dominé par des fonds spéculatifs, ce qui ne pourrait qu'attiser l'inflation en cours.
Or le gaz n'est pas une marchandise comme une autre : c'est un produit de première nécessité pour des millions de familles, et il est indispensable au fonctionnement de milliers d'entreprises et de collectivités. Sa gestion est donc incompatible avec une politique financière à courte vue, qui plus est dans le contexte actuel de tensions internationales relatives à l'accès aux hydrocarbures.
Je voterai en faveur de cet amendement visant à supprimer l'article 1er, car le seul avantage de ce dernier est de montrer d'entrée de jeu la duplicité à laquelle a été soumis l'ensemble du projet : d'un côté, il prétend garantir les intérêts de nos concitoyens, tandis que, de l'autre, il entérine et élargit une situation qui a déjà prouvé son caractère alarmant, notamment en ce qui concerne la compétitivité des entreprises françaises.