Intervention de Michel Billout

Réunion du 18 octobre 2006 à 15h00
Secteur de l'énergie — Article 1er

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

Avec ce texte, le Gouvernement a choisi de procéder, pour l'essentiel, à la transposition des deux dernières directives « gaz » et « électricité » de 2003, adoptées par le Parlement européen, après un long débat suscité par des désaccords d'appréciation avec la Commission européenne, sur des rapports rédigés sur l'initiative de deux députés, l'un membre du groupe des Verts/Alliance libre pour l'Europe, l'autre issu du groupe socialiste européen.

Pour autant - et c'est le point fondamental de la discussion de ces deux directives -, les députés européens français de 2003 ont, dans leur majorité, rejeté les termes de ces deux textes, dont l'effet de symétrie est assez saisissant à la lecture. Vous conviendrez donc, monsieur le ministre, mes chers collègues, que nous puissions nous interroger sur la pertinence, compte tenu du vote des représentants français au Parlement européen, du choix que vous faites de transposer sans trop de modifications le texte des directives !

De surcroît, dans un certain nombre de domaines - c'est, d'ailleurs, toujours le cas avec les textes d'origine communautaire -, chaque pays est habilité à faire valoir une interprétation du texte qui n'en modifie pas l'économie générale, mais en permet la meilleure adéquation avec le droit national existant.

Il nous a donc semblé que nous pouvions, sur certains aspects du projet de loi que nous discutons actuellement, faire en sorte de tirer parti des marges de manoeuvre proposées par la directive elle-même quant à sa mise en oeuvre, et des facultés ainsi laissées au législateur national.

L'article 4 de la directive « électricité » précise : « Les États membres assurent la surveillance de la sécurité de l'approvisionnement. Lorsqu'ils le jugent opportun, ils peuvent confier cette tâche aux autorités de régulation visées à l'article 23, paragraphe 1. La surveillance couvre notamment l'équilibre entre l'offre et la demande sur le marché national, le niveau de la demande prévue, les capacités supplémentaires envisagées en projet ou en construction, ainsi que la qualité et le niveau d'entretien des réseaux, ainsi que les mesures requises pour couvrir les crêtes de demande et faire face aux déficits d'approvisionnement d'un ou plusieurs fournisseurs. Les autorités compétentes publient tous les deux ans, au plus tard le 31 juillet, un rapport dans lequel elles présentent les résultats de leurs travaux sur ces questions, ainsi que toute mesure prise ou envisagée à ce sujet et communiquent immédiatement ce rapport à la Commission. »

Ce débat est d'ailleurs fort important et entre dans le champ de nos interrogations sur la politique énergétique de notre pays, au moment où les cours actuels du gaz comme ceux de l'électricité nous conduisent à nous tourner vers des solutions de remplacement à la production électrique. Ce débat a déjà eu lieu lors de la discussion de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ; il présente aujourd'hui un nouvel intérêt, au moment où l'on s'apprête à ouvrir à l'exploitation un gisement de charbon situé dans le Nivernais. Nous avons déjà évoqué la pertinence de cette exploitation, qui se ferait à découvert, comme ce fut le cas pour les dernières unités de production charbonnière de notre pays.

Lors du débat de 2000, le président d'EDF avait d'ailleurs reconnu que la filière charbonnière ne devait pas être abandonnée, pour la simple raison qu'EDF exploitait des entreprises minières étrangères. De fait, une politique énergétique française audacieuse se doit de développer les techniques nouvelles permettant de valoriser la production de charbon nationale dans le cadre d'une coopération entre EDF et Charbonnages de France.

Ainsi, nous savons combien il peut être utile d'approfondir les techniques dites du « lit fluidisé circulant », ou LFC, qui présentent l'avantage de ne provoquer qu'un dégagement limité de soufre et de poussières.

La centrale de Provence en est un exemple éclatant : utilisée hier pour valoriser la production du bassin minier de Gardanne-Fuveau, elle est désormais centrée sur l'utilisation de charbon importé. Avec ses 250 mégawatts, sa chaudière, qui utilise depuis 1996 le LFC, se révèle la plus puissante du monde : elle élimine 95 % des rejets de dioxyde de soufre et 60 % des émissions de dioxyde d'azote.

S'il veut s'en donner les moyens, notre pays peut offrir un nouveau souffle à la production et à l'exploitation charbonnières : cela permettrait de rééquilibrer notre balance commerciale dans ce secteur, qui est largement déficitaire aujourd'hui.

A la lumière de ces arguments, j'invite le Sénat à adopter cet amendement, qui permettra à EDF de ne pas se désengager d'une activité essentielle à sa réussite sur les marchés extérieurs dans les décennies à venir.

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