Intervention de Michel Billout

Réunion du 18 octobre 2006 à 15h00
Secteur de l'énergie — Article 1er

Photo de Michel BilloutMichel Billout :

À travers cet amendement, nous souhaitons nous donner le temps de renégocier les directives européennes qui imposent l'ouverture à la concurrence du secteur énergétique.

En premier lieu, nous estimons que l'énergie - un secteur stratégique s'il en est - ne saurait être livrée à l'appétit d'intérêts privés qui sont, pour l'essentiel, des fonds de pensions britanniques et américains. Face à de telles puissances, monsieur le ministre, il est fort à craindre que la minorité de blocage de 34 % que vous nous présentez comme une garantie ne constitue en fait qu'un rempart dérisoire !

En second lieu, les vertus et les bénéfices attendus de l'ouverture à la concurrence n'ont pas été au rendez-vous.

Que ne nous avait-on pas promis en matière de baisse des prix et d'amélioration de la qualité des services ! Or les résultats ne sont pas là, et les exemples dont nous disposons ne convainquent guère.

Pour les entreprises, l'écart entre le prix réglementé de l'électricité et le prix libre est d'environ 66 %, ce qui est naturellement loin de satisfaire leurs dirigeants.

Quant aux prix du gaz, tout le monde a pu constater qu'ils ont augmenté de 30 % depuis le changement de statut de l'entreprise.

Combien de fois avons-nous dénoncé, y compris dans cet hémicycle, l'idéologie qui sous-tend la déréglementation des marchés et qui applique exactement les mêmes recettes, quel que soit le secteur économique concerné ?

Partout, que ce soit pour le rail, le transport aérien, la poste ou l'énergie, les mêmes causes produisent les mêmes effets. Partout, le procédé mis en oeuvre est le même : on accuse d'abord les entreprises publiques d'être mal gérées, alors qu'on ne leur accorde pas les moyens dont elles ont besoin, pour mieux justifier ensuite leur privatisation. Bien que le scénario ne soit pas tout à fait identique pour Gaz de France, la démarche est de même nature.

Il faut donc renégocier avec Bruxelles, sur la base de l'absence des résultats escomptés. En effet, ces directives transposées s'appliquent aveuglément, sans aucun souci de l'impact social, économique ou écologique !

Monsieur le ministre, je le répète, alors que le Gouvernement avait fait miroiter aux entreprises des baisses du tarif de l'électricité considérables, on a assisté tout simplement à des hausses sans précédent, que vous avez un peu trop tendance à imputer à la seule augmentation du prix du pétrole !

En nous demandant de privatiser GDF, comme vous le faites aujourd'hui, vous contredisez complètement la lettre, et même l'esprit, des textes que vous avez fait voter voilà à peine deux ans, à savoir la loi du 9 août 2004 et la loi de programme du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique du pays.

Et je n'évoque même pas, car nombreux sont nos collègues qui l'ont déjà justement dénoncé, le manquement à l'engagement de l'État dont s'est rendu coupable M. Sarkozy.

Eh bien, non ! Lorsqu'une directive européenne suscite des effets aussi négatifs, lorsqu'elle menace aussi dangereusement notre industrie et affecte la survie de certaines de nos entreprises, il n'est pas possible de baisser les bras et de céder au fatalisme !

Tant le bon sens que la responsabilité politique commandent d'exiger de Bruxelles un moratoire et de convier les autres États membres de l'Union à dresser le bilan de l'ouverture partielle du marché de l'électricité et à envisager une renégociation. Tel est l'objet de cet amendement.

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