Intervention de Pierre-Yves Collombat

Réunion du 30 mars 2011 à 14h30
Financement de l'action publique locale — Rejet d'une proposition de loi

Photo de Pierre-Yves CollombatPierre-Yves Collombat :

Quoi qu’il en soit, il faut avoir un solide culot pour affirmer tout à la fois, comme le rapport Durieux, que les bases de la CVAE évolueront comme le PIB et que la nouvelle contribution sera plus dynamique que la taxe professionnelle.

On le sait, depuis 1980, la base locative et la base « investissement » de la taxe professionnelle ont augmenté plus vite que le PIB, lequel a quadruplé sur la période, la base valeur locative des matériels et outillages ayant été multipliée par sept.

Ainsi, depuis 1980, le produit de la taxe professionnelle aura été multiplié, selon les sources, par six ou sept. Selon le cabinet Klopfer, la taxe professionnelle aura été l’impôt le plus dynamique que les collectivités locales aient jamais connu.

Sur la période récente, de 2000 à 2008, son produit a augmenté de 30 %, soit de 3, 75 % par an. Une telle hausse renvoie à celle des bases et des taux, ce qui ne sera plus le cas pour la CVAE.

Et l’on voudrait nous faire croire que le produit de la taxe professionnelle en période économique normale augmenterait moins vite que les seules bases de la CVAE en période de crise ! Évidemment, personne n’y croit, si ce n’est Mme la ministre de l’économie et des finances.

Ainsi une toute récente étude de la Fédération des maires des villes moyennes portant sur 155 territoires évalue-t-elle le « manque à gagner » pour les communes et intercommunalités à l’horizon 2015 à 160 millions d’euros, soit une perte de dynamique des ressources de 0, 7% par an.

Cette étude montre également que les villes moyennes et leurs EPCI sont particulièrement touchés.

Le second défaut majeur concerne l’insuffisance de la péréquation, alors que la nouvelle base du principal impôt économique, la valeur ajoutée, aurait pu permettre d’adopter des mécanismes plus satisfaisants.

D’abord, et cela rejoint le point précédent, la recette fiscale globale diminuant, on ne voit pas bien comment la part à répartir pourrait augmenter. L’État n’envisage en effet aucunement d’apporter sa contribution en la matière.

Pour le reste, notre collègue Jean-Pierre Chevènement l’a rappelé, même le complaisant rapport Durieux admet que « pour les régions et départements, l’efficacité des dispositifs de péréquation créés par la loi de finances pour 2010 paraît limitée ». Cette litote révèle l’étendue du problème.

La mise en place en 2011 d’un Fonds national de péréquation des DMTO ne constitue qu’un progrès limité, le prélèvement sur les contributeurs ne pouvant excéder 5 % des droits perçus au titre de l’année précédente. Et on ignore encore tout en ce qui concerne les dispositifs relatifs aux communes et intercommunalités ainsi qu’aux départements.

Voilà pour le constat ! Il nous reste l’espoir, qui est très exactement ce qui nous permet de vivre jusqu’à présent.

La proposition de loi qui nous est soumise apporte-t-elle une réponse suffisante au problème ainsi posé ?

Nicole Bricq l’a dit tout à l’heure, tel n’est pas totalement le cas, dans la mesure où, si ce texte vise à améliorer les ressources fiscales des collectivités, il tend à mobiliser une base particulièrement sensible à la conjoncture, volatile et, donc, difficile à capter.

On comprend bien l’intention des auteurs : il s’agit de taxer l’utilisation spéculative des actifs volatils des entreprises, ce qui, à nos yeux, serait une bonne chose.

Le jugement de M. le rapporteur, qui dénonce le caractère idéologique de cette proposition de loi, m’a, je l’avoue, beaucoup amusé. En effet, selon lui, penser que la fonction des entreprises n’est pas d’enrichir les propriétaires en spéculant mais de produire de la richesse est un choix idéologique. Penser l’inverse relèverait d’une autre dimension, n’est-ce pas, cher Charles Guené ? À vos yeux, l’orthodoxie libérale n’est pas une idéologie, c’est une science !

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