Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a presque une année, à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif au Grand Paris, les élus de mon groupe exprimaient leurs craintes et leurs désaccords suscités par la vision placée au cœur du projet d’aménagement métropolitain tant sur le plan institutionnel, avec la création de la Société du Grand Paris assurant la reprise en main par l’État de l’aménagement francilien, que sur le plan urbain, en raison d’un développement inégalitaire de la région capitale sous forme de pôle de développement concentrant l’ensemble des ressources et des moyens au détriment du reste du territoire.
Depuis, le temps a passé, le projet de loi a été adopté et le débat public autour des projets de transport s’est tenu de septembre à la fin de janvier. Reconnaissons qu’il fut important tant du point de vue quantitatif, puisque plus de vingt mille personnes y ont participé, que du point de vue qualitatif. Nous devons donc nous en féliciter.
Ce débat, démocratique, participatif, a permis de dégager un projet commun de transports assurant, pour partie, la convergence entre les projets de la région et le Grand huit, projet porté par le Gouvernement.
Nous pensons que cette concertation a été plus qu’utile, puisqu’elle a façonné un nouveau projet de transports remettant en cause l’objectif même du Grand huit en diminuant, notamment, les distances entre les gares. Je le dis avec force : il s’agit pour nous d’un progrès significatif et qualitatif qui peut permettre la mise en place d’un vrai réseau interbanlieues et non d’un métro rapide reliant exclusivement des pôles de développement à venir.
Cette volonté de sortir de l’affrontement État-région a d’ailleurs été symbolisée par le protocole d’accord signé le 26 janvier dernier, qui a abouti à des prises d’engagements partagés tant sur les financements que sur les tracés.
Parallèlement, depuis le vote de la loi, le schéma directeur de la région d’Île-de-France a enfin été transmis par le Président de la République au Conseil d’État. Chacun le sait ici, celui-ci a émis un avis négatif le 27 octobre 2010 au motif que ce SDRIF était incompatible avec la loi relative au Grand Paris. Les projets engagés en ont été bouleversés et les collectivités doivent aujourd’hui se référer au SDRIF de 1994…
La proposition de loi qui nous est soumise par nos collègues du groupe socialiste répond à la volonté de sortir le SDRIF de l’impasse dans laquelle celui-ci a été progressivement enfermé, objectif auquel nous ne pouvons que souscrire.
Pour autant, comme nous le disions en préambule et malgré les avancées réelles issues du débat public, nous restons sur le fond opposés à la loi relative au Grand Paris dont toute la nocivité demeure, malgré le compromis trouvé sur le tracé du métro Grand Paris Express. C’est ce qui motive nos réserves sur le deuxième paragraphe de l’article unique.
En effet, nous refusons toujours la prédominance des contrats de développement territorial sur l’ensemble des documents locaux d’urbanisme, y compris sur le SDRIF. Nous estimons que ces contrats vont à l’encontre de la cohérence du développement en Île-de-France, où l’ensemble des territoires situés sur le Grand huit seraient exemptés, par le biais des contrats de développement territorial, de toute compatibilité avec le SDRIF. Une telle vision revient à un « localisme » dangereux en matière urbaine et dont notre région capitale a déjà tant souffert durant des décennies.
Je ne reviendrai pas sur nos interrogations, nos craintes et nos désaccords sur la loi relative au Grand Paris, qui fait de ces contrats de développement local des sources de financement de la SGP. Ces opérations d’aménagement risquent ainsi d’être assujetties à des objectifs de rentabilité avant de répondre aux exigences d’intérêt général fondées sur la mixité sociale et la nécessaire réalisation d’équipements publics tout en préservant des espaces naturels pour répondre aux attentes et aux besoins des populations.
Sur cet aspect du financement, permettez-moi de rappeler que le métro Grand Paris Express dispose de financements pour le moins incertains, voire contestables. En effet, alors que, l’année dernière, on nous promettait, la main sur le cœur, l’abondement de la part de l’État d’une subvention en capital de 4 milliards d’euros à la SGP lui permettant de lever les emprunts, aujourd’hui, l’État n’a toujours pas respecté sa parole. Comment accepter également que le financement de ce projet de transport repose de manière indue sur l’ensemble des Franciliens, par le biais de la nouvelle taxe spéciale d’équipement créée par la loi de finances rectificative ?
En outre, rien ne permet d’infirmer aujourd’hui l’analyse que nous réalisions à l’époque concernant la tentative de reprise en main par l’État de l’aménagement en Île-de-France.
Si nous sommes favorables à la coélaboration, à la concertation entre les acteurs, nous estimons qu’il est parfaitement utile que s’engage aujourd’hui une discussion entre l’État et la région sur l’avenir de ce territoire métropolitain. Cependant, nous estimons que, pour rétablir la confiance avec l’ensemble des élus franciliens, l’État devrait renoncer à la mainmise de la SGP sur un périmètre de 400 mètres autour des gares.
Mais revenons à cette proposition de loi.
Nous l’avons dit : accord de principe afin que l’ensemble des travaux du SDRIF de 2008 ne tombent pas dans l’abîme et que ce soit encore le SDRIF de 1994 qui s’applique. Il fallait trouver un véhicule législatif, et celui-ci paraît approprié, avec les réserves que nous venons de formuler sur le paragraphe II de l’article unique.
Cependant, nous ne pouvons adhérer au paragraphe III de ce même article unique, qui préconise de raccourcir les délais et le recueil des avis autour de la révision du SDRIF.
En effet, nous estimons que la révision du SDRIF ici prévue doit avoir la même ampleur que les débats publics tenus cet hiver. Pour le moins, elle doit respecter les prescriptions légales en termes de consultation, sans que soient obligatoirement remis en branle l’ensemble des groupes de travail comme cela s’était produit pour le SDRIF de 2008. Il ne faudrait pas nous faire dire ce que nous ne disons pas !
Sur le fond, la prise en compte des nouveaux éléments relatifs au réseau de transport du Grand Paris ainsi que de tous les événements qui ont pu marquer le paysage francilien depuis 2008 devrait conduire la région à ne pas se satisfaire d’une révision clandestine, rapide, avec une date butoir arbitrée en 2013. À l’inverse, la région pourrait se saisir de cette occasion pour réinterroger le projet régional francilien afin de dessiner les contours d’une métropole de progrès toujours plus au service de tous les habitants.
Ainsi, comme en commission, nous réitérerons notre proposition, non plus par un amendement, mais sous la forme d’un sous-amendement, visant à ne pas déroger au droit commun pour la révision du SDRIF en termes de consultation et de recueil des propositions des conseils généraux, du conseil économique, social et environnemental régional ainsi que des chambres consulaires.
Vous l’aurez compris, nous sommes non pas pour une limitation des consultations obligatoires mais bien pour un élargissement de celles-ci, afin de faire du SDRIF un projet ambitieux pour le territoire, au plus près des besoins de ses habitants.