Nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation ubuesque, l’aménagement du territoire de l’Île-de-France, la région capitale, étant régi par un texte vieux de dix-sept ans !
Pourquoi un tel retard ? Après quatre ans de travaux, dans lesquels les écologistes se sont particulièrement impliqués, la région d’Île-de-France a adopté en 2008 un schéma directeur tourné vers l’avenir, à la hauteur des enjeux sociaux et environnementaux de la métropole du xxie siècle.
Malheureusement, le Président de la République a décrété, au mépris de la décentralisation et de l’esprit de la loi, qui accorde cette prérogative à la région, que lui seul avait une vision pour le développement de l’Île-de-France et que celle-ci était incapable de décider de son avenir. La consultation –factice – de dix grands architectes urbanistes, qui se sont eux-mêmes émus d’avoir été instrumentalisés, n’a pas donné au projet le crédit que l’on aurait pu malgré tout espérer.
Le Gouvernement a donc logiquement bloqué le parcours juridique du SDRIF, dans le même temps qu’il faisait voter une loi, dite « relative au Grand Paris », qui entérinait le projet, opposé à celui de la région, arrêté solitairement par le Président de la République.
Lorsque le Gouvernement a ensuite transmis le schéma directeur au Conseil d’État, celui-ci n’a bien sûr pu que constater qu’il était contradictoire avec la loi, et donc émettre un avis défavorable.
C’est ainsi que l’aménagement de l’Île-de-France est aujourd’hui toujours régi par un texte de 1994, qui bloque la mise en œuvre de nombreux projets indispensables au développement des collectivités territoriales et de la région elle-même. Bel exploit !
La proposition de loi initiale, dans la mesure où elle prévoyait l’application immédiate des dispositions du SDRIF non contradictoires avec la loi, représentait un petit pas en avant. Pour autant, l’accord intervenu le 26 janvier entre l’État et la région laisse en suspens des questions cruciales : le tracé du nouveau réseau de métro ignore largement la desserte des bassins de vie et des zones enclavées, notamment à l’est de Paris ; rien n’est prévu pour protéger le plateau de Saclay, qui concentre les terres les plus fertiles d’Île-de-France, d’une urbanisation anarchique ; la région et les élus locaux sont dessaisis de leurs prérogatives en matière de transports au profit de la Société du Grand Paris, à la main de l’État ; enfin, le financement de ce projet pharaonique comporte encore de trop nombreuses zones d’ombre !
En conclusion, je regrette qu’un amendement adopté aujourd’hui permette des constructions ou des aménagements conformes au SDRIF de 1994 ou au SDRIF de 2008. On pourrait penser que cela offre deux protections au lieu d’une, mais, au contraire, cela multiplie les possibilités, puisque ce qui est interdit par l’un peut être autorisé par l’autre.
Nous craignons donc que ne se multiplient les atteintes aux zones naturelles, agricoles et forestières. Alors que nous jugions que cette proposition de loi marquait une petite avancée, nous redoutons un recul environnemental du fait de l’adoption de cet amendement. C’est pourquoi les écologistes s’abstiendront.