Intervention de Philippe Douste-Blazy

Réunion du 18 novembre 2004 à 10h00
Financement de la sécurité sociale pour 2005 — Débat sur les accidents du travail et les maladies professionnelles

Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, l'adaptation de la branche accidents du travail et maladies professionnelles aux mutations économiques et sociales est l'une des priorités de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Cette branche fait face à de nouveaux défis. Si le nombre d'accidents du travail avec arrêt a décru de plus de 30 % au cours des trente dernières années, le nombre de maladies professionnelles reconnues a, en revanche, très fortement augmenté depuis vingt ans. La branche doit également faire face aujourd'hui à la croissance très rapide de certaines pathologies, notamment celles qui sont liées à l'amiante.

Dans un contexte de croissance économique ralentie, les comptes de la branche accidents du travail et maladies professionnelles dégagent depuis 2002 un résultat déficitaire, qui devrait atteindre 700 millions d'euros en 2005. La réforme de cette branche est une nécessité et je souhaite que le dialogue s'engage dans les prochaines semaines sur ce sujet entre l'ensemble des partenaires.

Cette volonté réformatrice a d'ailleurs été inscrite dans la loi du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie. L'article 54 de cette loi invite en effet les organisations professionnelles d'employeurs et les organisations syndicales de salariés représentatives au plan national à soumettre au Gouvernement et au Parlement, dans le délai d'un an, des propositions sur l'avenir de la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

Les propositions attendues portent notamment sur la gouvernance de la branche, sur l'évolution des conditions de prévention, ainsi que sur la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles. Elles devront aussi créer les conditions nécessaires au maintien d'une solidarité professionnelle dans le domaine des accidents du travail et des maladies professionnelles et dresser les conditions d'un retour à l'équilibre.

La signature prochaine d'une convention d'objectifs et de gestion entre l'Etat et la branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui sera la première du genre, s'inscrit également dans cette perspective.

Beaucoup plus qu'un simple instrument de programmation budgétaire, cette convention entend donner un nouvel élan à la politique de prévention des risques professionnels. Elle engagera notamment la branche dans un programme d'amélioration de la qualité du service rendu et élargira sensiblement l'offre pour les différents publics.

Cette convention s'inscrit dans le programme que le Gouvernement a engagé en matière de santé environnementale, et qui a été présenté le 21 juin dernier par le Premier ministre, mais aussi dans le programme de santé au travail annoncé par le ministre délégué aux relations du travail, M. Gérard Larcher, qui est actuellement en cours d'élaboration.

En ce qui concerne le dossier de l'amiante, les deux dispositifs qui visent, d'une part, à indemniser les victimes de maladies professionnelles liées à l'amiante, c'est-à-dire le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, et, d'autre part, à permettre un départ anticipé en préretraite, c'est-à-dire le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, le FCAATA, sont montés en charge rapidement au cours de ces trois dernières années. Ils remplissent leur mission dans des conditions satisfaisantes et sont conformes à la logique de solidarité nationale qui anime notre politique à l'égard des victimes de l'amiante.

Afin de consolider cette politique dans les années qui viennent, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 prévoit la mise en place d'une contribution limitée pour les employeurs dont les salariés bénéficient du dispositif de préretraite FCAATA, à l'image de ce qui existe pour d'autres dispositifs de préretraite. Cela n'aura aucune conséquence pour les salariés, dont les droits ne seront pas modifiés.

Cette contribution devrait apporter au FCAATA un nouveau financement, évalué à 120 millions d'euros en 2005. Elle permettra de répartir l'effort supplémentaire de financement entre les entreprises à l'origine de l'exposition à l'amiante au nom du principe de solidarité. Des dispositions sont prévues afin d'éviter que l'effort ne pèse trop lourdement sur des entreprises parfois fragiles, notamment le plafonnement de la contribution par entreprise et l'exemption du premier bénéficiaire.

En ce qui concerne le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante, le FIVA, les dépenses d'indemnisation montent en charge très rapidement. Plus de 700 dossiers de victimes arrivent chaque mois alors qu'ils étaient moins de 600 en 2003.

Les dotations du FIVA avaient permis dans le passé d'accumuler des réserves. Pour l'année qui vient, les réserves couvriront plus de la moitié des dépenses d'indemnisation. La branche accidents du travail et maladies professionnelles doublera son apport en 2005 en participant à hauteur de 200 millions d'euros. L'Etat prendra également sa part de responsabilité dans le financement : sa contribution sera fixée dans la loi de finances rectificative.

Par ailleurs, le Gouvernement invite les partenaires sociaux à engager une réflexion sur l'organisation des voies d'indemnisation pour les victimes de l'amiante, ainsi que sur les modalités de recours contre les entreprises et l'Etat. Aujourd'hui, les victimes peuvent se présenter devant le FIVA, mais également devant des juridictions. Les victimes professionnelles peuvent ainsi engager des procédures pour faute inexcusable sans passer par le FIVA.

Les arrêts du Conseil d'Etat de février dernier, qui ont reconnu la responsabilité de l'Etat dans la gestion de ce dossier, ont des conséquences importantes sur la mise en oeuvre des procédures d'indemnisation. Il nous faut donc réfléchir ensemble, avec les partenaires sociaux, les employeurs et les associations, aux moyens de consolider les dispositifs d'indemnisation pour garantir à la fois la sécurité juridique et l'égalité dans l'accès à l'indemnisation.

Le Gouvernement souhaite que des propositions lui soient adressées pour mettre en place une réforme en 2005.

Vous le voyez, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, les choix du Gouvernement en matière d'accidents du travail s'inscrivent dans une double orientation. Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2005 traduit à la fois la priorité accordée à la réforme de la branche accidents du travail et maladies professionnelles et la préservation du principe de solidarité nationale.

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