Intervention de Xavier Bertrand

Réunion du 18 novembre 2004 à 10h00
Financement de la sécurité sociale pour 2005 — Débat sur les accidents du travail et les maladies professionnelles

Xavier Bertrand, secrétaire d'Etat à l'assurance maladie :

Je me félicite, comme vous, monsieur Dériot, de la tenue de ce débat sur la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

En effet, comme vous l'avez signalé, le financement des fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante pèse lourdement sur les finances de la branche. Notre proposition de mise en place d'une contribution au FCAATA s'inscrit d'ailleurs dans cette perspective. Il faudra, dans les années à venir, préciser les financements et la place respective de chacun des financeurs : ce sera l'un des enjeux de la concertation que Philippe Douste-Blazy a évoquée devant vous tout à l'heure.

Quant à la convention d'objectifs et de gestion, la COG, comme cela a été évoqué lors de la réunion de la commission des comptes de la sécurité sociale, elle sera signée rapidement, dès que la nouvelle commission des accidents du travail sera installée, de sorte que la convention engage pleinement la nouvelle instance. Cette commission sera mise en place demain, le 19 novembre, la signature de la COG suivant très rapidement ; c'est du moins notre souhait !

L'augmentation du nombre de reconnaissances des maladies professionnelles est une réalité : le chiffre de 10 000 malades reconnus en 1995 a été multiplié par quatre. L'amélioration des conditions de reconnaissance explique cette forte progression.

Cette évolution rapide aura certainement un impact sur le transfert de la branche accidents du travail et maladies professionnelles vers la branche maladie, lequel sera traité l'année prochaine dans le cadre de la commission Levy-Rosenwald.

Quant au passage à la réparation intégrale dans des conditions de droit commun, il aurait des conséquences qui doivent être étudiées avec précaution avant toute décision.

Une telle réparation signifierait tout d'abord la remise en cause des principes majeurs du système actuel, comme la présomption d'imputabilité et l'introduction dans l'entreprise d'une procédure largement contentieuse entre employeurs et employés. Elle aurait surtout un coût difficilement supportable pour les finances de la branche : le rapport Laroque évalue le passage à une réparation intégrale à plusieurs milliards d'euros, de 1, 5 milliard à 4 milliards selon les options retenues.

Sa mise en place induirait de nombreux perdants parce que les logiques d'indemnisations sont très différentes des règles actuellement appliquées. Les gagnants seraient des personnes jeunes qui subissent de lourds préjudices, mais aussi des personnes ayant eu un accident n'entraînant pas d'incapacité ou qu'une faible incapacité. Ces dernières hypothèses sont les plus largement répandues. En revanche, y perdraient des personnes plutôt âgées avec un salaire supérieur à la moyenne, les retraités et un bon nombre d'ayants droit.

Je rappellerai que nulle part en Europe, en dehors des pays de droit anglo-saxon, qui renvoient au droit commun, il n'existe de réparation intégrale. Le système français est donc « en ligne » avec les systèmes européens ; c'est aussi l'un des plus favorables.

Monsieur Jégou, vous avez souligné le poids des dépenses actuelles et futures liées à l'indemnisation de l'amiante et au dispositif connexe de cessation anticipée. Il est vrai que l'affirmation de la solidarité nationale aboutit à une charge financière importante.

Vous avez également évoqué les difficultés liées à la mise en place de la réparation intégrale, que je viens de rappeler à l'instant.

Quant à la contribution de l'Etat au FIVA, elle est inscrite à concurrence de 52 millions d'euros en loi de finances rectificative pour 2004. Si cela est nécessaire - nous ne le pensons pas à l'heure actuelle -, des abondements complémentaires de l'Etat interviendront en 2005. En tout état de cause, l'indemnisation sera garantie.

Monsieur Gournac, vous avez attiré l'attention du Gouvernement sur un certain nombre de points.

La question de l'avenir de la branche passe en effet par une réflexion sur sa gouvernance - vous avez raison, monsieur le sénateur -, mais aussi sur les conditions de réparation et de tarification. Sur ces points, le Gouvernement attend des propositions de la part des partenaires sociaux dans le courant de l'année 2005. Nous connaissons l'intérêt que vous portez aux questions sociales ; c'est pourquoi, sur ce sujet précis, nous veillerons à informer la représentation nationale, la Haute Assemblée et vous tout particulièrement.

Mme Payet a insisté sur le financement de la branche accidents du travail et maladies professionnelles.

Le système actuel est fondé sur le risque produit par l'entreprise. Le principe doit être conservé et même renforcé. Une mission de l'IGAS, l'inspection générale des affaires sociales, étudie à notre demande les voies d'une évolution dans ce sens. Ses conclusions pourront nourrir le débat des partenaires sociaux que le Gouvernement et le Parlement ont souhaité lors du vote sur la loi relative à l'assurance maladie.

Madame Demessine, vous êtes intervenue sur le FIVA et sur les délais d'indemnisation.

Le FIVA doit effectivement faire face à une hausse du nombre de demandes, ce qui est, d'une certaine façon, la preuve de son succès. Je rappelle que 95 % des offres sont acceptées.

Les délais de traitement ne sont pas de neuf mois, madame le sénateur ! Pour les victimes du cancer, les délais sont de trois à quatre mois ; pour les autres demandeurs, ils sont de l'ordre de six mois.

Les effectifs du fonds seront augmentés en 2005 afin d'accélérer encore le juste traitement auquel les victimes ont droit.

Monsieur Godefroy, je tiens à vous rassurer sur la participation de l'Etat au FIVA en 2005 ; sa contribution sera fixée dans le cadre de la loi de finances rectificative. Il est clair que toutes les demandes d'indemnisation seront traitées et honorées, comme je l'ai indiqué.

Je tiens à vous dire par ailleurs que les ministres en charge du travail et de la sécurité sociale définissent conjointement la politique générale de prévention des risques professionnels, en concertation avec les partenaires sociaux, au sein du Conseil supérieur de la prévention des risques professionnels.

Le cadre de cette politique est d'ores et déjà tracé par le plan « santé environnement », présenté par le Premier ministre le 21 juin 2004, et par le plan « santé travail », en cours d'élaboration. Ce dernier a pour objet d'améliorer les connaissances sur les risques professionnels, d'obtenir une plus grande effectivité des contrôles, de développer la concertation à tous les niveaux, d'inciter les entreprises à se mobiliser pour la santé et la sécurité au travail. Ce plan sera présenté dans les prochaines semaines ; il mobilise le Gouvernement.

Monsieur Domeizel, vous soulignez l'éclatement des modalités de réparation des accidents du travail entre les différents régimes de sécurité sociale. Le Gouvernement est comme vous favorable à un rapprochement des règles concernant les accidents du travail d'un régime à l'autre ainsi qu'à l'instauration de statistiques précises et fiables ; cela fait l'objet de ses préoccupations.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je ne saurais bien évidemment répondre de façon exhaustive à l'ensemble des intervenants en un temps aussi bref, mais je tiens à souligner combien il est important de continuer à nourrir ce débat essentiel pour notre solidarité nationale.

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