Intervention de Robert del Picchia

Réunion du 26 octobre 2010 à 14h30
Débat préalable au conseil européen des 28 et 29 octobre 2010

Photo de Robert del PicchiaRobert del Picchia, en remplacement de M. Josselin de Rohan, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi, tout d’abord, d’excuser le président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, Josselin de Rohan, qui effectue actuellement un déplacement au siège de l’Organisation des Nations unies, à New York, et qui m’a demandé de le remplacer aujourd’hui.

L’ordre du jour du Conseil européen des 28 et 29 octobre est particulièrement chargé.

Le président de la commission des affaires européennes, Jean Bizet, vient d’évoquer la réforme de la gouvernance économique européenne. Comme lui, je me félicite du rôle moteur du couple franco-allemand, qui a ouvert la voie à un renforcement de la gouvernance économique en Europe.

Afin de tirer les leçons de la crise grecque et de prévenir tout risque pour la stabilité de la zone euro, il est indispensable de renforcer la coordination des politiques budgétaires, d’introduire un mécanisme de résolution des crises et d’aller vers une véritable gouvernance économique européenne, que la France appelle de ses vœux depuis déjà plusieurs années. Comme cela a été souligné, il s’agit là de la réforme la plus importante des règles économiques en Europe, depuis la mise en place de l’euro.

On constate, une nouvelle fois, que lorsque l’Europe avance, c’est à la suite d’un accord entre la France et l’Allemagne. Vous l’avez souligné, monsieur le secrétaire d’État.

Si je me félicite naturellement de ce progrès, j’avoue que je m’interroge sur le calendrier qui sera retenu pour la révision du traité.

Dans leur déclaration commune, le Président de la République et la Chancelière allemande ont proposé une révision du traité de Lisbonne qui serait limitée à ce seul objet et qui pourrait intervenir avant 2013.

Comment une telle révision pourrait-elle intervenir dans un délai qui semble un peu court, compte tenu des procédures de ratification ? Ne serait-il pas plus opportun, par exemple, de procéder à une unique révision des traités, par exemple à l’occasion de l’adhésion de la Croatie à l’Union européenne ? On pourrait ainsi faire d’une pierre deux coups.

C’est d’ailleurs ce modèle qui a été choisi par les chefs d’État et de gouvernement pour accorder des garanties à l’Irlande lors de la ratification du traité de Lisbonne.

Je voudrais toutefois concentrer mon propos sur les sujets de politique étrangère.

En effet, si l’intégration européenne connaît actuellement d’importantes avancées en matière économique, avec la perspective d’un gouvernement économique européen, et nous nous en félicitons, en revanche, en matière de politique étrangère et de défense, les choses progressent assez lentement.

Le Conseil européen devrait, d’abord, définir la position de l’Union européenne en vue du prochain sommet du G20, qui se tiendra à Séoul les 11 et 12 novembre prochain.

Il devrait, ensuite, arrêter une position commune sur le changement climatique, en vue de la réunion de Cancún.

Enfin, le Conseil européen devrait également évoquer les relations avec les États-Unis, à l’approche du sommet de Lisbonne du 20 novembre.

Les relations entre l’Union européenne et ses partenaires stratégiques figuraient à l’ordre du dernier Conseil européen de septembre.

On peut regretter que des questions majeures, comme les relations de l’Union européenne avec les États-Unis, la Russie, la Chine et les autres pays émergents, aient été un peu éclipsées par la polémique sur les Roms. Heureusement, cette polémique a pris fin ; du moins, l’espérons-nous : c’est en tout cas ce que vous avez affirmé au journal Die Welt, monsieur le secrétaire d’État.

D’ici une vingtaine d’années, l’Europe ne représentera que 6 % des habitants de la planète. Elle risque d’être marginalisée sur la scène internationale, face aux États-Unis, à la Chine et aux autres puissances émergentes. L’Union européenne ne parviendra à faire entendre sa voix, à être une puissance dans la mondialisation, que s’il existe une réelle unité entre les Européens, condition première d’une politique étrangère commune.

Cela m’amène à évoquer le rôle de l’Union européenne au Proche-Orient.

Nous avons été nombreux à regretter l’absence de l’Union européenne lors de la rencontre consacrée à la relance du processus de paix, qui s’est déroulée à Washington le 2 septembre dernier.

Alors que l’Union européenne constitue, et de loin, le premier donateur dans la région et le premier partenaire commercial d’Israël, elle peine encore à devenir un acteur politique. Comment faire en sorte, monsieur le secrétaire d’État, qu’elle soit plus présente et plus active ?

Certes, les ministres français et espagnol des affaires étrangères ont effectué récemment une tournée dans la région. La France a également suggéré à ses partenaires d’organiser un sommet sur le Proche-Orient, qui devait se tenir à Paris le 21 octobre, et d’utiliser l’Union pour la Méditerranée pour la relance du processus de paix. Toutefois, il semblerait que ces initiatives soient compromises en raison de la décision du gouvernement israélien de relancer, notamment, la colonisation à Jérusalem-Est.

Je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d’État, si le sommet de l’Union pour la Méditerranée, qui avait déjà été reporté en juin dernier, aura bien lieu en novembre, à Barcelone, et s’il pourra se traduire par de nouvelles initiatives en faveur du processus de paix.

Avec le traité de Lisbonne, l’Union européenne dispose certes de nouveaux instruments, en particulier le poste de Haut Représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité et le Service européen pour l’action extérieure.

Alors que le processus législatif européen vient de s’achever avec l’adoption du règlement financier et du règlement sur le statut des fonctionnaires de ce service, je souhaiterais savoir si le résultat des négociations répond aux préoccupations françaises, malgré les concessions faites au Parlement européen pour parvenir à un accord.

Je pense, en particulier, à la représentation des diplomates nationaux au sein du Service européen pour l’action extérieure. Je me félicite, à cet égard, de la nomination de M. Pierre Vimont au poste de secrétaire général exécutif.

Je pense également au droit de regard du Parlement européen en matière budgétaire ou de nomination des chefs de délégation, ou encore à la place des Français et de la langue française au sein de ce service.

Mes chers collègues, l’Union européenne vient également de subir un sérieux revers devant l’Assemblée générale des Nations unies, puisqu’elle s’est vue refuser, le 14 septembre dernier, la possibilité, pourtant prévue par le traité de Lisbonne, que des représentants de l’Union européenne puissent s’exprimer dans cette enceinte, comme le faisaient jusqu’à présent les représentants de la présidence semestrielle. Or cela aurait permis de renforcer la visibilité politique et l’efficacité de l’Union européenne au sein des Nations unies.

Monsieur le secrétaire d’État, quelles sont les raisons de cet échec et quelle stratégie les États membres entendent-ils suivre pour renforcer la position de l’Union européenne au sein de l’ONU ?

Enfin, avec la crise économique, on constate que la réduction des budgets de défense en Europe s’accentue, ce qui est en total décalage avec les évolutions observées partout ailleurs dans le monde, notamment en Asie et au Moyen-Orient.

L’effort de défense fait partie intégrante de la stratégie de puissance des grands pays émergents. Dans ce contexte, l’Europe ne risque-t-elle pas de perdre progressivement tout moyen de peser sur la scène internationale ? Lorsque l’Europe intervient sur la scène internationale, sur le plan de la défense, et même sur le plan militaire quand cela est nécessaire, pour trouver des solutions à certaines crises, c’est toujours très positif pour son image.

Monsieur le secrétaire d’État, comme beaucoup d'entre nous, j'ai la conviction que la politique étrangère et la politique de défense sont des domaines dans lesquels il est désormais impératif d'avancer. Les citoyens attendent une affirmation de l'Europe dans ces domaines, et nous pensons que cette affirmation est nécessaire à l'équilibre du monde multipolaire dans lequel nous nous trouvons.

Je vous remercie des réponses que vous pourrez apporter à ces questions, monsieur le secrétaire d’État.

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