S’agissant de ces questions, il est difficile de s’y retrouver. Trois séries de propositions sont sur la table.
Tout d’abord, vient une série de propositions faites de façon anticipée par la Commission. Cinq projets de textes législatifs sont sur la table, la Commission les a publiés de façon anticipée avant la sortie du rapport Van Rompuy. Ensuite, nous disposons du rapport Van Rompuy lui-même. Enfin, vient la déclaration de Deauville.
Comment s’y retrouver ?
Ma première question est la suivante, monsieur le secrétaire d’État : considère-t-on que les propositions de la Commission ont vocation à être classées verticalement, à disparaître de nos « écrans radars » ? C’est l’impression que donne la situation actuelle. On ne parle en effet aujourd’hui que de l’accord de Deauville.
S’agissant du rapport Van Rompuy, ce dernier a proposé une prise en considération de la dette dans le mécanisme de surveillance budgétaire, et nous nous en réjouissons puisque cela signifie que les critères pris en compte sont élargis. Cela relève du bon sens et aurait dû être fait bien plus tôt.
Monsieur le secrétaire d’État, je profite de ce sujet pour évoquer le problème des déficits, que vous avez vous-même abordé. Je ne prends pas part à la nouvelle adoration du « veau d’or ». La pensée est en effet aujourd’hui unique, la seule chose ayant de l’importance en économie étant la ligne des 3 % du déficit budgétaire. Il n’y a plus rien d’autre ! Bien entendu, personne ne pense qu’il soit bon que nous connaissions des déficits trop importants. Il faut bien sûr les réduire. Mais nous devons aussi prendre en compte d’autres éléments dans la conduite des affaires, en particulier le problème de l’emploi et le problème de l’investissement dans la recherche et l’innovation – excellemment abordé par notre collègue Pozzo di Borgo –, les investissements schumpetériens, ceux qui préparent l’avenir. Il existe de bons déficits comme il en existe de mauvais. En investissant dans la recherche, vous faites un bon déficit, qui vous sera rendu plus tard, pour prendre une image biblique.
Dans l’état actuel des choses, comme les rats de la légende, nous suivons le joueur de flûte de 3 % et nous courons nous jeter dans la mer de la déflation. Or, la déflation existe déjà au Japon, elle menace aux États-Unis. La France, pour sa part, danse sur le volcan ! Je veux donc relativiser l’approche des déficits budgétaires.
Par ailleurs, nous considérons que le pacte de stabilité et de croissance devrait prendre en compte un certain nombre de critères économiques, notamment la politique d’investissement dans la recherche et le niveau de l’emploi, pour ne citer que les deux plus importants.
La politique économique est un ensemble, et rien n’est plus essentiel que la croissance et la création d’emplois. Nous devons aussi distinguer les différents types de déficits.
La task force de M. Van Rompuy n’a pas fixé d’objectifs chiffrés pour évaluer la trajectoire de réduction de la dette, mais a seulement fait référence à des critères quantitatifs et à des dispositions méthodologiques. Monsieur le secrétaire d’État, la France proposera-t-elle de prendre en considération certains autres éléments, par exemple le niveau de la dette privée ainsi que l’impact de la réforme des retraites sur les finances publiques ?
Quant aux sanctions financières et politiques, je partage les propos de M. Bizet : l’accent est trop mis sur l’aspect « sanction » et pas assez sur l’aspect « prévention ».
La palette des sanctions est essentiellement de nature financière : dépôt sur un compte bloqué rémunéré – très faiblement –, puis non rémunéré – cette dernière mesure devient douloureuse, surtout si sont concernés 3 milliards d’euros, comme cela a été dit – avant une amende. Pour ma part, j’estime qu’il sera très difficile de mettre ces dispositions en œuvre. Un accord devra être passé autour d’une table. Or nous savons à quel point les États sont timorés lorsqu’il s’agit d’infliger une amende à un autre État en raison de son mauvais comportement. Dans un tel cas de figure, nous nous cachons derrière notre petit doigt…
Par ailleurs, la task force propose de frapper au portefeuille, en quelque sorte. Cette politique semble surtout d’affichage. La politique agricole commune est intouchable. Elle ne se prête pas à ce type d’exercice. Reste alors les fonds structurels. Mais réduire les fonds accordés dans ce cadre à des pays déjà en difficulté est tout de même paradoxal. Il s’agit plutôt de mesures déclaratives.
J’en viens à la déclaration de Deauville, qui m’inspire une réaction ambivalente. Certes, je me réjouis qu’un accord soit intervenu entre la France et l’Allemagne, le moteur franco-allemand…