Intervention de Francis Grignon

Réunion du 2 mai 2005 à 21h30
Énergie — Discussion d'un projet de loi d'orientation en deuxième lecture

Photo de Francis GrignonFrancis Grignon :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant de plaider en faveur de certains aspects de ce projet de loi, je voudrais rappeler quelques vérités fondamentales.

En 2030, si nous continuons tous sur la même lancée, la consommation d'énergie mondiale aura augmenté de 60 %. Ce n'est pas acceptable

Ce n'est pas acceptable d'abord en raison de l'épuisement des ressources en énergie fossile, quoiqu'on découvre constamment de nouveaux gisements.

Plus gravement, ce n'est pas acceptable en raison de la dépendance des consommateurs à l'égard d'un petit nombre de sites de production, essentiellement concentrés en Russie et au Moyen-Orient.

Beaucoup plus gravement encore, ce n'est pas acceptable en raison des effets sur le climat. Dans cette hypothèse, en 2030, l'émission de dioxyde de carbone augmenterait de 65 %.

Enfin, tout aussi grave est le fait que ne diminuera pas la part de la population mondiale qui a accès aujourd'hui à un moyen moderne d'énergie, soit 20 % de cette population, c'est-à-dire aujourd'hui 1, 6 milliard de personnes.

Le problème est à la fois moral, économique, social et politique.

Si je me suis permis de faire ces rappels, c'est que, me semble-t-il, nos concitoyens n'ont pas encore suffisamment conscience de l'avenir qui se prépare dans ces domaines.

Que faire ? A mon sens, il faut agir dans trois directions.

D'une part, il faut rechercher l'efficacité énergique aussi bien dans les habitations que dans les transports. La tuile solaire, pour laquelle des recherches sont menées, ou la voiture électrique, dont je sais qu'un opérateur français produira quatre prototypes avant la fin de l'année, constituent des exemples. Il y a dans ce domaine, j'en suis persuadé, beaucoup de gisements d'économies. Il faut poursuivre la recherche, aussi bien dans l'amélioration de l'isolation que dans la capture et la séquestration du dioxyde de carbone, ainsi que vous l'avez indiqué dans votre propos liminaire, monsieur le ministre.

D'autre part, il faut poursuivre le développement de réacteurs thermonucléaires expérimentaux et la recherche sur le traitement des déchets, tout en sachant qu'on ne pourra pas tout régler par le nucléaire, car l'approvisionnement de toute la planète en électricité à partir de cette seule source supposerait l'existence de trois mille centrales !

Enfin, les énergies renouvelables peuvent résoudre une partie du problème énergétique. Pour atteindre le taux de 21 % de la consommation d'électricité produite à partir de sources renouvelables, il faut faire feu de tous bois, c'est le cas de le dire !

Dans cette optique, je voudrais mettre en garde notre assemblée contre le dispositif adopté par l'Assemblée nationale sur les éoliennes, même si j'ai bien conscience que c'est une toute petite partie de la solution globale.

Comme tous, je suis attaché à la protection des paysages et je crois en même temps à la nécessité de développer la filière de l'énergie éolienne. Il s'agit de concilier ces deux impératifs.

Concernant l'article 10 ter qui a été ajouté par l'Assemblée nationale, je relève un paradoxe : le seuil initial de 12 mégawatts est relevé à 20 mégawatts pour éviter le mitage du paysage, ce qui revient pour ainsi dire à doubler quasiment la taille de chaque parc. Doubler la taille des sites pour protéger les paysages est assez singulier.

Si l'on veut protéger les paysages, je ne vois pas en quoi l'insertion de parcs plus importants serait préférable à celle de petits parcs, d'autant que, nous le savons, les populations locales accepteront plus difficilement la création de parcs importants.

Aussi, je me réjouis de la position adoptée par la commission des affaires économiques du Sénat, qui propose d'introduire un délai maximum de six mois pour la définition des zones de développement de l'éolien par le préfet de département.

En outre, les avis des communes limitrophes et celui de la commission départementale des sites, perspectives et paysages seront réputés favorables faute de réponse dans un délai de trois mois suivant la transmission de la demande par le préfet. Ainsi, les délais pour la réalisation des parcs ne seront pas allongés indéfiniment.

Enfin, l'abandon du seuil de 20 mégawatts et l'attribution aux pouvoirs locaux de la responsabilité de définir les conditions d'installation des éoliennes ainsi que le seuil de puissance me paraissent être une solution de bon sens. A l'heure de la décentralisation, les acteurs locaux pourront choisir de réaliser des projets importants de fermes éoliennes ou des petits parcs.

Ainsi que vous l'avez dit, monsieur le ministre, ce projet de loi vise notamment à nous protéger des variations aléatoires du prix de l'énergie fossile. J'espère vivement que, pour atteindre cet objectif, vous suivrez les propositions de la commission des affaires économiques, particulièrement en ce qui concerne les éoliennes.

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