Monsieur le président, madame la ministre, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce soir, j'attirerai plus spécialement votre attention sur trois points : la situation en Côte d'Ivoire, les retraites africaines acquises par nos compatriotes et l'évolution du fonds d'assistance du ministère des affaires étrangères.
S'agissant de la Côte d'Ivoire, ma collègue Paulette Brisepierre et moi-même avons évoqué ce dossier brûlant lors de la séance des questions d'actualité du 17 novembre dernier, Pour ma part, j'ai abordé plus spécifiquement les problèmes concrets qui se posent aux Français : sécurité physique et sécurité des biens pour ceux qui sont demeurés sur place ; reprise de l'activité pour les entreprises françaises après les pillages et les désordres.
S'agissant de la sécurité, si un calme précaire semble revenu, la reprise de l'activité économique est le sujet dominant qui préoccupe au plus haut point non seulement nos compatriotes, mais également, ce qui est paradoxal, les autorités ivoiriennes.
Quelle est la position de la France en la matière ? La réponse à cette question est déterminante pour le maintien de nos compatriotes restés sur place et le retour de ceux qui ont regagné la France; le tout étant, bien entendu, subordonné aux assurances qui leur seront données quant à leur sécurité physique et celle de leurs biens.
L'accueil de ceux qui ont préféré rentrer en France a été très bien organisé et j'ai eu l'occasion, le 17 novembre, d'en féliciter le Gouvernement, votre ministère, monsieur le ministre, ainsi que tous ceux qui y ont participé. Mais on ne peut qu'être soucieux quant à leur avenir : quelles sont leurs possibilités de se loger et de travailler ? Il est nécessaire qu'en attendant de retrouver un emploi, ils puissent bénéficier des indemnités de chômage et que les partenaires sociaux, comme ce fut le cas pour le « précédent réussi » de 1991, à l'occasion de l'évacuation des Français du Koweït, ouvrent l'accès à ces indemnités à tous les salariés français rentrés de Côte d'Ivoire.
Je ne vous cache pas, monsieur le ministre, que je nourris quelques inquiétudes sur ce point. En 1991, votre prédécesseur, M. Roland Dumas, avait pris ce dossier en main et il avait obtenu que tous les Français du Koweït perçoivent les indemnités de chômage. Votre tâche est plus lourde puisque, d'une part, le nombre de personnes concernées est plus élevé et, d'autre part, le déficit de l'UNEDIC a été évalué à 8 milliards d'euros.. Il n'en reste pas moins que c'est une question essentielle pour nos compatriotes rentrés de Côte d'Ivoire : je vous demande donc de vous en saisir.
Un point s'avère positif : les instructions données par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie pour autoriser le change des billets émis en francs CFA auprès des trésoreries générales départementales.
Le président Jacques Pelletier et moi-même avons eu l'honneur d'être reçus ce matin, dans le cadre du groupe d'amitié France-Gabon du Sénat, par le président Omar Bongo et de nous entretenir avec lui de la situation en Côte d'Ivoire. Le président Omar Bongo, qui est l'un des plus anciens chefs d'Etat de l'Afrique, est intervenu sur ce sujet brûlant en s'efforçant d'être un intermédiaire positif.
Au cours de cet échange, nous avons pu mesurer, mes chers collègues, combien ce dossier est complexe : si l'intervention du président sud-africain, que vous avez suivie, j'imagine, avec beaucoup d'intérêt, monsieur le ministre, est importante, nous ne sommes pas convaincus qu'elle soit de nature à régler l'ensemble des problèmes. Le président Pelletier vous donnera son sentiment à cet égard, mais, pour ma part, je suis assez réservé.
Le deuxième point de mon intervention ne nous éloignera pas de l'Afrique : il s'agit des retraites acquises par nos compatriotes auprès des pays d'Afrique noire francophone, mais qui ne leur sont pas payées. C'est là un sujet sensible qui donne lieu, depuis des années, à des protestations, et qui provoque, chez les intéressés, un réel sentiment d'injustice, bien légitime au demeurant.
J'ai donc apprécié, monsieur le ministre, la note que votre directeur de cabinet, M. Pierre Vimont, a adressée à ses collègues du ministère de l'économie et des finances et du ministère de la santé et de la protection sociale.
Pour ma part, le jeudi 30 septembre dernier, lors de la venue de Nicolas Sarkozy, alors ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, devant l'Assemblée des Français de l'étranger, j'ai développé cette question et demandé la création d'un groupe de travail : une première réunion a eu lieu le 24 novembre, à Bercy, en présence de M. Sarkozy.
Une lettre de votre directeur de cabinet, M Vimont, datée du même jour - nous l'avons reçue un peu tardivement -a tenté de fixer l'établissement d'un lien de conditionnalité entre le paiement des retraites de nos compatriotes et les concours financiers de la France aux pays concernés.
Il semble donc, et je m'en réjouis particulièrement, que la France soit décidée à assurer concrètement le paiement des retraites de nos compatriotes qui ont cotisé auprès des caisses africaines, dont certaines, comme celle du Congo-Brazzaville, sont totalement défaillantes.
Si l'on sait que les retraites des Africains ayant travaillé en France sont strictement et régulièrement payées par notre pays, si l'on ajoute que les retraites africaines versées aux nationaux sont, pour une grande part, financées grâce aux cotisations versées par les sociétés d'origine française travaillant sur place, monsieur le ministre, on se dit que trop, c'est trop ! La France ne peut plus accepter cette spoliation indigne de ses ressortissants.
Je vous remercie, monsieur le ministre, ainsi que votre directeur de cabinet, de vos prises de position, mais il reste à concrétiser ces déclarations d'intention : quelles mesures concrètes entendez-vous prendre pour régler ce dossier ?
Pour conclure, j'examinerai le chapitre budgétaire 46-94 consacré à l'assistance aux Français à l'étranger. Depuis quelques années déjà, il subit les effets de la rigueur et de la maîtrise des dépenses. Si le total des crédits de ce chapitre est en augmentation de 145 135 euros, s'établissant à 24, 2 millions d'euros, c'est parce que la ligne budgétaire consacrée à la sécurité des Français de l'étranger bénéficie d'une hausse de près de 195 000 euros. Bien entendu, je ne peux que m'en féliciter !
J'ai évoqué, précédemment, la crise ivoirienne et les graves préjudices physiques, moraux et économiques subis par nos compatriotes. Malheureusement, ces crédits sont les seuls à connaître une hausse substantielle, tous les autres étant reconduits à l'identique par rapport au budget 2004.
Ainsi, s'agissant du fonds d'assistance de votre ministère, monsieur le ministre, lequel permet d'attribuer des allocations de solidarité aux personnes âgées et aux handicapés français vivant à l'étranger, je constate que les crédits stagnent : ils demeurent fixés à un peu plus de 17, 8 millions d'euros, comme en 2004 et en 2003. Je ne critique nullement la manière dont la Direction des Français à l'étranger et des étrangers en France gère ce budget : elle le fait avec beaucoup de rigueur et beaucoup de clairvoyance. Mais je constate qu'elle gère un budget inchangé depuis deux ans.
Il me paraîtrait souhaitable, monsieur le ministre, que les Français de l'étranger ne soient pas tenus à l'écart de cet effort de solidarité nationale que l'on s'efforce d'accomplir en métropole et que M. Borloo développe, à l'instigation du Président de la République.
Les crédits diminuant, nous assistons à une application extrêmement stricte de leurs modalités de répartition. Je vois mal comment il pourrait en être autrement si M. Barry Martin-Delonchamps, directeur des Français de l'étranger et des étrangers en France, veut boucler son budget. D'ailleurs, lorsqu'il nous réunit en commission pour travailler sur l'attribution de ces crédits, nous sommes conscients qu'il ne peut répartir que les sommes dont il dispose, et cela pose problème.
Au-delà des aides consulaires, je crains que la stagnation des crédits n'entraîne à terme, monsieur le ministre, une diminution des subventions aux sociétés françaises de bienfaisance, même si vos services nous ont indiqué vouloir poursuivre l'action significative qui a été menée en 2004. Ces sociétés de bienfaisance, qui ont parfois été critiquées, jouent un rôle essentiel dans les communautés françaises de l'étranger : quand nos consulats ne peuvent plus aider tel ou tel de nos compatriotes, ils font appel à la société de bienfaisance pour apporter une aide momentanée.
Si un effort de solidarité est entrepris en France métropolitaine, s'il existe une couverture maladie universelle et un RMI, les Français de l'étranger ne disposent, quant à eux, que des aides que je viens d évoquer. Les crédits d'assistance de votre ministère n'augmentent pas suffisamment, monsieur le ministre. Il est donc indispensable que vous vous oeuvriez afin qu'ils progressent dans le prochain budget.