Intervention de Denis Badré

Réunion du 30 novembre 2005 à 10h30
Loi de finances pour 2006 — Participation de la france au budget des communautés européennes : article 50

Photo de Denis BadréDenis Badré, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la LOLF, la loi organique relative aux lois de finances, consacre le principe du prélèvement sur ressources opéré par l'article 50 du projet de loi de finances pour 2006. La LOLF est donc présente dans ce projet de loi de finances, mais de manière très ponctuelle.

Tout d'abord, je tiens à redire combien je regrette l'absence d'un programme conforme au format LOLF qui pourrait s'intituler, par exemple, « Concours de la France à la construction européenne », ce qui aurait permis de disposer d'une utile et intéressante clef de lecture de notre budget, ainsi que d'une mise en synergie de nos moyens sur un objectif évidemment prioritaire. Un tel programme aurait également témoigné de notre volonté politique de continuer à porter notre responsabilité de pays fondateur de l'Union européenne.

A contrario, l'apparition très anecdotique du mot « Europe » dans la liste des missions et des programmes de la LOLF pourrait être interprétée comme une marque de désintérêt de notre pays pour l'Europe. J'espère que tel ne sera pas le cas.

Consacrons-nous donc à l'examen de l'article 50 du projet de loi de finances pour 2006 et au prélèvement de 17, 995 milliards d'euros, soit près de 18 milliards d'euros ! Ce montant correspond à un tiers seulement du déficit - cette proportion s'explique par l'importance de ce dernier - et à près de 7 %, tout de même, de nos recettes fiscales, ce qui justifie la tenue d'un vrai débat.

Un tel prélèvement vient nourrir un budget de l'ordre de 120 milliards d'euros, soit six fois la participation de la France. Le budget européen est tout de même inférieur à nos seules recettes de TVA et ne représente qu'un tiers de notre budget.

Il faut donc le dire et le répéter, le budget européen reste modeste. Néanmoins, il progresse relativement vite, en tout cas plus vite que ce que les budgets des États peuvent se permettre, compte tenu, notamment, de leur appartenance à l'Union européenne. La hausse de 6 % des crédits de paiement et de 4 % des autorisations d'engagement a entraîné, par rapport aux 16, 57 milliards d'euros inscrits dans le projet de loi de finances initial pour 2005, une augmentation du prélèvement opéré sur les recettes de l'État de 8 %, soit 1, 4 milliard d'euros, ce qui représente 3 % du déficit prévu pour 2006 ou, dans le même ordre de grandeur, le coût du passage de la TVA à 5, 5 % dans la restauration.

Ces réalités doivent être présentes à l'esprit, afin d'examiner sereinement la situation.

Cependant, le prélèvement qui a été exécuté en 2005 n'est supérieur que de 770 millions d'euros à celui qui a été voté pour cette même année. L'existence d'une telle variation peut s'expliquer par de multiples raisons, qui sont détaillées dans le tome II du rapport fait au nom de la commission des finances.

À titre indicatif, je rappelle que cette variation provient du fait que le budget voté a été supérieur à l'avant-projet de budget sur lequel nous avions délibéré au mois de novembre 2004. Par ailleurs, notre vote a été corrigé à la hausse dès le mois de janvier. En outre, les sous-exécutions des budgets se sont un peu ralenties ; les reports ont donc été d'autant plus faibles. Il a alors fallu corriger cette insuffisance en accroissant les prélèvements sur les États membres. Enfin, le « chèque britannique » a été augmenté en cours d'année : il a donc fallu remettre la main au porte-monnaie !

Une augmentation du prélèvement de cette importance est tout de même lourde à supporter, surtout lorsque l'objectif fixé était de reconduire en volume le budget consacré aux Communautés européennes !

Laissant de côté les chiffres, je m'intéresserai maintenant au fond, à savoir le contexte européen et la réalité dans laquelle s'inscrivent les débats actuels.

Le budget européen est désormais abondé à 90 % par des contributions des États membres, ce qui entraîne bien des conséquences fâcheuses.

En effet, chaque pays cherche forcément à savoir s'il en a pour son argent. Les intérêts nationaux particuliers étouffent alors l'intérêt commun, et l'Union se défait.

Face à cette situation, l'Union européenne est perçue comme un niveau administratif supplémentaire et son image budgétivore et technocratique s'ancre dans la conscience des Européens.

Par ailleurs, l'application du principe du consentement à l'impôt est bien difficile lorsque les parlements nationaux votent les recettes et le Parlement européen les dépenses ! On peut alors avoir l'impression que le citoyen est soigneusement tenu à l'écart, ce qui n'est manifestement pas souhaitable.

Un immense effort de pédagogie doit donc être déployé, vers les États et vers les citoyens, pour rappeler que tous bénéficient de nombreux retours non comptabilisés. Je suis de nouveau en train de pourfendre les fameux « retours nets » !

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