Si le président du Conseil européen n'avait pas exercé dans le même temps des responsabilités à la tête de son pays, cela aurait sans doute facilité les choses. Sans doute s'agit-il là d'un aspect mineur au regard du présent projet de loi de finances, mais il reste que la procédure budgétaire en aurait été modifiée.
Aussi, quand je constate qu'il est prévu de diminuer, voire de supprimer, les crédits destinés aux politiques régionales dans la plupart de nos régions, je dis qu'il faut faire attention, car ce sont les crédits européens qui ont permis, au-delà des investissements qu'ils ont pu engendrer - reportons-nous, pour nous en convaincre, à l'objectif 2 - d'impulser un lien nouveau, même si ce dernier s'est révélé insuffisant, entre l'Europe et les populations.
On ne parle de l'Europe que quand cela ne va pas. Quand cela va, il faut le dire. C'est le cas pour un certain nombre de politiques régionales. Je puis d'ailleurs moi-même en parler en connaissance de cause, puisque, en tant qu'élu de Lozère, j'ai pu participer à la mise en place de ces nouvelles politiques régionales grâce au programme de développement intégré, je pense au mezzogiorno, à l'Irlande et à la Lozère. C'est pourquoi je suis très inquiet face à une amputation éventuelle des crédits destinés aux politiques régionales.
J'ajoute, madame la ministre, qu'un projet émanant de la Commission européenne relatif à la réforme des aides d'État à finalité régionale nous a inquiétés. La délégation du Sénat pour l'Union européenne m'a d'ailleurs chargé de rédiger un rapport à ce sujet et nous avons mis l'accent les uns et les autres sur les risques non seulement d'une diminution, voire d'une suppression, des crédits concernés, car cela nous interdirait d'aider des implantations industrielles au nom du respect de la concurrence tel qu'il figure dans ce projet de directive.
Certes, la situation évolue quelque peu, mais nous comptons sur vous, madame la ministre, pour ne pas laisser se développer une sorte de blocage, voire une incapacité d'agir des régions, des départements et des communes qui sont confrontés à des situations difficiles dans certains bassins d'emplois. Il est légitime qu'ils puissent encourager l'investissement au sein de leurs entreprises. Nous nous interrogeons donc sur l'évolution de ces politiques régionales.
Enfin, ma troisième observation concerne la politique de voisinage.
À cet égard, je me réjouis de la proposition faite par M. le Président de la République lors du sommet euroméditerranéen de Barcelone consistant à consacrer deux tiers des crédits de la politique de voisinage à l'Euroméditerranée. Certes, le sommet de Barcelone fut un moment difficile, mais il a constitué un enjeu majeur et je crois, pour ma part, que l'avenir de l'Europe est conditionné par la volonté de parvenir à un équilibre entre le Nord et le Sud.
L'avenir de l'Europe dépend de notre capacité d'apporter des espérances nouvelles dans certains pays du bassin méditerranéen qui, sans faire partie de l'Europe, attendent cependant de celle-ci de véritables partenariats. Je pense, notamment à l'ensemble des pays du sud de la Méditerranée envers lesquels nous avons une grande responsabilité. Il est essentiel que nous affirmions notre détermination et fassions un effort particulier en faveur de ces pays dont la jeunesse attend des gestes forts de manière à être rassurée sur son avenir dans son propre pays, ce qui passe par une réponse à la fois sociale et culturelle.
Quant aux problèmes posés par l'immigration, osons aller plus loin et examinons de quelle façon l'Europe peut, grâce à cette politique de voisinage, mettre en place un vrai espace euroméditerranéen dans lequel, nous l'espérons, un processus de paix pourra enfin se développer.
Après ces trois observations à caractère limité, je voudrais dire pour terminer, madame la ministre, que la France est affaiblie par le résultat du dernier référendum. Même si je respecte les positions des uns et des autres, cela est patent. Pour avoir eu le privilège et l'honneur de présider les travaux du Comité des régions de l'Union européenne, je puis vous dire, mes chers collègues, que le « non » au référendum sur la ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe a été un coup dur !
Madame la ministre, vous avez la capacité, le tonus et la conviction de faire en sorte que la France ait l'ambition de porter le message de ses valeurs de démocratie et d'humanisme en direction d'une Europe forte tout en assurant l'équilibre indispensable entre les grandes parties du monde.
C'est la raison pour laquelle nous comptons sur vous, madame la ministre et, pour ce faire, nous suivrons la proposition de M. le rapporteur spécial.
Toutefois, l'essentiel est d'affirmer notre détermination et notre volonté politique pour que l'Europe reparte de l'avant.