Oui, c'est vrai. Et ce nouveau débat nous permet de regarder les réalités terrestres, celles du passé comme celles du présent.
En nous présentant le projet de loi de finances, monsieur le ministre, vous avez mis en avant la volonté du Gouvernement de « poursuivre l'effort de redressement des comptes publics ».
La réalité n'est pas conforme au discours ! Le projet de budget traduit une nouvelle aggravation de l'état des finances publiques, une poursuite des déficits budgétaires et confirme la spirale dans laquelle l'endettement de notre pays se trouve désormais enfermé.
Contrairement aux annonces du Gouvernement, ce projet de budget traduit d'abord un coup d'arrêt donné à la réduction du déficit budgétaire en valeur absolue.
Le déficit budgétaire va croître l'an prochain, pour atteindre 46, 8 milliards d'euros à la fin de 2006, soit 1, 6 milliard d'euros de plus que le déficit affiché dans la loi de finances initiale pour 2005, 3 milliards d'euros de plus que le déficit d'exécution de 2004 et plus de 15 milliards d'euros de plus que le déficit enregistré en 2002.
Au-delà de la persistance d'un déficit primaire, celui-ci servira à financer des dépenses de fonctionnement, à hauteur d'une quinzaine de milliards d'euros, l'an prochain.
Vous annoncez une croissance des dépenses de l'État de 1, 8 % l'an prochain. Cette progression est en vérité plus proche de 2, 8 %, si l'on y ajoute les allégements de charges et la progression des prélèvements sur recettes au profit de l'Union européenne et des collectivités locales, sans même parler des dépenses d'investissement transférées à l'AFITF.
Quant aux prélèvements obligatoires, que le Gouvernement s'était engagé à réduire, ils seront passés quasi mécaniquement de 43, 4 % du PIB en 2004 à 43, 9 % en 2005, et ils atteindront 44 % l'an prochain.
S'agissant de l'engagement de respecter le plafond des 3 % de déficits publics à la fin de 2006, la Commission européenne comme les économistes de l'OCDE viennent tour à tour d'afficher leur plus profond scepticisme, la plupart de ces observateurs estimant à 3, 6 %, voire à 3, 8 %, le niveau qui sera atteint à cette date par nos déficits.
Il est d'autant moins exact d'affirmer que les déficits publics seront limités à 3 % du PIB en 2006 que ce chiffre intègre un déficit des comptes sociaux estimé à 0, 2 point de PIB, c'est-à-dire 4 milliards d'euros environ, alors que la commission des comptes de la sécurité sociale annonce une impasse, toutes branches confondues, de quelque 14 milliards d'euros, soit 0, 7 point.
En vérité, le déficit public sera d'environ 3, 6 % du PIB, si ce n'est 3, 7 %, et il est infiniment peu probable qu'il soit de 2, 9 % en 2006, la réforme de l'assurance maladie n'ayant pu enrayer le dérapage des dépenses. En outre, les annulations de crédits portent, pour moitié, sur les maigres investissements publics encore épargnés.
Début 2006, la Commission européenne ne pourra donc que constater le déficit excessif des comptes publics de la France et engager à notre encontre la procédure prévue par les textes, et il en sera de même en 2007. Et les changements politiques qui sont intervenus en Allemagne comme la perte d'influence de la France au sein des instances de la Commission nous laissent à penser que nous ne bénéficierons pas de la même bienveillance que naguère.
La dette des administrations publiques continuera l'an prochain à poursuivre sa croissance vertigineuse pour représenter 1 162 milliards d'euros, soit 45 milliards d'euros de plus qu'à la fin de 2005. L'endettement public atteindra ainsi 66 % du PIB à la fin de 2006, après 64, 7 % en 2004 et 65, 8 % en 2005.
Le service de la dette, au sens des seuls intérêts à payer - pudiquement baptisés « engagements financiers de l'État » -, atteindra 40, 9 milliards d'euros l'année prochaine, et encore ce chiffre ne comporte-t-il pas l'amortissement de la dette, c'est-à-dire le remboursement du capital, qui ne figure pas au budget et qui atteindra 80 milliards d'euros l'an prochain.
Au total, l'État devra donc emprunter près de 130 milliards d'euros en 2006, ...