Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, au nom de toute l'équipe du Quai d'Orsay, avec Claudie Haigneré, Xavier Darcos et Renaud Muselier, je souhaite tout d'abord féliciter Mmes et MM. les rapporteurs, ainsi que leurs collaborateurs, de la qualité de leurs analyses et de leurs contributions.
Pour avoir eu la chance de siéger parmi vous, Xavier Darcos et moi-même gardons du Sénat un souvenir précis, celui d'une assemblée qui va toujours au fond des choses. Vos interventions sur ce budget le démontrent une fois encore.
Je souhaite également souligner le large consensus qui s'exprime autour de la politique étrangère de notre pays, autour des objectifs et des moyens dont notre diplomatie a besoin. Si nous sommes capables de nous retrouver sur l'essentiel, c'est parce que nous sommes attachés à une parole et à une action de la France dans le monde qui soient fortes, crédibles, respectées et solidaires.
Avant de répondre le plus précisément possible à vos questions, auxquelles j'apporterai également certains compléments par écrit, je souhaite présenter le contexte dans lequel s'inscrit ce budget.
Notre action extérieure se développe selon trois axes : la gestion des crises, la maîtrise de la mondialisation et l'adaptation de notre outil diplomatique.
Monsieur Fournier, comme vous l'avez indiqué, les crises se multiplient et sont autant de défis majeurs pour la stabilité du monde et pour la paix : l'Iraq, la Côte d'Ivoire, le Darfour, les Grands Lacs, les Balkans, le Caucase, Haïti. Vous le voyez, il y en a encore plus que vous n'en avez cité vous-même !
Les crises se multiplient et, en outre, se diversifient : les catastrophes naturelles, les accidents de transport aérien, les épidémies, les guerres, le terrorisme, la sécheresse, les criquets, la famine... Quand ce n'est pas, d'ailleurs, un peu tout à la fois, pour certains continents ou certains pays martyrs !
Dans l'action que nous menons face à ces crises, nous restons attachés à des principes d'action : le respect de la règle de droit, la souveraineté des peuples, la volonté de dialogue et d'écoute, la primauté de la démocratie et des élections, le souci de la justice et de la solidarité. Pour nous-mêmes, le principe est celui d'une capacité permanente de mobilisation.
A cette fin, nous avons en effet besoin de moyens : des diplomates bien formés ; des contributions suffisantes au maintien de la paix ; des crédits pour l'aide au développement et l'action humanitaire d'urgence ; des moyens pour nos communautés expatriées et pour nos postes, afin de garantir leur sécurité et l'enseignement français à l'étranger, sur lequel ont insisté André Ferrand et Michel Guerry.
Il nous faut, ensuite, nous atteler à la maîtrise de la globalisation.
Les enjeux sont nombreux, à l'image de la lutte contre la pauvreté et pour le développement durable. Parce qu'il s'agit, pour moi, d'une conviction de longue date, j'ai fait du développement durable la première priorité de l'action extérieure de la France, dans la foulée de l'intervention du chef de l'Etat à Johannesburg.
Il nous faut aussi travailler sur la recherche d'un modèle économique et social équilibré, sur la construction européenne, dont nous parlerons souvent en 2005, et sur la diversité culturelle et la francophonie. N'ayez crainte, madame Tasca, nous ne considérons pas ces sujets comme des objectifs de second ordre.
Naturellement, il faut également aboutir à la maîtrise raisonnée des flux migratoires.
Tout cela exige une présence, des moyens d'action, des contributions aux organisations internationales, le soutien à la francophonie, la rénovation de notre réseau diplomatique, le traitement digne et efficace de la demande d'asile, la modernisation de notre administration consulaire.
Le troisième axe que nous devons envisager est la conséquence des deux premiers : face aux crises et aux grandes problématiques du monde, nous devons en effet parvenir à l'amélioration de nos méthodes de travail.
C'est le message que j'ai transmis à nos ambassadeurs à la fin du mois d'août : il faut développer notre influence à travers le monde, sans arrogance. Comme je l'ai dit à cette occasion : « La France n'est pas grande quand elle est arrogante. La France n'est pas forte si elle est solitaire. » Cela ne doit pas pour autant nous conduire à l'auto-dénigrement ou à l'auto-flagellation que certains pratiquent parfois.
Notre pays a de vrais atouts. Il défend des principes et des valeurs entendues partout dans le monde et qui reçoivent un écho puissant, je l'ai constaté à New York lors de l'Assemblée générale des Nations unies. En outre, en marge de cette réunion, le Président de la République, avec le Premier ministre espagnol et le président brésilien Lula, a proposé des mesures innovantes pour le financement de la lutte contre la pauvreté et pour le développement, lesquelles ont été approuvées par 110 pays.
Il nous appartient ainsi, aujourd'hui, d'être en mouvement, de promouvoir nos idées et d'agir avec conviction et lucidité, de vivre avec notre temps, qui est celui de l'Europe, mais aussi celui de la mondialisation, et qui doit néanmoins rester celui de la France.
Mesdames, messieurs les sénateurs, avec ce projet de budget pour 2005, nous nous sommes efforcés d'avancer sérieusement et concrètement dans ces directions.
Vos rapporteurs se sont particulièrement intéressés, cette année, à l'organisation et au fonctionnement de notre ministère, ainsi qu'à sa capacité d'adaptation.
Méfions-nous, en effet, des images convenues, alors même qu'il s'agit de l'un des ministères les plus sérieusement engagés dans la réforme de l'Etat. Vos rapporteurs, après le comité interministériel d'audit des programmes de la LOLF et la direction de la réforme budgétaire, ont bien voulu le relever. Je les en remercie.
Oui, la réforme est aujourd'hui au coeur de ce ministère.
Je l'évoquerai sous quatre angles : la maîtrise des dépenses publiques, la stratégie ministérielle de réforme, la LOLF et les relations avec nos opérateurs.
Adrien Gouteyron, rapporteur spécial, a insisté avec raison sur la maîtrise des dépenses, car, depuis 1999, nos crédits de fonctionnement progressent effectivement moins que nos crédits d'intervention.
Cela tient avant tout aux efforts consentis en matière d'emploi et de rémunération. L'évolution des taux de change, la réforme des indemnités de résidence, qui est intervenue en 2003, et surtout, je le reconnais, la baisse de nos effectifs, qui auront diminué de près de 10 % en dix ans, expliquent cette évolution.