Monsieur Charasse, je n'ai pas été insensible aux questions que vous avez posées sur le rôle de l'AFD, qui est à la fois banque et agence de développement. Il n'est pas impossible d'imaginer, si Michel Barnier le souhaite, que nous puissions, au cours des mois à venir, lorsque d'autres CICID se tiendront, soulever à nouveau cette question de la distinction entre la fonction banque et la fonction agence. Votre analyse est tout à fait recevable pour tout esprit raisonnable qui connaît ces questions.
J'ajouterai quelques mots sur le contrat d'objectif. Ce document, qui est encore en cours de discussion, devrait comporter des orientations stratégiques pour l'agence, associées à une mesure de la qualité et de l'impact des opérations et à des prévisions d'activité.
Dans un deuxième grand volet, ce contrat devrait contenir des descriptions des procédures sur les nouvelles relations entre le ministère et l'agence, comme l'obligation, pour celle-ci, de se conformer aux orientations sectorielles et géographiques, puisqu'il s'agit d'avoir autorité sur l'agence.
Ainsi, l'AFD ne sera plus une boîte noire et nous pourrons peut-être connaître son activité prévisionnelle.
Enfin, je rappellerai la cinquième orientation du CICID ; elle est importante pour les relations entre le Parlement et le Gouvernement puisqu'un document de politique transversale sera présenté annuellement en annexe à la future mission interministérielle sur l'aide au développement prévue par la loi organique relative aux lois de finances.
Ce document sera préparé en coordination avec mon ministère et il aura pour objet de clarifier l'aide au développement à la fois dans ses orientations stratégiques et dans ses chiffres. Il se substituera à l'actuel « jaune » budgétaire sur le même sujet.
Pour terminer, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais dire un mot sur les sources innovantes de financement.
Tout à l'heure, Jacques Pelletier a dit que nous soutenions la facilité financière internationale souhaitée par les Britanniques. Soyons plus nuancés : nous ne l'excluons pas, mais, tout emprunt d'aujourd'hui étant l'impôt de demain, nous pensons qu'il faut trouver d'autres sources de financement. M. Plancade avait raison de dire que l'on ne peut pas tenir un discours de générosité et, dans le même temps, ne pas se donner les moyens de la solidarité.
Les propositions du Président de la République concernant l'instauration de taxes internationales, à la suite du rapport de M. Landau, ont reçu un accueil très favorable lors d'une réunion qui s'est tenue à l'ONU, le 20 septembre. L'année qui vient sera décisive Il est en effet techniquement possible, économiquement rationnel et moralement juste de mettre en place de nouvelles taxations internationales qui puissent financer le développement.
A Mme Luc, qui s'interroge sur le calendrier de ces taxes, je répondrai que nous nous plaçons dans la perspective du sommet de l'ONU de septembre 2005, qui dressera un bilan des Objectifs du Millénaire pour le développement. Or, comme le souligne Mme Luc, on sait d'ores et déjà que ces objectifs ne seront pas atteints, en partie par défaut de financement. On parle de chiffres astronomiques : non plus 2 015 mais 2 145. La France compte s'appuyer sur ces analyses pour soutenir la dynamique qu'elle a lancée.
Mais la grande nouveauté - et c'était vraiment inattendu pour les spécialistes de longue date du développement que j'ai pu rencontrer à l'ONU ou à la Banque mondiale - c'est que ce sujet figure désormais à l'agenda international.
S'agissant du financement de l'éducation, voilà une quinzaine de jours, lors d'une réunion à Brasilia sur le financement de l'éducation pour tous, j'ai pu constater une véritable convergence entre l'action de la France et celle de la Banque mondiale sur le Fast Track.
Le président de la Banque mondiale, que j'ai rencontré au début du mois d'octobre, m'a d'ailleurs indiqué qu'il saluait l'action de la France dans ce domaine.
Il ne faut donc pas être trop pessimiste, même si de nombreuses questions demeurent et que beaucoup de chemin reste à parcourir. Grâce à la détermination du Président de la République, à celle du ministre des affaires étrangères, à celle de la France, le sujet de l'aide au développement sera examiné lors du prochain sommet du G8. De la même façon, la Banque mondiale nous fera des propositions au mois d'avril prochain, comme les institutions de Bretton Woods en général s'y sont engagées.
Philippe Madrelle m'a interrogé sur la coopération décentralisée. Bien entendu, elle ne se limite pas au chapitre 42-13, car les collectivités bénéficient de crédits inscrits à d'autres chapitres budgétaires.