Intervention de Roland Courteau

Réunion du 9 décembre 2006 à 15h00
Loi de finances pour 2007 — Développement et régulation économiques

Photo de Roland CourteauRoland Courteau, rapporteur pour avis :

Là est la question, monsieur le ministre !

Rappelons d'abord les faits.

Après avoir enregistré des excédents de manière récurrente depuis 1992, notre solde commercial a commencé à se dégrader, atteignant en 2005 un déficit de 26 milliards d'euros, le triple de l'an passé. Ce déficit commercial n'a pas été compensé par l'excédent de la balance des services, si bien que les échanges de biens et de services en prix constants sont devenus déficitaires en 2005 de 12 milliards d'euros, pour la première fois depuis 1991.

Or la contre-performance de la France en 2005 est intervenue dans un contexte d'appréciation du dollar et de croissance de la demande mondiale. Comment peut-on alors l'expliquer ?

Certes, la hausse des prix du pétrole, qui a alourdi notre facture énergétique de 10 milliards d'euros, compte pour moitié dans l'aggravation du déficit commercial. Mais la flambée des cours pétroliers n'a pas compromis la vigueur du commerce international. Pourtant, les exportations françaises n'ont pas tiré parti de cette croissance en 2005.

Alors que le déficit énergétique augmentait à partir de 2001 de manière comparable en Allemagne et en France, les balances commerciales respectives de nos deux pays connaissaient des évolutions divergentes : en Allemagne, les exportations progressaient plus vite que les importations, tandis qu'en France les exportations progressaient deux fois moins vite que les importations.

Pourquoi ? D'abord, en raison de l'orientation géographique de notre commerce extérieur vers la zone euro, où la croissance a été relativement peu dynamique par comparaison avec la croissance mondiale.

Ensuite, la spécialisation sectorielle de la France ne lui a pas permis de répondre autant que l'Allemagne à la demande mondiale, notre pays étant peu présent sur le secteur de moyenne technologie des biens d'équipement. Parallèlement, le consommateur français privilégiait les produits d'importation.

Enfin, même si l'euro s'est stabilisé en 2005, deux années d'appréciation de notre monnaie ont considérablement réduit la compétitivité des produits français.

Mais ces raisons macroéconomiques n'expliquent la contre-performance française que de manière très partielle. Ainsi, le Conseil d'analyse économique identifie d'autres facteurs explicatifs, d'ordre microéconomique : d'une part, nos exportateurs n'arrivent pas à tirer parti des évolutions des marchés extérieurs ; d'autre part, notre tissu industriel serait peu adapté aux conquêtes des marchés lointains. Nous manquons d'entreprises exportatrices, lesquelles se distinguent par leur plus grande taille et leur meilleure productivité.

À titre d'illustration, je veux dire quelques mots du marché du vin.

Au cours des dix dernières années, la part des vins français dans le marché mondial est passée de 70 % à 40 %. Ce recul tient à la montée en puissance des nouveaux pays exportateurs. Certes, le Gouvernement a annoncé un plan de 12 millions d'euros pour stimuler les ventes de vin à l'étranger. Mais ce soutien public est sans commune mesure avec celui qu'ont consenti divers pays concurrents.

Il est par ailleurs nécessaire de regrouper les nombreuses entreprises de ce secteur pour leur permettre de mettre en commun leurs moyens commerciaux et de proposer à l'exportation d'importants volumes.

Face à cette détérioration de notre solde commercial, le Gouvernement agit-il de manière appropriée ? Voilà une autre bonne question, monsieur le ministre !

Certes, il existe de nombreux instruments destinés à soutenir nos entreprises à l'export, mais leur multiplicité est source de complexité pour elles.

En outre, des plans de soutien aux exportations non seulement sectoriels mais aussi géographiques vers vingt-cinq pays cibles, ont été mis en place. Mais cela ne suffit pas à enrayer la dégradation de notre solde commercial. Il est donc temps de mieux orienter le soutien public à l'export vers le niveau microéconomique.

D'abord, il est nécessaire d'accroître la variété des produits français à l'export et leur positionnement haut de gamme. Cela exige de soutenir l'innovation et d'accroître le nombre des entreprises exportatrices, synonyme de variété accrue de nos offres sur les marchés étrangers.

Ensuite, et ce n'est pas sans lien, il faut accompagner les entreprises jusqu'à ce qu'elles atteignent un niveau de taille critique qui dynamise leur capacité exportatrice. La France ne sait pas faire grandir ses entreprises, qui manquent notamment de financements.

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