Intervention de Catherine Morin-Desailly

Réunion du 22 novembre 2006 à 15h00
Diffusion audiovisuelle et télévision du futur — Vote sur l'ensemble

Photo de Catherine Morin-DesaillyCatherine Morin-Desailly :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici donc parvenus au terme de l'examen de ce projet de loi. Comme nous l'avons répété tout au long des débats, c'est un texte charnière puisqu'il organise à la fois le basculement de la diffusion analogique vers la diffusion numérique et l'avènement de la télévision mobile personnelle. Sur ces deux points, il était en effet nécessaire de fixer un cadre clair, afin de permettre aux industriels de répondre aux nouveaux besoins : c'est désormais chose faite.

Nous avons pu améliorer le projet qui nous était soumis, et ce sur plusieurs points.

Tout d'abord, un certain nombre d'avancées ont été obtenues en faveur de nos territoires, à l'image de l'extension de la couverture hertzienne terrestre de la TNT, qui passe ainsi de 85 % à 95 % de la population. Conjuguée à une offre satellitaire gratuite pour les 5 % restants, elle est en mesure de garantir qu'aucune zone du territoire métropolitain ne sera exclue de la TNT, ce qui est primordial.

Ayant également adopté un amendement pour inciter le Gouvernement à permettre une mise en place de la TNT outre-mer dans les mêmes conditions qu'en métropole, nous sommes désormais assurés que l'ensemble de nos concitoyens recevront la télévision numérique terrestre dans des conditions optimales.

En outre, nous avons sécurisé l'accès des chaînes locales à la TNT et prévu que chaque Français, quel que soit son mode de réception de la télévision - hertzien, câble ou satellite - pourra regarder le programme régional de France 3 spécifique à sa région. Nous tenions à ces dispositions, qui sont de nature à favoriser, en régions, une information de proximité respectant le pluralisme.

Plusieurs mesures propres à mieux informer le consommateur viennent également d'être adoptées. Je n'y reviendrai donc pas.

Enfin, nous nous réjouissons d'avoir pu clarifier un autre point important, à savoir la procédure de distribution du dividende numérique, pour laquelle nous avons obtenu une réciprocité entre les éditeurs et les distributeurs sur la télévision mobile personnelle.

Pour toutes ces raisons, monsieur le ministre, nous ne pouvons pas, bien entendu, nous prononcer contre ce projet de loi. Je vous remercie d'ailleurs d'avoir été attentif à faire progresser ce texte majeur, qui nous semble malgré tout encore perfectible.

Ainsi, nous restons opposés à l'affectation d'une chaîne supplémentaire aux opérateurs historiques privés, et c'est là un point essentiel. En effet, cela renforce à nos yeux leur position dominante et affaiblit, de fait, aussi bien les nouveaux entrants que le service public, qui bénéficieront de ressources publicitaires réduites. Malgré les conditions fixées par la commission des affaires culturelles en termes de délais et d'obligations en matière de création, cette disposition nous inquiète en ce qu'elle menace l'équilibre du paysage télévisuel et son pluralisme. Cela reste, quoi qu'on en dise, le coeur du problème : comme l'a fait remarquer le président de notre groupe, Michel Mercier, la télévision du futur, c'est bien plus une question de contenus que de « tuyaux », c'est-à-dire de moyens de diffusion.

D'ailleurs, le faible intérêt porté aux contenus des programmes dans ce projet de loi est pour nous une autre source de déception. Si je me réjouis, bien sûr, des avancées qui ont été obtenues, notamment en ce qui concerne la définition de l'oeuvre audiovisuelle et la fixation d'obligations renforcées pour les chaînes bonus en matière de création, nous sommes encore bien loin du compte.

Nous avons déjà eu l'occasion de le souligner, ce texte ne fera l'objet que d'une seule lecture dans chaque chambre. Tout à l'heure, j'ai exprimé mon regret que nous n'ayons pu profiter de ce débat pour aborder d'emblée les modalités de renouvellement des sources et des modes de financement de la création audiovisuelle et cinématographique. Pour autant, j'ai bien enregistré que nous serions très prochainement amenés à remettre l'ouvrage sur le métier.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, voici ce qu'écrivait André Malraux, de la mort duquel nous célébrerons demain le trentième anniversaire : « Il existe une télévision pour passer le temps et une autre pour comprendre le temps ». Or, aujourd'hui, force est de reconnaître que, hormis certaines chaînes du service public, les programmes de télévision ne répondent pas toujours aux attentes des téléspectateurs et, en tout cas, ne les « tirent » pas toujours vers le haut.

Espérons donc vraiment que cette télévision du futur ne sera pas simplement une télévision faite pour passer le temps, mais qu'elle nous permettra de nous ouvrir aux autres et de comprendre beaucoup mieux la société dans laquelle nous vivons.

Ce projet de loi ne peut donc, à ce stade, emporter notre pleine et entière adhésion, ce que nous regrettons. Je le répète, il n'y aura pas de seconde lecture pour nous permettre de continuer à améliorer le texte. Aussi, nous serons bien entendu attentifs à ce qui se passera à l'Assemblée nationale et prendrons une part active à la commission mixte paritaire, à la mesure de celle que nous avons prise à ce débat, lequel a été très largement animé par M. le rapporteur et MM. les rapporteurs pour avis, dont nous tenons à saluer le travail.

En conclusion, vous l'aurez tous compris, le groupe de l'Union centriste-UDF a choisi de s'abstenir sur ce projet de loi.

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