Intervention de Claude Biwer

Réunion du 9 novembre 2005 à 10h00
Questions orales — Evolution de la taxe professionnelle

Photo de Claude BiwerClaude Biwer :

Monsieur le ministre, avec ma question, nous restons dans les problèmes liés à l'emploi, puisqu'elle a trait à la taxe professionnelle.

L'annonce d'un plafonnement « effectif » du montant de la taxe professionnelle à 3, 5 % de la valeur ajoutée des entreprises a suscité de vives réactions d'hostilité de la part de très nombreux élus locaux, même si cela permettra de limiter certains abus.

La manière dont cette mesure a été annoncée les a également choqués, puisque le Gouvernement a précisé qu'au-delà de ce plafond les hausses de taux seraient désormais neutralisées et « ne rapporteraient plus rien aux collectivités territoriales concernées ».

En premier lieu, cette disposition va à l'encontre du principe de constitutionnalité de la libre administration des collectivités territoriales, qui doivent pouvoir fixer elles-mêmes librement leurs taux d'imposition.

Dans la mesure où elle aura un caractère rétroactif, elle coûtera, dès son entrée en application, 469 millions d'euros aux collectivités territoriales et à leurs groupements.

Comme l'a souligné à juste titre le Comité des finances locales, elle pénalisera les EPCI - établissements publics de coopération intercommunale - à taxe professionnelle unique, qui verront leur marge de manoeuvre fiscale diminuer puisque, si la réforme touche en moyenne 50 % des bases de taxe professionnelle, dans certains cas particuliers, ce sont jusqu'à 90 % des bases qui seront ainsi plafonnées.

Elle entraînera de facto un transfert des charges des entreprises vers les ménages et encouragera la mise en place de la fiscalité mixte dans les EPCI, qui, elle, évoluera dans le temps.

Le Gouvernement a justifié cette réforme en arguant du fait qu'elle était imposée par la nécessité de conserver sur le territoire français son attractivité et celle d'alléger les charges pesant sur les entreprises et gênant l'emploi, ce qui est louable en soi.

Qu'il convienne d'alléger les charges des entreprises, nul n'en doute. Qu'il faille conserver sur notre territoire un maximum d'activités, chacun en convient. Mais toutes les études relatives aux délocalisations qui sont en notre possession démontrent que la fiscalité locale sera touchée, et la réforme annoncée ne supprimera pas les anomalies.

En réalité, cette disposition, qui a aussi pour but de réaliser des économies dans le budget de l'Etat sans toutefois créer de nouveaux prélèvements, s'appliquera au détriment, une fois de plus, des collectivités territoriales et de leurs groupements et, in fine, du contribuable local, puisque les collectivités en question devront compenser.

Il s'agit là d'une politique à courte vue. En effet, à quoi cela sert-il de réduire les prélèvements de l'Etat si, de façon concomitante, ceux des collectivités territoriales augmentent ? D'une part, le total des prélèvements obligatoires ne baisse pas et, d'autre part, que le contribuable soit local ou national, il s'agit toujours d'une seule et même personne, même si la répartition est quelque peu différente.

J'ose espérer que le Sénat, qui représente les collectivités territoriales, saura, le moment venu, faire entendre raison au Gouvernement sur ce point et qu'à défaut le Conseil constitutionnel, dans sa lucidité, constatera qu'au fil des ans le principe de libre administration des collectivités locales est de plus en plus battu en brèche.

J'aimerais, monsieur le ministre, être rassuré sur ce dossier qui n'apportera en l'état aucune avancée réelle dans le domaine de la fiscalité, mais créera des charges locales nouvelles, tout au moins si l'on apprécie l'intérêt des contribuables de façon globale.

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