Intervention de Denis Badré

Réunion du 9 novembre 2005 à 10h00
Questions orales — Implantation des officines pharmaceutiques

Photo de Denis BadréDenis Badré :

Monsieur le ministre, « les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie doivent permettre de répondre, de façon optimale, aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d'accueil de ces officines ». Je cite ici les propos tenus par Xavier Bertrand, le 20 juin dernier, dans Le quotidien du pharmacien.

Celui-ci précisait même qu'une règle unique nationale serait adaptée à des situations très diverses sur des terrains dissemblables ; il allait donc au bout de la déconcentration.

Or qu'en est-il de ces beaux principes, auxquels nous souscrivons évidemment tous, du point de vue de leur application ?

A cet égard, je citerai un cas concret qui me semble exemplaire à de nombreux titres. Ville-d'Avray possédait son propre contingent d'officines et il en manquait une à Sèvres. Une demande d'ouverture est déposée, mais celle-ci concerne un quartier de Sèvres enclavé dans Ville-d'Avray !

Du strict point de vue des critères, cette demande est recevable et elle nous permet d'aller vers l'optimum cher au le ministre.

En réalité, il est créé une officine de trop sur l'ensemble constitué par Ville-d'Avray et cette enclave de Sèvres, alors qu'il en manque toujours une à Sèvres, dans un quartier qui, lui, est très mal desservi, et cette situation durera sans doute un certain temps, le contingent attribué à Sèvres étant atteint. Ainsi, on casse ce qui fonctionnait à Ville-d'Avray et on s'interdit de régler le problème qui se pose à Sèvres !

Telle est l'analyse qui a conduit le préfet à rejeter cette demande. Après avoir consulté les deux maires de Sèvres et de Ville-d'Avray et enregistré leur commune et caractéristique opposition à l'ouverture de cette officine, après avoir également tenu compte de l'avis défavorable de l'Union des pharmaciens de la région parisienne et du conseil régional de l'Ordre, il a choisi de faire prévaloir la réalité du terrain sur l'application aveugle de normes et de critères.

Dès lors, quelle ne fut pas notre surprise - celle du préfet et des deux maires concernés - de voir s'ouvrir cette pharmacie, dont la mise en place avait été rejetée par le préfet.

Ni le préfet ni les deux maires n'avaient été informés du dépôt d'un recours contre cette décision préfectorale. A fortiori, ils n'avaient pas été consultés sur l'instruction de ce recours et ils n'étaient pas non plus au courant du fait que l'autorité ministérielle avait finalement accepté ce recours, ne tenant aucun compte, ce faisant, du refus opposé par le préfet.

Alors que je m'étonnais de cette situation auprès du ministère, il m'a été répondu qu'il me suffisait de consulter le Journal officiel. Je ne suis pas sûr qu'une telle insolence soit de mise envers le Parlement !

Si la loi repose sur « les critères et rien que les critères », elle doit être d'application automatique et il est donc inutile d'envisager la moindre déconcentration. Soulageons alors le préfet de son intervention et ne dérangeons ni les élus ni les professionnels ; leur consultation, si elle est de pure forme, est presque insultante. La suppression de cette consultation entraînera des économies de temps et de moyens. D'ailleurs, la LOLF nous incite avec énergie à aller dans cette voie.

Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à faire ces économies ? Malgré tout l'intérêt que présenteraient ces économies, j'espère que ce n'est pas le choix que vous allez faire.

Allez-vous afficher clairement le fait que ces procédures sont suivies de Paris, et de Paris seulement, grâce, notamment, à des ordinateurs, ce qui ne nécessite même pas de personnel à Paris ?

L'exemple que je viens de décrire montre que la déconcentration a ses mérites et que le terrain doit conserver ses droits.

Monsieur le ministre, êtes-vous prêt à proposer une modification de la loi, si c'est bien la loi qui interdit de procéder de cette manière ? A moins qu'une telle modification de la loi ne soit pas nécessaire et que l'on dispose, dès maintenant, des marges d'appréciation permettant de prendre en compte la réalité des situations.

Si la déconcentration est dorénavant la règle, si ces marges d'appréciation existent, pourquoi ne les utilisez-vous pas ? Pourquoi laissez-vous supposer que l'Etat est sourd et autoritaire ? Un tel Etat est soupçonné d'arrière-pensées, voire de motivations cachées, ce qui est toujours détestable !

Monsieur le ministre, je souhaiterais que vous me confirmiez que des marges d'appréciation existent et que vous avez toujours la volonté de les prendre en compte, afin que la démocratie et l'Etat restent transparents et proches du citoyen.

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