Intervention de Gisèle Gautier

Réunion du 12 juillet 2005 à 9h45
Égalité salariale entre les femmes et les hommes — Discussion d'un projet de loi

Photo de Gisèle GautierGisèle Gautier, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la raison fondamentale de notre débat d'aujourd'hui, qui intéresse pas moins de 12 millions de femmes en activité dans notre pays, peut se résumer à quelques chiffres.

En 1952, l'écart des salaires entre femmes et hommes était de 54 %. En 1995, soit quarante-trois ans plus tard, il avait diminué pour approcher 26 %; depuis lors, nous constatons que l'évolution s'est pratiquement arrêtée puisque le chiffre stagne et n'est malheureusement jamais descendu en dessous de 24 %.

Aussi, dès l'annonce de ce projet de loi, des interrogations se sont fait jour et la question s'est posée de savoir s'il était nécessaire d'élaborer un nouveau texte de loi sur le sujet. On a fait remarquer que le législateur était déjà intervenu à plusieurs reprises. Notre délégation était bien placée pour le confirmer puisqu'elle a été la première à effectuer, en 2002, un recensement exhaustif des normes relatives à l'égalité des rémunérations entre les femmes et les hommes.

Ces normes sont nombreuses : elles figurent dans le préambule de la Constitution, dans plusieurs conventions internationales, aux différents « étages » du droit européen, ainsi que dans notre code du travail.

Le cadre juridique français est donc très étoffé et conforme aux engagements internationaux et européens de la France. Pour autant, il n'est pas appliqué convenablement.

La délégation a ainsi mis en évidence que 72 % des entreprises interrogées n'ont jamais organisé la négociation spécifique et obligatoire prévue par le code du travail sur les objectifs en matière d'égalité professionnelle. Pire, il a été démontré que nombre d'entre elles méconnaissaient la loi de 2001 !

Il va de soi que les grandes entreprises employant plus de 1 000 salariés, dans la mesure où elles sont dotées de structures, de directeurs des ressources humaines, de représentants syndicaux, ont une approche différente du sujet par rapport aux petites et moyennes entreprises.

Les chiffres que je viens de citer résultent d'un sondage, commandé par notre délégation, en 2004, à un institut dont nous remercions la présidente d'être venue en personne commenter les résultats lors d'une de nos réunions. Il se trouve que cette femme chef d'entreprise a été tout récemment élue à la présidence du Medef, ce qui est un événement marquant. J'espère qu'elle pourra, à ce titre, - et je me ferai fort de le lui rappeler _ contribuer à résoudre un problème que le sondage avait parfaitement mis en lumière.

J'ajoute que, fondamentalement, c'est la culture d'entreprise qui reste perfectible et, à ce titre, je suis convaincue que notre économie a tout à gagner d'une progression des femmes dans les instances dirigeantes des entreprises publiques et privées. A cet égard, le texte adopté par l'Assemblée nationale a, comme l'a souligné précédemment Mme le rapporteur, perfectionné le dispositif initial consacré à la féminisation de la représentation des salariés et des conseils d'administration : notre délégation en approuve pleinement le principe.

Par ailleurs, nos collègues députés ont même adopté un seuil minimum de féminisation de 20 % des conseils d'administration : si certains jugent l'avancée un peu audacieuse du point de vue juridique, d'autres, au contraire, l'approuvent. Très concrètement, la délégation constate que la féminisation des exécutifs est bien souvent un gage d'amélioration de l'efficacité et de l'équité dans l'entreprise.

En examinant les faits, on constate que les écarts de rémunération ont cessé de se réduire depuis 1995 et que les négociations obligatoires sur ce thème sont très peu dynamiques. Dans ces conditions, fallait-il continuer à déplorer le phénomène, baisser les bras et constater simplement cette carence ? Non, car j'estime, résumant en cela le sentiment de la délégation, que la persévérance, la pugnacité et la volonté de remettre l'ouvrage sur le métier sont un facteur essentiel de succès, en particulier pour transformer les mentalités et certains préjugés qui évoluent malheureusement moins vite que la législation.

Ce texte, en fixant un objectif clair et un délai, tient compte du processus de labellisation et de négociation déjà engagé, comme vient de le rappeler Mme la ministre.

La méthode prônée par certains juristes consiste à multiplier les nouvelles normes, les procédures et les sanctions. Or, nous constatons toutes et tous que cette façon de procéder rencontre des limites au moment où, par exemple, notre code du travail comporte déjà plus de 3000 articles d'une terrible complexité. Quoique favorable, par principe, à la sanction de l'inobservation des règles, la délégation estime que, comme dans d'autres domaines de la parité, on peut s'interroger sur l'efficacité des pénalités financières immédiates et leur effet restreint sur les comportements. Bien évidemment, je fais ici allusion aux pénalités financières en matière de parité dans la vie politique, ...

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