Cet article prévoit le recours à des partenariats publics-privés, ou PPP, pour la réalisation d'infrastructures ferroviaires.
Cette évolution est censée permettre une « politique dynamique et modernisée des investissements ». Je souhaite faire quelques objections à cet égard.
Nous ne sommes pas opposés par principe à ce type de partenariat qui, dans certains secteurs, a fait ses preuves. Cela dit, la pratique qui risque de s'instaurer est très aléatoire.
En effet, de tels partenariats ne sont envisageables que pour les lignes rentables. Ainsi, la possibilité offerte par le Gouvernement sera sans doute de nature à dynamiser la construction d'infrastructures telles que la liaison entre Paris et Roissy-Charles-de-Gaulle, à la condition que l'on abandonne l'idée de doubler la ligne du RER, qui en aurait pourtant bien besoin, ou d'aménager certaines lignes de TGV.
Mais qu'en sera-t-il de la majorité des infrastructures de transport pour lesquelles le retour sur investissement est très long ? Peut-on imaginer que le transport combiné bénéficie de tels investissements ? J'en doute. Je ne connais pas votre position sur ce point, monsieur le ministre, et je serais ravi de l'entendre.
Notre désaccord avec le Gouvernement porte non pas sur le principe, mais sur le contenu de ces partenariats.
La création d'infrastructures de transport doit correspondre à l'intérêt général pour permettre à l'Etat de garantir un service public de transport de qualité.
En effet, l'Etat doit assumer ses missions d'aménagement du territoire et assurer l'égal accès de tous aux infrastructures de transport : j'espère que nous sommes tous d'accord sur ce point. C'est le principe constitutionnel de la continuité territoriale. Or, vous semblez parfois l'oublier !
Si l'article 13 est adopté, l'Etat pourra se désengager de ses missions de service public. Cette démarche est devenue une habitude du Gouvernement. Elle a été encore illustrée cet été avec la tentative du Gouvernement de transférer aux régions le financement des lignes que l'on appelle interrégionales, et plus récemment avec un décret pris le 14 octobre dernier qui rebaptise l'ancien comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire, le CIADT, en comité interministériel d'aménagement et de compétitivité des territoires. Ce simple changement de terminologie est très important d'un point de vue symbolique. Même les territoires sont, en quelque sorte, mis en concurrence !
L'article 13 ne permettra donc pas de répondre aux immenses besoins de rénovation et de modernisation du réseau ferroviaire.
Je rappelle que ces besoins ont été estimés, par l'audit sur les infrastructures de transports ferroviaires, à 600 millions d'euros par an sur vingt ans, avec un pic de 1 milliard d'euros d'investissement entre 2006 et 2011. C'est un véritable défi, et je ne vois que quels moyens vous vous donnez pour y répondre.
Par ailleurs, cette mesure porte en elle le risque tendanciel d'un début de privatisation des infrastructures de transport.
Actuellement, l'établissement public RFF est propriétaire de ces infrastructures. Mais qu'adviendra-t-il si une société privée décide d'investir dans la construction et l'entretien d'infrastructures ? Pourquoi n'en serait-elle pas propriétaire ? Ce sont ainsi des monopoles privés par axe qui se profilent.
Pourtant, les infrastructures ferroviaires font partie du patrimoine public et doivent rester sous maîtrise publique. Nous souhaitons par conséquent que la politique des transports soit scellée dans un projet pluriannuel de développement conclu par RFF, la SNCF et l'Etat, et fixant des objectifs et des moyens. Ce projet permettrait de gagner en lisibilité et responsabiliserait l'ensemble des acteurs afin de leur permettre de garantir une offre de transport répartie sur l'ensemble du territoire et répondant aux besoins de mobilité.
En effet, et j'insiste sur ce point, il est important que l'Etat puisse définir les investissements prioritaires à effectuer en termes d'infrastructures.
Nous souhaiterions également que l'Etat s'engage dans le désendettement de RFF et de la SNCF. C'est le choix qui a été fait en Allemagne et qui, selon M. le rapporteur, a donné des résultats que l'on peut considérer comme intéressants. Mais il faut prendre en compte l'ensemble de la logique.
La dette s'élève aujourd'hui à près de 40 milliards d'euros : 7, 3 milliards pour la SNCF et plus de 25 milliards pour RFF. Un désendettement par l'Etat dégagerait d'importantes capacités d'autofinancement et d'investissement.
J'ajoute par ailleurs que les frais financiers liés à la dette sont, chaque année, d'environ 380 millions d'euros pour la SNCF et de 1, 3 milliard pour RFF. Cette dette étouffe RFF et l'oblige à augmenter les péages. Cette logique est très contestable.
Dans la loi de finances de 2005, le désengagement de l'Etat était clairement visible à travers l'extinction de la dotation relative à la gestion de la dette de RFF et la suppression des crédits pour le service annexe d'amortissement.
Nous souhaitons donc que le Gouvernement s'engage concrètement dans le désendettement de Réseau ferré de France et de la SNCF, afin de permettre à ces entreprises publiques d'investir.