Intervention de Paul Girod

Réunion du 1er août 2007 à 15h00
Travail emploi et pouvoir d'achat — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Paul GirodPaul Girod, rapporteur :

Réservant pour l'instant mes commentaires sur l'article 6, je termine cette énumération en soulignant que la commission mixte paritaire a adopté, d'une part, les articles 8 et suivants portant sur le revenu de solidarité active dans les mêmes termes que le Sénat, sous réserve de rectifications rédactionnelles, d'autre part, l'article 14, relatif à la formation des femmes reprenant une activité professionnelle, qui a été introduit sur l'initiative de nos collègues femmes de l'UMP. À cette occasion, a été loué le dynamisme de M le haut-commissaire, à qui je suis heureux de transmettre ces félicitations.

Deux dispositions ont donné lieu à débat : l'article 6 et l'auto-liquidation de l'abattement fiscal.

L'article 6 institue une réduction de l'impôt de solidarité sur la fortune pour les investissements dans les petites et moyennes entreprises et les dons au profit d'organismes d'intérêt général.

Rappelons que ce régime permet aux redevables de l'ISF de bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 75 %, dans la limite de 50 000 euros, pour leurs investissements dans les PME ou pour leurs dons à des organismes d'intérêt général.

Certes, l'Assemblée nationale a emporté l'adhésion de la commission mixte paritaire sur deux points. Ainsi, a été supprimé le dispositif introduit par le Sénat visant les groupements fonciers agricoles, qu'elle a jugé superfétatoire. En outre, a été maintenu l'agrément pour les établissements d'enseignement supérieur susceptibles de recevoir des dons. Mais le Gouvernement, tenant compte de l'adoption définitive du projet de loi relatif aux libertés et aux responsabilités des universités, a déposé un amendement tendant à revenir à la version du Sénat et à supprimer l'agrément, ce qui prouve le bien-fondé technique de la position du Sénat. Sur ce point également, madame le ministre, je me permets de vous adresser nos remerciements.

En revanche, le Sénat a fait prévaloir son point de vue sur la question essentielle des modalités suivant lesquelles les investissements susceptibles de donner lieu au crédit d'impôt sont mis à la disposition des PME.

Après un très large débat, la commission mixte paritaire a accepté le compromis trouvé par le Sénat entre les partisans de l'investissement direct à risque et ceux qui souhaitent une certaine forme de mutualisation et donc d'intermédiation.

Rappelons que le Sénat avait adopté un amendement de notre collègue Philippe Adnot, sous-amendé par le Gouvernement, visant à permettre aux redevables de l'ISF de bénéficier, dans la limite de 10 000 euros, d'un crédit d'impôt au taux de 50 % s'ils investissaient dans des fonds d'investissement de proximité.

Cette mesure, combinée au dispositif favorisant la constitution de clubs d'investissements regroupant des personnes opérant en indivision - également proposé par le Sénat - avait paru équilibrée. D'un côté, elle donnait satisfaction à ceux qui insistaient sur la nécessité d'une affectio societatis établissant un lien presque personnel entre l'investisseur et la PME. De l'autre, elle n'excluait pas toute intermédiation, en ne fermant pas la porte à l'achat de titres par des petits redevables de l'ISF qui n'auraient pas facilement trouvé à employer quelques milliers d'euros de telle sorte qu'ils soient éligibles à l'avantage fiscal.

En revanche, a été écarté le système de mutualisation par des fonds d'investissement « aveugles », évitant ainsi une difficulté au regard non seulement de la Constitution mais aussi de la conception même de l'avantage fiscal ainsi envisagé.

En effet, il existe deux types d'investissements.

Dans les investissements directs à risques, le redevable à l'ISF investit directement une certaine somme, nécessairement supérieure d'un tiers au crédit d'impôt dont il bénéficiera, somme que, par définition, il risque de perdre en cas de mauvaise fortune. Dans ces conditions le taux 75 % pour le crédit d'impôt est justifié.

Les investissements « intermédiés », pour lesquels une certaine mutualisation existe, doivent concerner, pour une part substantielle - au moins 20 % -, des entreprises nouvellement créées, c'est-à-dire des entreprises de moins de cinq ans. Le taux du crédit d'impôt ne peut être alors aussi élevé que celui qui est consenti à ceux qui choisissent de risquer leurs fonds. En effet, la cause au service de laquelle est proposé cet avantage fiscal, à savoir la redynamisation des entreprises par l'intermédiaire de placements à risque, est infiniment moins mise en avant dans ce cas.

Voilà le compte rendu des votes de la commission mixte paritaire, dont il faut souligner qu'elle s'est déroulée dans un climat de confiance entre les deux assemblées. Je parle sous le contrôle de ceux qui y ont participé, mais cela me semble de bon augure pour la suite de nos travaux.

Le dispositif d'autoliquidation du bouclier fiscal introduit par le Sénat a finalement paru difficile à mettre en application dans l'instant, et ce pour deux raisons principales.

D'une part, le mécanisme de discussion avec l'administration n'est pas aussi simple à envisager que cela avait été imaginé au départ.

D'autre part, contrairement à ce qui est affirmé ici ou là, les bénéficiaires du bouclier fiscal ne sont pas tous des redevables de l'ISF, il s'en faut de beaucoup !

Alors que 90 000 contribuables étaient susceptibles de bénéficier du bouclier fiscal, la disposition n'a pas connu le succès escompté. Et sur les 90 000 foyers en question, 12 000 étaient redevables de l'ISF ; parmi ces derniers seuls 2 500 à 2 800 ont profité du système.

S'il existe plusieurs explications à cela, il en est une à laquelle il nous faut être particulièrement attentifs : le bouclier fiscal a la réputation d'être un cadeau exclusivement réservé aux possédants de grande fortune redevables de l'ISF. C'est un faux procès ! Sur 90 000 bénéficiaires potentiels, 78 000 foyers ne paient pas l'ISF : il s'agit de petits contribuables, dont les accidents de revenu les amènent à bénéficier de cette disposition.

Il nous faut donc connaître et approfondir les raisons qui ont empêché le succès du bouclier fiscal à 60 %.

C'est la raison pour laquelle, madame le ministre, les rapporteurs généraux de l'Assemblée nationale et du Sénat vous ont adressé hier soir un courrier pour vous demander d'étudier, d'ici à l'examen du projet de loi de finances pour 2008, la possibilité pour les bénéficiaires du bouclier fiscal de recourir à la procédure d'autoliquidation. De la sorte, le bouclier serait effectivement utile non seulement pour les redevables de l'ISF, qui sont considérés comme des nantis, mais encore pour toutes ces petites gens, spécialement des petits entrepreneurs et des artisans, qui, alors qu'ils y auraient droit, n'en bénéficient pas.

Cela permettrait de balayer certains procès d'intention qui ont été faits au Gouvernement et à la majorité sur ce sujet.

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