Cet amendement vise à la suppression de l'article 9, auquel, on le sait, la commission des finances est, dans son ensemble, très défavorable.
Notre opinion à cet égard est fondée sur les conclusions des travaux d'un groupe qui a été constitué voilà quelques mois sous la présidence de notre collègue Jean Arthuis, et où les différentes sensibilités politiques étaient représentées.
Tout d'abord, nous avons constaté, au cours des auditions réalisées par ce groupe de travail, que les milieux agricoles n'étaient pas vraiment demandeurs de la mesure présentée à l'article 9 ; je pense, en particulier, à l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture, qui a émis un avis défavorable sur celle-ci.
En ce qui concerne l'incidence éventuelle de l'application d'une telle disposition sur le revenu agricole, ce dernier connaîtrait une augmentation globale de 2, 5 % dans l'hypothèse d'une suppression complète de la taxe foncière sur les propriétés non bâties. Dans le cas d'une exonération à concurrence de 20 %, comme le prévoit l'article, la progression serait donc de l'ordre de 0, 5 %, c'est-à-dire qu'elle serait négligeable.
Cela étant dit, on peut aussi se demander si cet avantage, si modique soit-il, n'aurait pas un impact variable selon les filières agricoles. Les informations que j'ai obtenues à ce sujet sont intéressantes.
Dans le secteur des céréales, des oléagineux, des protéagineux, des fruits et autres cultures permanentes, les revenus s'accroîtraient d'un peu moins de 1 %.
À la vérité, la seule filière qui bénéficierait de manière significative de la mesure, avec une augmentation des revenus de 2 %, serait la viticulture, hors production de vins d'appellation d'origine.
À l'inverse, les revenus des producteurs de fleurs et des horticulteurs ne progresseraient que de 0, 15 %, et, ce qui semble poser problème compte tenu des difficultés du secteur, le revenu des maraîchers n'augmenterait que de 0, 3 %.
Par ailleurs, il semble inévitable que, s'agissant des terres en fermage, la mesure ne profite, à plus ou moins long terme, qu'aux seuls propriétaires.
En effet, l'article 9 ne modifie pas les rapports entre l'offre et la demande de terres agricoles. Pour les preneurs, l'incidence de son application sera probablement annulée, à terme, lors de la révision des baux, par une augmentation des fermages ou de la part de taxe foncière sur les propriétés non bâties payée au bailleur par le preneur. Le dispositif présenté au IV de l'article, au demeurant complexe et peu lisible, ne remet pas en question cet état de fait, qui résulte de mécanismes purement économiques et contractuels.
Enfin, comme l'ont souligné certains représentants du monde agricole entendus par la commission, le fait de payer la taxe foncière sur les propriétés non bâties permet à l'agriculteur de bénéficier de contreparties de la part de la commune.
C'est là qu'il convient de formuler certaines remarques si l'on s'intéresse au devenir des communes rurales, de leur mode de financement et de leur autonomie fiscale.
À cet égard, il est bien vrai que l'article tend à dégrader les finances des collectivités territoriales concernées. En effet, la taxe visée représente 21 % du produit des impôts directs locaux des communes de moins de 500 habitants. Pour 2 167 d'entre elles, ce taux s'élève à plus de 50 %.
Il nous semble que l'article 9 ne contrevient pas aux principes constitutionnels d'autonomie financière et de libre administration des collectivités territoriales ; le cas échéant, il appartiendra bien sûr au Conseil constitutionnel de se prononcer sur ce point. Toutefois, la commission des finances ne peut appuyer une disposition dont l'application réduirait de manière importante les bases fiscales des plus petites communes, sans que celles-ci aient le moindre pouvoir de décision à cet égard.
En tout état de cause, la mesure est clairement contraire aux principes que nous nous sommes efforcés de promouvoir et d'appliquer dans d'assez nombreux cas de figure. En matière de fiscalité locale, on sait que la commission des finances est attachée à ce qu'une exonération résulte d'une délibération du conseil de la collectivité concernée et que, de son point de vue, cette délibération doit être prise par un conseil dûment responsabilisé, c'est-à-dire sans qu'une compensation soit prévue.
Si l'on souhaite soutenir les revenus des agriculteurs, messieurs les ministres, n'existe-t-il pas des moyens plus appropriés que celui que vous préconisez ? Il conviendrait, en particulier, de viser plus spécifiquement ceux des exploitants agricoles qui auraient le plus besoin d'être aidés.
Telles sont - en résumé, car ce dossier a été largement évoqué lors du débat de cet après-midi - les raisons pour lesquelles la commission des finances souhaite la suppression de l'article 9 du projet de loi de finances pour 2006.