Intervention de Martin Hirsch

Réunion du 22 octobre 2008 à 15h00
Revenu de solidarité active — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Martin Hirsch, haut-commissaire :

Je pense enfin à l’implication de beaucoup d’entre vous, en tant que présidents de conseil général, dans des démarches innovantes sur le plan social, au nombre desquelles figure l’expérimentation du revenu de solidarité active.

Le présent projet de loi ne vise certainement pas à la perfection, mais il prétend à la cohérence. Nous revendiquons une stratégie fondée sur un diagnostic, des objectifs, une méthode, des principes, des outils, des moyens et une éthique.

Le diagnostic, c’est que la pauvreté concerne aujourd’hui principalement des personnes en âge d’être actives, avec autant de gens qui sont pauvres parce qu’exclus du travail que de personnes demeurant dans la pauvreté malgré le travail.

Le diagnostic, c’est que nous sommes passés trop longtemps à côté du phénomène des travailleurs pauvres.

Le diagnostic, c’est que le nombre de travailleurs pauvres a augmenté, même lorsque le salaire minimum a connu ses plus fortes augmentations.

Les objectifs, c’est, pour la première fois en France, une ambition quantifiée, qui a donné lieu à un engagement politique de réduction de la pauvreté figurant dans un « tableau de bord » négocié avec les principaux acteurs sociaux et qui fera l’objet d’un suivi année après année. Ce document vise le taux de pauvreté monétaire, le nombre de travailleurs pauvres, le nombre de dossiers de surendettement et toute une série d’autres indicateurs.

Ce projet de loi tend à graver dans le marbre la notion d’objectifs de réduction de la pauvreté. Il s’agit là d’un levier indispensable pour permettre à tous les acteurs concernés de pouvoir vérifier la réalité des engagements pris. Parmi ces objectifs, je mentionnerai l’inversion de la tendance concernant les travailleurs pauvres.

Auparavant, il y avait des annonces, souvent tonitruantes, mais pas d’engagements ; voilà, au contraire, des engagements quantifiés. Vous avez souvent eu droit à des mots vibrants ; voilà des actes concrets.

En ce qui concerne la méthode, elle consiste à se fonder d’abord sur une phase d’expérimentation, puis sur une politique partenariale, dans un cadre conventionnel, avec une articulation entre l’État et les collectivités territoriales, mais aussi entre l’accès à l’emploi et l’aide sociale, assorties de mécanismes d’évaluation et de rendez-vous réguliers.

La méthode, c’est ensuite d’avoir pris le temps de la concertation. La méthode, c’est d’avoir associé les personnes concernées, c’est-à-dire les allocataires de minima sociaux, à la conception de cette réforme, et de prévoir dans le projet de loi leur place dans les instances qui intéressent leur vie, leur revenu, leur dignité.

En ce qui concerne les principes, je citerai, d’une part, la garantie de la progression des ressources avec l’augmentation des revenus tirés du travail, et, d’autre part, la garantie de l’équité pour que, à travail égal et à situation familiale équivalente, les différents ménages disposent du même revenu.

Les outils, c’est bien sûr le revenu de solidarité active, mais c’est également le contrat unique d’insertion, ainsi que le pacte territorial d’insertion.

En ce qui concerne les moyens, avec ce projet de loi, ce sont 1, 5 milliard d’euros supplémentaires qui seront destinés aux personnes les plus modestes. Il s’agit là d’un effort plus important que celui qui avait été fait lors de la création du revenu minimum d’insertion ou au moment de la mise en place de la couverture maladie universelle, la CMU.

L’éthique, enfin, consiste à promouvoir la dignité des personnes, en conciliant travail et solidarité. Comme on le dit souvent, il s’agit de « remettre les gens debout ». Ce projet de loi part d’un jugement moral porté non sur les personnes, mais sur une société qui tolère, comme c’est le cas aujourd’hui, que l’on puisse reprendre du travail sans gagner d’argent ou, en d’autres termes, que les plus pauvres soient taxés à 100 %.

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