Intervention de Bernadette Dupont

Réunion du 22 octobre 2008 à 15h00
Revenu de solidarité active — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Bernadette DupontBernadette Dupont, rapporteur :

Cela étant, vous l’avez souligné, les premiers résultats sont encourageants, et le RSA suscite une large adhésion, au-delà des clivages idéologiques. L’ensemble des associations d’insertion, les organisations syndicales, patronales et de salariés, que j’ai auditionnées reconnaissent la pertinence de ses principes de fonctionnement.

Il est incontestable que le RSA améliorera notre système de solidarité. Que peut-on en attendre ?

Premier progrès, il permettra une simplification de ce système, puisqu’il se substituera à l’API, au RMI, aux primes forfaitaires d’intéressement et à la prime de retour à l’emploi, qui sera remplacée par une aide de retour à l’emploi facultative, attribuée « sur mesure » par le référent, c’est-à-dire la personne qui accompagnera l’allocataire.

Deuxième progrès, il engendrera une plus forte incitation à la reprise d’activité et amènera la suppression des « trappes à inactivité », grâce à l’extension du RSA aux travailleurs pauvres et au cumul, sans limitation de durée, de la prestation avec les revenus d’activité. Je précise tout de même que, à partir d’un certain seuil, l’allocation sera supprimée, puisque chaque cas sera étudié individuellement et qu’il sera tenu compte des revenus du bénéficiaire.

Troisième progrès, et non des moindres, il instaurera un peu plus d’équité entre bénéficiaires des minima sociaux et travailleurs pauvres, grâce à l’attribution des droits connexes nationaux. Je pense à l’exonération de la taxe d’habitation ou de la redevance audiovisuelle et à l’attribution de la CMU complémentaire en fonction non plus du statut d’allocataire, mais des ressources et de la composition du foyer. Nous savons combien nos concitoyens sont attachés à la justice en ce domaine.

Relève d’ailleurs de la même préoccupation la logique des droits et devoirs, qui s’appliquera désormais aux personnes en insertion professionnelle ou sociale. Celles-ci devront respecter leurs engagements contractuels pour percevoir le RSA.

Enfin, dernier atout, le texte tend à instituer un système pragmatique d’orientation et d’accompagnement personnalisé vers l’emploi, accessible à tous les bénéficiaires du RSA, alors qu’aujourd’hui deux tiers des allocataires du RMI et de l’API n’ont pas accès au service public de l’emploi, n’étant pas inscrits à l’ancienne ANPE, devenue le Pôle emploi depuis sa fusion avec l’ASSEDIC, l’Association pour l’emploi dans l’industrie et le commerce.

Toutes ces mesures constituent d’indéniables améliorations par rapport au système actuel, mais elles ne sont pas dénuées de risques ou d’effets pervers. J’ai en effet plusieurs inquiétudes.

La première provient des perspectives difficiles qui se profilent sur le marché de l’emploi, du fait de la crise économique et financière actuelle, dont personne ne sait exactement, aujourd’hui, quelles seront les conséquences, l’ampleur et la durée. Ce contexte exigera de tous des efforts redoublés en matière d’accompagnement et de formation, et nécessitera une évaluation du dispositif, que je souhaite rapide et régulière.

Il existe aussi un risque de précarisation durable des emplois, car le versement du RSA sans limitation de durée peut aboutir, et ce n’est pas l’objectif, à maintenir les allocataires dans des emplois à temps partiel, voire très partiel. Nous proposerons des mesures pour limiter ce risque.

Je me dois également d’aborder la question du financement, qui sera reprise par M. Éric Doligé.

Le financement doit être partagé entre les départements et l’État au travers d’un nouveau fonds, le fonds national des solidarités actives, ou FNSA.

Le coût global du dispositif, estimé à 10 milliards d’euros, nécessitera un effort supplémentaire de l’État de 1, 5 milliard d’euros, financé grâce à la fameuse contribution additionnelle de 1, 1 % sur les revenus du patrimoine et des placements, qui ne sera peut-être pas sans conséquence pour les ménages de la classe moyenne, dont les placements immobiliers ou financiers complètent souvent utilement les revenus au moment de l’arrivée à l’âge de la retraite.

Nous avons également évoqué, en commission, les effets du bouclier fiscal, et je me doute que cette question sera largement débattue.

Il me semble néanmoins que la solution retenue par l’Assemblée nationale améliore le dispositif initial. Celle-ci a, en effet, adopté une mesure de plafonnement des niches fiscales et décidé que les 150 millions à 200 millions d’euros qui seront ainsi récupérés viendront réduire le taux de cette nouvelle contribution.

Je souhaite, pour ma part, que l’efficacité du dispositif que vous présentez, monsieur le haut-commissaire, permette la diminution rapide des prélèvements nécessaires à son financement. Parallèlement, l’amélioration de la conjoncture permettra peut-être, en tout cas je l’espère, de dégager des économies budgétaires et de les redéployer au profit du RSA.

Il faudra par ailleurs veiller à ne pas voir ce prélèvement de 1, 1 % s’installer subrepticement et s’accroître par petites étapes.

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