Intervention de Jean Boyer

Réunion du 22 octobre 2008 à 15h00
Revenu de solidarité active — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Jean BoyerJean Boyer :

Monsieur le président, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, le lien social apporte indiscutablement à l’homme une raison d’être, une assurance supplémentaire donnant à la solidarité tout son sens.

L’insertion, c’est l’exemple même de la main tendue à celles et à ceux qui ont besoin, un jour ou l’autre, de s’appuyer sur une force émancipatrice. Reconnaissons ensemble aujourd’hui que, s’il n’y avait pas en France cet esprit de partage dans la société, il manquerait à celle-ci quelque chose de fondamental : sa cohésion. C’est un point à ne pas oublier.

Avec les membres du groupe de l’Union centriste, j’ai, sur le fond, toutes les raisons de saluer le projet de loi dont nous entamons aujourd’hui l’examen.

Ce texte répond en effet à un besoin vital pour un nombre grandissant de nos concitoyens, qui, éloignés de l’emploi, éprouvent des difficultés croissantes à se réinsérer. Hélas, les événements financiers récents et l’évolution très préoccupante de l’économie ne permettent pas d’envisager, à court terme, d’amélioration spontanée de leur situation.

C’est la raison pour laquelle il faut agir. Agir, c’est faire en sorte que notre système de minima sociaux incite réellement à la reprise d’activité. Agir, c’est aussi simplifier l’architecture générale des politiques de l’insertion. Or c’est exactement ce que prévoit le présent projet de loi.

Le revenu de solidarité active réforme en profondeur l’incitation à la reprise d’emploi. Avec le revenu de solidarité active, il n’y aura plus d’effets de seuil, puisque son montant sera le même pour toute reprise d’emploi et qu’il sera pérenne. Le revenu de solidarité active profitera aussi à tout travailleur modeste, et non plus au seul public jusqu’ici allocataire du revenu minimum d’insertion ou de l’allocation de parent isolé.

Enfin, l’aide sera centrée sur les publics les plus éloignés de l’emploi, dont la réinsertion est souvent progressive.

Toutefois, il nous faut être réalistes : nous savons que tous les bénéficiaires du RSA ne seront pas employables et ne pourront pas entrer dans la logique du retour vers l’emploi.

La présente réforme simplifiera aussi énormément les politiques de l’insertion, en fusionnant le revenu minimum d’insertion et l’allocation de parent isolé et en créant un contrat unique d’insertion : plus de lisibilité, pour plus d’efficacité.

Vous me permettrez, monsieur le haut-commissaire, d’achever ce panorama positif par un petit « cocorico » centriste : nous pouvons constater avec fierté que deux importantes propositions faites par des membres de notre groupe sont reprises in extenso dans votre texte. Michel Mercier, Joseph Kergueris, le président de la commission des affaires sociales, Nicolas About, et Jacqueline Gourault peuvent en témoigner.

Dans son rapport du 18 mai 2005, Valérie Létard, qui, avant d’entrer au Gouvernement, était membre du groupe de l’Union centriste du Sénat, préconisait le passage d’une logique de statut â une logique de revenus pour l’attribution des droits sociaux aujourd’hui liés aux minima. Le présent projet de loi met en œuvre cette proposition.

Il en est de même pour ce qui concerne la proposition formulée par M. Michel Mercier de fusionner le revenu minimum d’insertion et l’allocation de parent isolé dans son rapport du 16 décembre 2005 sur les droits et devoirs des bénéficiaires des minima sociaux. Cette fusion sera opérée dans le revenu de solidarité active.

Si, sur le fond, nous considérons par conséquent que le présent projet de loi constitue une réelle avancée, il reste cependant à aborder la délicate question de son financement.

Monsieur le haut-commissaire, il y a bien, selon nous, matière à porter sur la question du financement un regard plutôt globalement positif : avant de parler des modalités du financement, force est d’abord de constater que cette réforme est bel et bien financée !

Qu’il en soit ainsi dès la présentation du texte pourrait paraître évident à un profane. Mais combien de mesures avons-nous examinées et votées dont le financement n’était pas d’emblée assuré ? Comme vous l’avez tous deviné sur les différentes travées de cette assemblée, je pense à l’allocation personnalisée d’autonomie : le législateur a dû intervenir a posteriori afin d’assurer le financement, lequel se révèle, je le fais remarquer sans la moindre intention de polémique partisane, insuffisant, ô combien, pour certains départements.

Pour le RSA, cela ne sera pas le cas, ce qui témoigne d’une véritable responsabilité législative. Mais, si la mesure est financée, les modalités mêmes de son financement ont fait couler beaucoup d’encre et suscité de vives polémiques.

Cette affaire prouve une fois de plus à quel point un assainissement de nos finances publiques est urgent et indispensable. En l’absence d’une vraie lutte structurelle contre l’endettement et les déficits, le même cercle vicieux se reproduira : il faudra décider de nouvelles ponctions pour financer toute nouvelle mesure, c’est-à-dire étrangler un peu plus une économie déjà oppressée et qui n’en peut plus d’être pressurée. C’est en tout cas ce que nous observons.

Dans ce contexte, entre plusieurs maux, restait à choisir le moindre. Notre sentiment général sur les arbitrages faits jusqu’ici est que, à partir d’un mauvais départ, le tir a été correctement rectifié.

De prime abord, je le dis franchement, nous étions défavorables au financement exclusif du revenu de solidarité active par la création d’un prélèvement supplémentaire de 1, 1 % sur les revenus du capital et du patrimoine.

Taxer le capital et le patrimoine, cela signifie taxer les assurances vie, les revenus locatifs, les plans d’épargne logement. Autrement dit, ce prélèvement frappe de plein fouet les classes moyennes, et elles seules.

Il ne nous semblait pas équitable que seules ces dernières supportent la charge du financement de cette réforme de solidarité sans que les plus aisés, protégés par le bouclier ou les niches fiscales, y contribuent.

C’est pourquoi, nous pensions, avec nos collègues députés membres du Nouveau Centre, que le nouveau prélèvement devait être exclu du bouclier fiscal. Finalement, ce n’est pas la solution qui a été retenue par l'Assemblée nationale. Mais j’ai appris qu’il y avait eu la nuit dernière une avancée positive.

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