Intervention de Yves Daudigny

Réunion du 22 octobre 2008 à 15h00
Revenu de solidarité active — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Yves DaudignyYves Daudigny :

« Ce qui rend la pauvreté si dure, ce sont les privations, c’est la promiscuité. » Ainsi s’exprimait Marguerite Yourcenar.

Monsieur le président, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, vouloir lutter contre la pauvreté n’est pas aisé. Prétendre combattre simultanément l’exclusion constitue un défi louable, presque présomptueux, car ces deux phénomènes, qui parfois s’additionnent, n’appartiennent pas au même registre.

La notion de pauvreté renvoie aux privations qu’elle génère, celles qui sont évoquées par l’académicienne. L’exclusion, quant à elle, confine, dans ses formes les plus graves, à l’inexistence sociale. On peut être pauvre et bien inséré, alors que le risque qui pèse profondément et durablement sur la personne victime de l’exclusion est de sombrer dans l’oubli. Le lien social se trouve menacé, touché : je ne suis rien aux yeux de l’autre, je n’existe plus. Voilà qui est plus grave encore !

Mes chers collègues, la lutte contre les exclusions s’apparente donc au refus de toute forme de mise au ban. C’est en quelque sorte éviter à une personne, à tout prix, d’être considérée – passez-moi l’expression – comme un rebut.

Notre tâche est donc lourde de sens. Il nous appartient d’appréhender cette discussion avec l’humilité et la responsabilité qu’elle réclame. Les enjeux qui sous-tendent ce projet suscitent trop d’espoirs. Il ne vous est pas permis, monsieur le haut-commissaire, de décevoir.

Vous visez tout à la fois l’un des champs de la pauvreté dans ses effets privatifs et l’exclusion dans sa menace de rupture de lien social.

J’eusse préféré, pour ma part, une réforme en profondeur de nos politiques d’insertion tant professionnelle que sociale. En effet, si celles-ci ont besoin d’évoluer, c’est en ce qui concerne aussi bien la pauvreté, sur laquelle le RSA agit à la marge, que l’exclusion.

Or, si le RSA peut se révéler un outil intéressant grâce à son mécanisme incitatif et à ses résultats mobilisateurs, il ne règle aucun problème en profondeur. Il traite les effets et non les causes.

Sauf à considérer ce dispositif comme « hors-sol », les politiques dites « d’activation » font nécessairement système, et les outils mis en place peuvent aussi constituer un substitut à la dérégulation du marché du travail.

Les instruments existants, à savoir l’API et le RMI, vont disparaître au profit de ce nouveau dispositif. Reconnaissons le mérite qui leur revient. L’allocation de parent isolé, créée en 1976, procédait d’abord d’une politique familiale qui entérinait implicitement la monoparentalité. À mi-chemin entre la politique familiale et l’action sociale, elle devait inéluctablement évoluer.

Quant au RMI, n’oublions pas qu’il incarnait le progrès social …

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