Intervention de Rémy Pointereau

Réunion du 22 octobre 2008 à 15h00
Revenu de solidarité active — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Rémy PointereauRémy Pointereau :

… en faisant des revenus du travail le principal outil de lutte contre la pauvreté.

Avec le RSA, nous signons la fin du RMI créé en 1988, donc il y a vingt ans, sous le gouvernement de Michel Rocard. Je rappelle au passage que la droite avait voté à l’époque en faveur de ce texte, sans se dérober ni fuir ses responsabilités. Or le RMI a manifestement échoué dans sa vocation d’insertion.

Aujourd'hui, chacun reconnaît le bien-fondé du RSA, à droite, bien sûr, mais aussi à gauche, puisqu’un mécanisme similaire figurait dans le programme présidentiel de Mme Royal. Même Michel Rocard, père du RMI, s’enthousiasme pour le RSA.

Les résultats constatés dans les départements où ont eu lieu les premières expérimentations sont très encourageants, ce qui prouve l’efficacité du système : on y enregistre 30 % supplémentaires de retours à l’emploi par rapport au système antérieur, et plus d’un quart des personnes qui reprennent un emploi étaient au RMI depuis plus de quatre ans.

J’avais, pour ma part, beaucoup insisté pour que le département du Cher – je suis président du conseil général – soit candidat. Il réunissait tous les critères requis. Malheureusement, pour des raisons purement idéologiques, cette expérimentation lui a été refusée, ce que je trouve bien dommage.

Qui pourrait s’élever contre un dispositif dont l’objet est d’aider les exclus du système à trouver un emploi et de permettre à chacun de gagner en travaillant plus qu’il ne gagne en restant chez lui et en touchant des aides ? Comment ne pas applaudir des deux mains ?

Monsieur le haut-commissaire, votre réforme est bonne, indiscutablement, mais je n’en dirai pas de même de son financement, et vous me permettrez d’insister sur ce point.

La taxe de 1, 1 % sur les revenus de l’épargne créée pour financer l’essentiel du RSA pénalise le revenu indirect du travail. On va ainsi taxer les assurances vie, les actions et obligations – même si leur valeur est en diminution –, les revenus des loyers que perçoivent des Français à qui l’on a dit tout au long de leur vie que leurs retraites ne suffiraient pas et qu’il leur fallait donc se constituer des retraites complémentaires. On va donc taxer encore un peu plus la classe moyenne, c’est-à-dire celles et ceux qui ne sont pas assez pauvres pour bénéficier d’aides quelconques mais qui sont assez riches pour toujours contribuer à la solidarité et payer des impôts et de nouvelles taxes, et ce alors que tous les revenus les plus importants se verront exonérés de cette nouvelle taxe avec le bouclier fiscal.

Ce nouvel impôt, si minime soit-il, brouille le message et alimente le sentiment de confusion : le financement tel qu’il est proposé aujourd’hui va à l’encontre du message que nous adressons aux Français en faveur du travail.

Je défendrai d’ailleurs un amendement sur ce point, cosigné par plusieurs de mes collègues, respectant ainsi l’engagement que j’avais pris auprès des très nombreux élus qui m’avaient fait part de leur incompréhension cet été, pendant la campagne sénatoriale.

Nous aurions pu trouver des sources d’économies pour assurer ce financement, notamment en allant plus loin dans le plafonnement des niches fiscales.

Nous aurions pu également nous pencher un peu plus sur le gouffre de la formation professionnelle : les dépenses se chiffrent à 19 milliards d’euros, et beaucoup d’économies sont à faire sur ce budget ou sur ce système proprement ubuesque qui fait que l’État, chaque année, dépense, d’une main, 16 milliards d’euros en allégements de charges pour compenser le passage aux 35 heures et, de l’autre, 4 milliards pour organiser la sortie dudit dispositif.

Il est dommage que la chance n’ait pas été saisie, d’autant que, compte tenu de la crise financière que nous vivons, les recettes de cette nouvelle taxe risquent de ne pas être à la hauteur des attentes.

La réforme en cours de la formation professionnelle permettra peut-être, dans un avenir proche, de trouver un nouveau financement, plus équitable et plus approprié ; le RSA y gagnerait certainement en légitimité. C’est, pour ma part, tout ce que je souhaite.

Je voterai, bien sûr, ce projet de loi, mais je souhaite que nous progressions dans l’élaboration de financements mieux adaptés.

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