Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, prenant la mesure de la crise de confiance ouverte par les révélations sur le Mediator, commercialisé en France pendant trente-trois ans et consommé par cinq millions de nos compatriotes sans que notre système de sécurité sanitaire ait pu éviter cette situation, le Gouvernement présente aujourd’hui un projet de loi relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.
Une Réforme du système du médicament, enfin : tel était le titre du rapport de la mission commune d’information du Sénat sur le Mediator, rendu au mois de juillet dernier. Cet « enfin » avait un sens. Comment ne pas constater avec douleur semblable défaillance de la chaîne du médicament dans notre pays, cinq ans après le rapport Médicament : restaurer la confiance de la mission commune d’information sur les conditions de mise sur le marché et de suivi des médicaments, que j’avais eu l’honneur de présider ? Nous avions déjà insisté sur les nombreuses incohérences du système en vigueur depuis quinze ans. Tous aujourd’hui reconnaissent la lucidité du diagnostic et la pertinence des recommandations que nous avions alors formulées. Celles-ci sont restées, hélas ! lettre morte.
Après les incidents qui ont jalonné la décennie précédente – Vioxx, cérivastatine, Acomplia, Avandia –, après la gestion de la grippe H1N1 l’an dernier, le drame du Mediator aura eu enfin raison de l’inaction, puisque nous examinons aujourd’hui votre projet de loi, monsieur le ministre.
Cette affaire a révélé clairement la responsabilité des laboratoires Servier, mais aussi jeté le discrédit sur tout un système. Comment ce médicament a-t-il pu obtenir une autorisation de mise sur le marché pour un produit dérivé des amphétamines, comme l’indiquent sa formule et son nom, le benfluorex ? Comment a-t-il pu être refusé en Belgique, retiré en Italie en 1999 et en Espagne en 2004, sans que l’AFSSAPS réagisse ? Comment les signalements de ses effets néfastes ont-ils pu être ignorés aussi longtemps ?
Nos concitoyens se posent légitimement toutes ces questions. Notre devoir est aujourd’hui de leur redonner confiance dans le médicament. Ce n’est pas la publication, précipitée et sans explication, d’une liste de produits sous surveillance qui peut y contribuer ! Bien au contraire...
Nous devons rebâtir un édifice solide de sécurité sanitaire, qui apportera à nos concitoyens les garanties qu’ils sont en droit d’attendre.
Il ne s’agit pas ici de stigmatiser les laboratoires pharmaceutiques, qui ont permis, par leur recherche et leurs découvertes, d’immenses progrès médicaux, les experts ou les médecins dans leur ensemble. Mais force est de constater une certaine porosité entre évaluateurs et évalués, contrôleurs et contrôlés. Cette situation équivoque, peut-être source de fantasmes, est certainement à l’origine de dérives.