Il s'agit d'un choix incontestablement ambitieux. Cependant, certaines des mesures qu'il propose ont été ressenties comme très contraignantes : augmentation de la taxe pesant sur l'industrie pharmaceutique, forfait de 18 euros sur les actes K 50. Mais avions-nous le choix ?
Monsieur le ministre, quelles mesures entendez-vous prendre pour intensifier les contrôles et lutter contre toutes les formes de fraude, qui sont certainement des facteurs importants du déficit ?
Pour qu'une réforme réussisse, ne l'oublions pas, il ne faut pas faire fi de la concertation nécessaire avec les parties concernées. La réussite du redressement de la situation dépend de l'adhésion des professions de santé et des assurés. Un sentiment d'incompréhension est aujourd'hui très nettement perceptible. Tout un chacun est susceptible de comprendre, à condition que le dialogue soit effectif.
Élément majeur de régulation des dépenses de soins de ville, le parcours de soins se met progressivement en place.
Ainsi, 32 millions d'assurés ont d'ores et déjà déclaré à l'assurance maladie le nom de leur médecin traitant, ce qui souligne le succès de ce dispositif. La mise en oeuvre de celui-ci devrait s'achever au début de l'année prochaine, avec l'application d'une majoration de participation pour les assurés qui ne respecteraient pas les différentes étapes. Il semble néanmoins que l'élaboration du cahier des charges des « contrats responsables » avec les assurances complémentaires ait pris du retard. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur ce point ?
Le dossier médical partagé constitue, avec le médecin traitant, le second pilier du parcours de soins. Pour des raisons techniques, son déploiement n'est prévu qu'à l'horizon 2007. Compte tenu du retard dans le calendrier initial, cette échéance est-elle encore très réaliste ? En tout cas, il est clair que l'on ne pourra en attendre des résultats en termes d'économies dans l'immédiat.
Quoi qu'il en soit, des réponses claires devront être apportées quant à l'accès et au contenu de ce dossier. Sera-t-il, par exemple, communiqué aux professions paramédicales ? Monsieur le ministre, pouvez-vous déjà nous apporter des précisions sur ce point et sur la capacité de l'État à financer la mise à niveau des systèmes d'information des acteurs de santé dont dépend l'efficacité de ce projet ?
Autre élément de régulation des dépenses de soins de ville : le plan médicament ; fondé notamment sur le développement des génériques, il constituait un axe majeur de la réforme de 2004.
Malgré une évolution favorable du taux de pénétration des génériques et la fixation d'objectifs chiffrés pour les prescriptions de certaines classes de médicaments dans la convention conclue entre les médecins et l'assurance maladie, les économies prévues en 2005 ne sont pas au rendez-vous.
Vous proposez, monsieur le ministre, une dégressivité accrue des prix des médicaments sous brevet, un déremboursement des médicaments à service médical rendu insuffisant ou encore la mise en place de nouveaux conditionnements ; toutes ces mesures vont dans le bon sens.
En revanche, les tarifs forfaitaires de responsabilité n'ont pas eu que des effets favorables. Lorsque le médicament princeps est au même prix que le générique, c'est toute la logique de substitution qui est mise à mal ! L'extension prévue des TFR, associée à une baisse de 13 % du prix des génériques inscrits au répertoire, a d'ailleurs suscité des réactions très vives, notamment de la part des pharmaciens d'officine. Plus qu'un désaccord sur le fond, je crois que se pose là une question de méthode.
Ce volet relatif au médicament n'a peut-être pas été suffisamment le fruit de concertations. Certaines dispositions ont même été brutales.
Par exemple, vous demandez à l'industrie pharmaceutique de fournir un effort pour rétablir l'équilibre des comptes en 2006. C'est sans doute justifié, mais ne la fragilisons pas ; il faut préserver la recherche et son indépendance. Le projet de loi initial multipliait par trois la taxe sur son chiffre d'affaires, qui passait ainsi de 0, 6 % à 1, 96 %. Cette mesure ne risque-t-elle pas d'avoir des conséquences négatives sur sa pérennité ?
Il me semble indispensable que les relations entre l'État et l'industrie pharmaceutique s'inscrivent dans une véritable contractualisation pluriannuelle et dans la transparence, afin d'éviter les à-coups qui font du médicament une variable de bouclage financier commode.
Le dernier point sur lequel je souhaite insister concerne la nécessaire réforme de l'hôpital.
L'hôpital a pu se sentir moins concerné par le débat relatif à la réforme de 2004. De fait, l'évolution modérée des dépenses de soins de ville cache un dérapage inquiétant des dépenses hospitalières en 2005, puisque l'objectif fixé par le Gouvernement pourrait être dépassé de 650 millions d'euros. Au total, les établissements de santé auront bénéficié de 2, 5 milliards d'euros supplémentaires.
La tarification à l'activité est l'un des outils de la modernisation. Si le secteur privé a fait preuve d'un grand sens des responsabilités avec une mise en oeuvre complète de la réforme dès le mois de mars 2005, le secteur public semble avoir des difficultés à s'approprier cette mutation.
Pour les directeurs de CHU, la poursuite de la mise en oeuvre de la réforme doit se faire à plusieurs conditions : tarifs stables en 2006-2007, liste stable des dispositifs ou des médicaments coûteux, missions d'intérêt général et à l'aide à la contractualisation, les MIGAC, mieux évaluées et chiffrées.
Nous devons faire en sorte que les hôpitaux s'inscrivent dans une autre démarche et que les meilleurs soient récompensés. Pour autant, cela ne signifie pas qu'il ne faille pas accompagner les hôpitaux en difficulté ; c'est d'ailleurs le rôle des ARH, au travers de contrats clairs de modernisation et de restructuration.
Qui peut accepter l'idée que les prix entre l'hôpital public et l'hôpital privé ou, pis encore, entre les CHU, soient aussi disparates, allant du simple au triple pour un séjour en médecine, chirurgie, obstétrique, la MCO ?
Abandonner l'étape intermédiaire de convergence des tarifs fixés pour 2008 eût été un signal de renoncement et compromettait, me semble-t-il, l'objectif de 100 % en 2012. Je me réjouis donc que l'Assemblée nationale ait rétabli le taux de 50 %.
L'instauration de la TAA s'inscrit dans le cadre plus large du plan « Hôpital 2007 », notamment avec la mise en oeuvre d'une nouvelle gouvernance.
Il serait injuste de ne pas reconnaître les progrès réalisés par la communauté hospitalière dans ce domaine. Mais il convient aussi de souligner que la maîtrise médicalisée et les bonnes pratiques telles qu'on les diffuse dans le secteur ambulatoire n'ont pas encore trouvé leur place à l'hôpital.
Enfin, pour conclure, j'évoquerai rapidement un sujet qui n'est pas tout à fait lié à notre débat, mais qui a suscité une vive émotion chez les médecins ; il s'agit de la réforme de l'avantage social vieillesse, l'ASV, prévue par l'article 47 du projet de loi.
Tout le monde reconnaît que la situation de ce régime est préoccupante et requiert des mesures. Certains, dont la Caisse autonome de retraite des médecins de France, la CARMF, se sont prononcés en faveur de la fermeture pure et simple de l'ASV. J'ai bien compris que cette option ferait peser sur l'assurance maladie des charges exorbitantes et inacceptables.
La création d'une cotisation supplémentaire a été, vous le savez, très mal acceptée par les professionnels concernés, qui se plaignent de ne pas avoir été consultés. Je sais, monsieur le ministre, que vous les avez entendus en faisant adopter un amendement qui répartit la charge de cette cotisation sur le principe un tiers - deux tiers, principe conforme à l'esprit conventionnel. Que pouvez-vous leur dire de plus pour les rassurer ?
Monsieur le ministre, voilà des interrogations auxquelles vous apporterez, nous l'espérons, des réponses.