Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la corruption est l'une des menaces majeures de notre époque.
Parce qu'elle est à la fois un phénomène social, culturel, économique et politique, elle se manifeste de manières diverses et complexes, minant la confiance dans l'action publique et dans les institutions, faussant la concurrence entre les entreprises, décourageant l'esprit de compétition.
Au-delà de tel ou tel aspect, elle agit toujours en corrodant le pacte social. C'est pourquoi il est de notre responsabilité de la prévenir et de la réprimer.
Si, fort heureusement, cette prise de conscience n'est pas nouvelle dans notre pays, au plan international, toutefois, il en est longtemps allé autrement, jusqu'à ce que la mondialisation mal maîtrisée et les défis qu'elle engendre poussent la communauté internationale à se doter des instruments adéquats pour combattre la corruption.
Depuis une dizaine d'années, plusieurs instruments internationaux anti-corruption ont vu le jour. La France les a d'ores et déjà appliqués, ou se donne les moyens de les ratifier et de les mettre en oeuvre dans les meilleurs délais.
Je citerai, ainsi, la convention du 26 mai 1997 relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des Etats membres de l'Union européenne, la convention du 17 décembre 1997 sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales, adoptée sous l'égide de l'Organisation de coopération et de développement économiques, l'OCDE, et, enfin, les conventions pénale et civile du Conseil de l'Europe sur la corruption du 27 janvier 1999 et du 4 novembre 1999.
Tous ces instruments auront maintenant leur clef de voûte avec la convention des Nations unies contre la corruption, dont l'examen et la ratification nous réunissent aujourd'hui.
Ce texte marque une nouvelle étape en ce qu'il constitue le premier instrument à la fois universel et global en la matière. En fixant un ensemble cohérent de principes et de règles communs, en matière tant de prévention que de répression de la corruption, il devrait favoriser la coopération internationale entre un nombre important d'Etats et contribuer ainsi à la mise en place d'une véritable action internationale de lutte contre la corruption et d'une culture internationale de l'intégrité.
Le nouvel instrument prévoit, en effet, un large éventail d'incriminations et de mesures préventives touchant aussi bien le secteur public que le secteur privé. II instaure des mécanismes de coopération pénale efficaces, mais, surtout, il établit des mécanismes juridiques nouveaux de portée obligatoire en matière de recouvrement des avoirs illicites issus de la corruption.
Ces dispositions de coopération judiciaire permettront aux Etats affectés par les différentes formes de corruption de recouvrer les avoirs dont ils sont propriétaires auprès de l'Etat où ils se trouvent.
Il s'agit, sans aucun doute, du domaine dans lequel la convention constitue l'avancée la plus significative par rapport au droit existant, et, pour nos partenaires du Sud, d'un élément déterminant.
Une forte volonté politique a été nécessaire, parmi les différentes délégations, pour conclure la négociation de ce texte. Cette volonté leur a permis de surmonter leurs divergences et de doter la communauté internationale d'un instrument de standard élevé et exigeant de lutte contre le fléau de la corruption.
La France n'a pas été la moins à l'ouvrage, notamment en formulant une proposition novatrice dans le domaine de la restitution des fonds publics détournés.
Parce qu'elle était le reflet de la priorité politique que notre diplomatie accorde à cette convention, nous l'avons signée dès le premier jour de la conférence de signature, le 9 décembre 2003, à Mérida, au Mexique.
Dix-huit mois après sa signature, la convention des Nations unies contre la corruption est en passe de recueillir les trente ratifications nécessaires à son entrée en vigueur, ce qui témoigne de son importance et des fortes attentes qu'elle suscite.
Par les actions de coopération technique qu'elle permettra, cette convention est appelée à ouvrir un nouveau chapitre de l'action internationale contre la société « incivile ». Complétant le dispositif prévu par la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, à laquelle notre pays est partie depuis le 29 octobre 2002, elle sera un levier essentiel pour conduire notre planète vers davantage de paix, de sécurité, de développement et de respect des droits individuels.
En la ratifiant rapidement, la France démontrera qu'elle est fidèle à ses engagements. Elle manifestera son souci d'intégrer dans son action de coopération internationale les exigences de renforcement de l'état de droit qui doivent s'inscrire désormais - chacun en convient - au coeur de toute politique d'aide au développement.
Telles sont, monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, les principales observations qu'appelle, de ma part, la convention de Mérida, qui fait l'objet du projet de loi aujourd'hui proposé à votre approbation.