Intervention de Guy Fischer

Réunion du 27 juin 2005 à 15h00
Services à la personne et mesures en faveur de la cohésion sociale — Question préalable

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Madame, monsieur le ministre, voilà quelques jours, votre collègue M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances, et de l'industrie, s'est décidé à « dire la vérité aux Français ». Selon lui, « l'impôt sur le revenu ne sert pas à financer des écoles ou des hôpitaux : il ne sert pratiquement qu'à payer les intérêts de la dette ». Cette charge - 45, 3 milliards d'euros en 2004 - pourrait, selon le ministère des finances, franchir la barre des 50 milliards d'euros en 2006. L'impôt sur le revenu rapporte à peine plus.

Cette situation pour le moins alarmante était prévisible ! Nous avions ici même tenté de résister à la politique fiscale injuste du Gouvernement visant à abaisser, pour les franges les plus riches de la population, l'impôt sur le revenu, qui figure pourtant parmi les impôts les plus égalitaires.

Or, face à ce constat désastreux, M. Breton ne voit que deux solutions pour sortir de cette spirale : soit diminuer les dépenses de l'Etat de manière drastique, soit faire de la croissance. Mais, ajoute-t-il, « pour avoir de la croissance, dans l'économie comme dans une famille, il faut travailler plus »

Et voilà à nouveau le slogan dogmatique et fallacieux de ce gouvernement : « travailler plus pour gagner plus » ! C'est sous ce mot d'ordre que le Gouvernement a fini d'achever les 35 heures, permettant désormais de faire travailler les salariés en heures supplémentaires non rémunérées ; c'est sous ce même motif qu'a vu le jour le revenu minimum d'activité, ou RMA, cette espèce de contrat permettant d'exploiter les travailleurs les plus précaires et qui est un échec ; c'est sous ce même motif que l'on facilite les licenciements, que l'on précarise encore plus le travail, que l'on dérégule le temps de travail, bref, que l'on démantèle le droit du travail et le droit social.

Le texte qui nous est soumis aujourd'hui, dans la continuité de la loi de programmation pour la cohésion sociale de l'hiver dernier, s'inscrit bien dans cette lignée ultralibérale de stigmatisation de la précarité et de dérégulation du droit du travail. Dans sa première partie, sous prétexte de mettre en place le chèque-emploi-service universel, le CESU, il multiplie les exonérations fiscales en tout genre, et, dans sa deuxième partie - c'est devenu une habitude dans vos lois, monsieur le ministre -, il accumule différents articles sans rapports avec ses objectifs, qui sont autant de « chevaux de Troie » du patronat dans ce texte de prétendue « cohésion sociale ».

Venant nous présenter votre projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, monsieur le ministre, vous rappeliez avec raison l'aggravation des inégalités sociales dans notre pays et l'accroissement de la pauvreté. Vous veniez donc soi-disant nous proposer une loi de cohésion sociale destinée à renverser la tendance...

Si nous partageons globalement le souci affiché de répondre à des besoins sociaux évidents, il est incontestable que nous divergeons sur les moyens à mettre en oeuvre pour y répondre : ceux que vous proposez se situent en effet dans la ligne suivie depuis plusieurs années, celle de la précarisation et de la déréglementation du travail.

Force est de constater que, si vous aviez construit ce plan en réelle concertation avec les partenaires sociaux et avec les associations de terrain, les objectifs en termes d'emplois auraient probablement été très différents.

Présentée dans la presse comme l'un des plus grands chantiers engagés par le Gouvernement pour combattre le chômage, votre initiative prévoit la création de 500 000 emplois au cours des trois années à venir. Du jamais vu ! C'est un bel effet d'affichage, mais, à l'instar de votre collègue ministre de l'économie, des finances, et de l'industrie, il est temps de dire la vérité à nos concitoyens ! Je vais vous y aider.

Il serait tout d'abord intéressant de savoir comment vous avez pu élaborer de telles prévisions. Le raisonnement arithmétique qui consiste à appliquer le taux d'emploi d'un secteur américain à son homologue en France ignore le nombre de variables et de facteurs déterminants pour le système d'emplois. Les chiffres que vous avancez sont contestés par divers acteurs de terrain. Ainsi, selon le PDG du groupe coopératif « Chèque déjeuner », il ne s'agirait peut-être que de 300 000 emplois seulement.

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