Intervention de Gélita Hoarau

Réunion du 27 juin 2005 à 15h00
Services à la personne et mesures en faveur de la cohésion sociale — Article 1er

Photo de Gélita HoarauGélita Hoarau :

La situation de la Réunion est dominée par un difficile contexte social, lui-même marqué par des records de personnes bénéficiaires de la CMU, d'illettrés, de RMIstes, de demandes de logement non satisfaites.

Lorsque le Gouvernement s'inquiète et se mobilise devant un taux de chômage de 10 % en métropole, nous sommes donc en droit d'espérer, à la Réunion, une action plus vigoureuse et spécifique pour un chômage dont le taux est trois fois supérieur.

Depuis près de quarante ans, tout, qu'il s'agisse de l'extension de mesures prises sur le plan national ou de dispositions spécifiques à l'outre-mer, a été essayé.

Les premiers, nous avons connu le traitement social du chômage, la défiscalisation, les exonérations de charges sociales, mais aussi la mobilité des hommes et, dès les années soixante, le contrôle forcé des naissances.

De cette époque, nous avons hérité un drame qui éclate maintenant : à la fin des années soixante, on a fait partir sans leur consentement et sans celui de leurs parents adoptifs 1600 jeunes Réunionnais, orphelins pour la plupart. Ces derniers cherchent aujourd'hui à s'informer, à comprendre pourquoi ils ont été traités ainsi. Ils demandent justice, en vain.

Revenons à la question du chômage : il serait inexact de dire que rien n'a été fait. Au cours de la dernière période, les efforts conjugués de l'Europe, de l'Etat, des collectivités locales et des entreprises ont permis la création d'emplois pérennes dans le secteur marchand. Citons le développement des embauches dans le secteur énergétique, dans celui du BTP, ou le désenclavement aérien qu'a permis la compagnie locale Air Austral.

Ces efforts ont permis de maintenir un fort taux de création d'emplois dans le secteur marchand. C'est cependant insuffisant pour régler la question du chômage.

Dans quelques semaines, ce sera la fin de l'année scolaire. Des milliers de jeunes vont quitter la vie éducative. Les enquêtes menées montrent que, sept mois après leur sortie du système, 60 % de ces jeunes se retrouvent au chômage.

Au 1er janvier 2006 prendra fin, dans les départements d'outre-mer, le système des CES et des CEC. A la même date, le dispositif spécifique de congé-solidarité sera supprimé.

Bruxelles met en oeuvre une réforme de l'OCM « Sucre », avec une baisse de 39 % du prix. Une telle annonce n'a pas manqué de susciter des inquiétudes chez les planteurs et fait craindre un mouvement d'abandon de la culture de la canne.

Toujours sur le plan européen, aucun accord n'a été possible sur le budget de l'Union pour la période 2007-2013. Mais l'hypothèse d'une baisse des fonds structurels pour les régions de l'Objectif 1, dont font partie les départements d'outre-mer, apparaît comme très probable. On évoque une diminution pour la Réunion d'au moins 20 %, soit à peu près 300 millions d'euros de crédits en moins, avec comme conséquence une baisse sur le plan tant des investissements que de l'emploi, alors que, d'ici-là, notre population aura augmenté.

A partir du 1er janvier 2008 entreront en application les accords du partenariat économique. La règle de la réciprocité des échanges sera établie.

De même, à la fin de cette année, I'OMC conclura sans doute à Hong Kong un accord libéralisant le marché des services. La Réunion n'est pas préparée à ces échéances, qui auront des effets négatifs sur l'emploi.

Enfin, selon une projection à un million d'habitants, la population active de la Réunion sera de 441 000 personnes en 2030. L'INSEE considère qu'il faudra « doubler l'emploi actuel pour, en même temps, ramener le chômage à un niveau acceptable ». Notre situation est donc particulière et appelle, je le répète, des actions plus rigoureuses et plus spécifiques.

Le Gouvernement compte beaucoup, dit-il, sur le plan de cohésion sociale. On nous a annoncé la possibilité de créer 45 000 contrats d'avenir, 15 000 par an pendant trois ans, et ce dès cette année. Le conseil général de la Réunion, qui a inscrit un tel objectif à son programme, vient de réviser ses plans à la baisse. Quand on y regarde de plus près, il n'a de quoi financer que quelque 600 contrats.

Ma demande est simple : maintenons les dispositifs actuels de CES, de CEC et de congé-solidarité et marquons une pause dans les réformes, le temps de faire un bilan de tout ce qui a été entrepris ces derrières années. Consultons les Réunionnais pour dégager avec eux des solutions. Fixons-nous des objectifs clairs. Chiffrons, par exemple, nos ambitions de baisse du chômage. Ensuite, que l'Etat passe un contrat avec les Réunionnais pour atteindre ces objectifs.

Si vous empruntez cette voie, madame, monsieur le ministre, je suis prête à vous suivre, à inviter mes compatriotes à faire de même et à participer à l'effort d'élaboration et de mise en oeuvre de solutions assurant un développement durable de la Réunion.

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