Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai l'honneur de soumettre aujourd'hui à votre examen le projet de loi relatif à la violation des embargos et autres mesures restrictives, qui avait été déposé sur le bureau de votre assemblée par mon prédécesseur, Mme Alliot-Marie.
Je tiens avant tout à saluer la qualité du travail de M. Jacques Peyrat, rapporteur de ce texte, de M. André Trillard, qui a rapporté le projet de loi en commission à la place de M. Jacques Peyrat, et de M. Serge Vinçon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.
En ce début de XXIe siècle, la menace a changé de forme. En conséquence, les démocraties doivent adapter leurs moyens de défense.
L'embargo interdisant temporairement ou non l'exportation ou la libre circulation de certaines marchandises constitue en quelque sorte une arme politique, une mesure de rétorsion pacifique. On sait, par exemple, le rôle qu'a joué dans la fin de l'apartheid l'embargo imposé à l'Afrique du Sud en 1977 concernant le commerce des armes, les nouveaux investissements ou la suppression des exportations de pétrole.
L'embargo a même vu son champ d'application s'étendre bien au-delà du seul domaine des matériels de guerre ; je pense notamment aux échanges économiques et commerciaux, ainsi qu'aux diamants : c'est en avril dernier que le Conseil de sécurité des Nations unies a levé l'embargo sur les exportations de diamants du Liberia, après une interdiction de six ans destinée à empêcher la vente des « diamants du sang ».
De plus, chaque pays membre de l'Organisation des Nations unies a l'obligation de respecter les embargos imposés par le Conseil de sécurité.
C'est pourquoi le Conseil de sécurité des Nations Unies, dans sa résolution 1196 adoptée le 16 septembre 1998, a encouragé chaque État membre à adopter des mesures législatives érigeant en infraction pénale la violation de tout embargo imposé par le Conseil.
Ce projet de loi porte à la fois sur les embargos et sur toute mesure restrictive à des activités de nature commerciale, économique ou financière, mais aussi à des actions de formation, de conseil ou d'assistance technique avec un État, une entité, des personnes physiques ou morales.
Or, dans ces domaines, ni les dispositions répressives prévues au sein du code de la défense ni celles qui sont contenues dans le code des douanes, portant sur les matériels de guerre, ne peuvent s'appliquer.
Le projet de loi que j'ai l'honneur de vous soumettre introduit donc une nouvelle incrimination dans le code pénal, définit en droit interne les « embargos » ou « autres mesures restrictives » et en fixe les sources nationales, européennes ou internationales.
Le nouvel article 437-1 introduit dans le code pénal vise à prévoir des pénalités pour toute violation ou tentative de violation. Ces pénalités ont été fixées à sept ans d'emprisonnement et à 750 000 euros d'amende.
Je tiens à le souligner, le projet de loi prévoit que les délinquants pourront être poursuivis et jugés même après la levée d'un embargo, pour des faits commis quand cet embargo était en vigueur. En effet, même si la norme d'appui mettant en oeuvre l'embargo a disparu, l'incrimination de violation d'embargo, elle, subsiste.
Comme pour tout délit de droit commun, la prescription est de trois ans, non pas à compter du jour où les faits ont été commis, mais à compter du dernier acte de poursuite judiciaire, pour autant, bien entendu, que l'enquête ait été ouverte dans le délai de trois ans de la commission des faits.
Pour toutes ces raisons, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous invite à adopter ce projet de loi, qui va dans le sens du respect des engagements internationaux de la France et de la promotion des droits de l'homme chers à notre histoire, à notre tradition et à nos valeurs.