Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi visant à renforcer notre législation pour lui permettre d'assurer plus efficacement le respect des embargos ou des mesures restrictives auxquels notre pays a souscrit va dans le bon sens.
En effet, il rendra ainsi pleinement effective la mise en oeuvre de certains de nos engagements internationaux.
Avec ce texte, nous répondrons enfin à la recommandation du Conseil de sécurité des Nations unie qui, en septembre 1998, avait souhaité que chaque État membre introduise dans sa législation une définition juridique claire et précise de la notion d'embargo.
Je m'interroge pourtant sur le retard que nous avons pris à satisfaire cette recommandation, ainsi que sur le peu d'empressement des gouvernements successifs à faire venir en discussion un projet de loi datant - rappelons-le - du mois de février 2006.
Il y a là un écart surprenant entre les paroles et les actes. Notre pays se veut pourtant à la pointe du combat mené par la communauté internationale pour se donner les moyens de maintenir la paix et de sanctionner ceux qui la menacent !
Chers collègues, il était devenu nécessaire de modifier notre législation sur ce point particulier, car elle ne correspondait plus à l'évolution de la situation internationale ni à l'extension de la notion d'embargo.
Quoi qu'il en soit, aujourd'hui, pour prévenir les conflits ou se prémunir contre l'agressivité de tel ou tel État, il ne suffit plus de décréter un embargo portant sur les seuls équipements militaires et les munitions et d'en interdire le commerce et l'exportation.
À cet égard, puisque nous figurons parmi les toutes premières puissances fabriquant et exportant des armes et du matériel de guerre - la quatrième, me semble-t-il - il est normal que nous montrions l'exemple en nous appliquant à nous-mêmes ces règles de morale internationale.
Il n'est donc pas inutile de préciser ce point, car en France le commerce et l'exportation de ce type de matériels, bien qu'ils soient strictement encadrés, dépendent d'une autorisation laissée à l'entière discrétion du Gouvernement. Et nous savons tous, ici, qu'il existe bien des moyens pour contourner un embargo !
De plus, comme cela a été rappelé, les embargos ou « autres mesures restrictives » édictés par des institutions internationales comme le Conseil de sécurité ou l'Union européenne englobent depuis quelques décennies un champ beaucoup plus large que le secteur de l'armement.
Ils prévoient désormais des restrictions ou des interdictions, ne relevant pas de la législation sur les matériels de guerre, qui peuvent porter sur des activités commerciales et financières mais aussi sur des actions de formation et d'assistance technique, d'ailleurs souvent utilisées dans le passé pour contourner les embargos.
Notre législation ne correspond pas à ces nouvelles activités et ne permet pas de les sanctionner pénalement lorsqu'elles ont un caractère illicite puisque seuls le code de la défense et le code des douanes peuvent offrir un fondement juridique auxdites sanctions.
C'est donc tout naturellement que j'approuve la disposition de ce projet de loi donnant une nouvelle définition de l'embargo et de la mesure restrictive et créant une nouvelle incrimination pénale. C'est même un bon exemple d'adaptation de notre droit à la réalité de la société et du monde dans lequel nous vivons.
Toutefois, monsieur le ministre, il nous faut être réalistes. L'établissement d'une législation répressive adéquate, si elle est nécessaire, n'est pas à elle seule suffisante pour garantir le respect des mesures d'embargo. Il faut aussi des moyens humains et matériels considérables en matière de renseignement, mais aussi de contrôle des frontières aériennes, maritimes et terrestres.
Je pense en particulier à des secteurs comme les douanes, qui voient leurs effectifs se réduire fortement dans le cadre d'une restructuration dont la finalité ne peut que susciter nos interrogations, par rapport aux objectifs qui sont aujourd'hui visés.
Il faudrait que nous contribuions plus efficacement, aux côtés de la communauté internationale, à aider, dans le cadre de la coopération, les pays ayant des difficultés à assurer ces contrôles. C'est ce que fait l'Union européenne pour une part, mais nous pourrions, selon moi, faire plus et mieux.
Enfin, je souhaiterais, à l'occasion de la discussion de ce projet de loi, évoquer une question d'actualité qui est au coeur de ce texte, puisqu'il s'agit des sanctions à l'égard de l'Iran.
Nous sommes très inquiets et désapprouvons les récentes prises de position du ministre des affaires étrangères sur cette question. Elles sont dangereuses et manquent de cohérence.