Intervention de Didier Boulaud

Réunion du 10 octobre 2007 à 15h00
Embargos et autres mesures restrictives — Vote sur l'ensemble

Photo de Didier BoulaudDidier Boulaud :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet de loi présenté par le ministre de la défense relatif à la violation des embargos et autres mesures restrictives est un texte nécessaire et utile.

Ce texte est nécessaire, parce qu'il permettra la répression pénale de la violation de tous les embargos et pratiques restrictives, au-delà du seul cas des matériels de guerre. En donnant une large définition légale de l'embargo et des autres mesures restrictives, on cherche à couvrir un champ très étendu qui inclut le domaine de l'armement, mais peut aussi englober d'autres secteurs à la lisière du militaire et du civil, ou encore des biens à double usage.

Ce texte est utile, parce qu'il apportera de l'efficacité à la répression des actes contraires aux embargos ou mesures restrictives décidés dans un cadre multilatéral et, le plus souvent, sur la base d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies et des décisions prises à l'échelon de l'Union européenne.

Le projet de loi tend à créer au sein du code pénal une incrimination pénale de violation des embargos ou des mesures restrictives punie d'une peine de sept ans d'emprisonnement et de 750 000 euros d'amende, amende dont le montant peut toutefois être fixé au double de la somme sur laquelle a porté l'infraction.

L'état du monde actuel impose une grande fermeté quand il s'agit de faire respecter des décisions collectives prises notamment par le Conseil de sécurité des Nations unies. Il s'agit là, à mes yeux, d'un point fondamental : l'embargo doit résulter d'un acte multilatéral. En la matière, toute décision unilatérale ne peut, à terme, qu'affaiblir la cause que l'on prétend servir... L'actualité fourmille d'exemples qui le démontrent !

À plusieurs reprises ont été dénoncées les conséquences de sanctions économiques mal mesurées et mal assurées. Voilà quelques années, la 104e conférence de l'Union interparlementaire réunie à Djakarta s'interrogeait, au travers d'une résolution adoptée le 20 octobre 2000, sur le point suivant : les embargos et sanctions économiques sont-ils encore acceptables d'un point de vue éthique, sont-ils encore efficaces, et permettent-ils d'atteindre l'objectif assigné dans un monde de plus en plus globalisé ? Était alors singulièrement visé le recours à des sanctions unilatérales comme instrument de politique étrangère.

La Charte des Nations unies du 26 juin 1945 permet d'imposer des embargos. Aux termes de son article 39, « le Conseil de sécurité constate l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression ». Il peut alors notamment prendre des mesures conformément à l'article 41, c'est-à-dire des sanctions « n'impliquant pas l'emploi de la force armée », affectant surtout les relations économiques et les moyens de communication. Ces sanctions économiques de l'ONU visent ceux qui violent le droit ou troublent la paix. Elles servent à faire respecter et appliquer le droit international public, en particulier les droits de l'homme. Elles ont pour objet d'amener le pays concerné à adopter le comportement souhaité par l'ensemble des États, en d'autres termes à cesser de mettre en danger la sécurité internationale et la paix.

L'Union européenne dispose aussi des instruments nécessaires à la mise en oeuvre d'un embargo. Pour autant, cet outil de régulation, de prévention ne doit pas être galvaudé ; surtout, il ne doit pas être brandi de manière arbitraire, en marge des décisions collectives et multilatérales. C'est un point important qu'il convient de faire respecter sur le plan international.

Un autre point important, qui concerne directement le texte examiné aujourd'hui, est la nécessité d'une législation répressive. Malheureusement, les violations d'embargos sont trop nombreuses et trop fréquentes. Ainsi, les embargos sur les armes imposés par les Nations unies ces dix dernières années ont été systématiquement bafoués, et seule une petite partie des nombreux contrevenants ont été inculpés. À l'origine des violations ou des contournements d'embargos, on trouve parfois des États ou des groupes non-étatiques, souvent des producteurs et des trafiquants dont il s'agit de contrecarrer et de réprimer l'action. L'autorité des Nations unies est sérieusement érodée par les constantes violations des embargos décrétés par le Conseil de sécurité. Cela est grave, parce que cette situation ouvre la voie à des tentations d'action unilatérale.

Le projet de loi que nous allons voter aujourd'hui tend justement à mieux adapter notre riposte au développement des différentes formes et méthodes de violation d'embargo. Le groupe socialiste votera ce texte, tout en appelant le Gouvernement à adopter une attitude très ferme et constante afin de soutenir les décisions - toutes les décisions - du Conseil de sécurité, en particulier en imposant les mesures coercitives qui viendraient appuyer efficacement les embargos décidés par les Nations unies, en favorisant toujours le cadre multilatéral dans les relations internationales.

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