Intervention de Pascal Clément

Réunion du 13 septembre 2006 à 15h00
Prévention de la délinquance — Discussion générale

Pascal Clément, garde des sceaux :

Nous avons réussi à donner un coup d'arrêt à l'insécurité en nous dotant de moyens nouveaux et en remobilisant tous les services de l'État. (Signes de dénégation sur les travées du groupe CRC et du groupe socialiste.) Je pense bien sûr à la police et à la gendarmerie, mais également aux magistrats, aux greffiers et aux fonctionnaires du ministère de la justice, qui ont pris toute leur part dans le rétablissement de la paix publique dans notre pays.

La politique pénitentiaire ambitieuse menée par le Gouvernement, la meilleure exécution des sanctions prononcées et les actions en faveur des victimes d'infraction ont également contribué à crédibiliser notre action contre la délinquance.

Pourtant, il nous faut aujourd'hui aller plus loin si nous voulons que la réduction de la délinquance de ces dernières années ne soit pas un feu de paille. Il faut certes sanctionner les délinquants, mais aussi chercher à éviter au plus grand nombre de le devenir.

Vous avez aujourd'hui, pour la première fois me semble-t-il, la possibilité de discuter un texte qui s'attaque aux causes profondes de la délinquance, à savoir le sentiment d'impunité, la violence gratuite et la toxicomanie.

Les principales dispositions de ce projet de loi relevant de la compétence de mon ministère visent essentiellement trois objectifs : consacrer et renforcer le rôle du ministère public dans la prévention de la délinquance ; diversifier les réponses judiciaires selon les infractions afin de mieux prévenir leur renouvellement ; enfin, mieux prévenir la délinquance des mineurs.

J'examinerai ces trois points successivement.

Premièrement, il nous faut d'abord consacrer et renforcer le rôle du ministère public dans la prévention de la délinquance.

Nul ne conteste aujourd'hui le rôle essentiel de l'autorité judiciaire au côté des préfets et des maires en matière de prévention de la délinquance. Mais ce rôle ne résultant actuellement que de la pratique et de textes réglementaires, l'absence de dispositions législatives peut laisser accroire que l'autorité judiciaire n'intervient que de façon subsidiaire.

Il convient donc de renforcer la cohérence des dispositifs judiciaires de prévention. Tel est l'objet des articles 4 et 5 du projet de loi, qui précisent notamment que le procureur général et le procureur de la République animent et coordonnent, dans le ressort de la cour d'appel et du tribunal de grande instance, la politique de prévention de la délinquance dans sa composante judiciaire.

Deuxièmement, il est nécessaire de diversifier les réponses judiciaires selon les infractions afin de mieux prévenir leur renouvellement.

Vous le savez, la lutte contre la récidive - notamment celle des criminels sexuels ou violents - est l'une de mes priorités. C'est l'objet de la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, que l'actualité nous invite malheureusement à compléter.

Une affaire récente a en effet montré l'incohérence des textes actuels. Alors qu'il avait exécuté une peine pour des faits similaires plus de dix ans auparavant, l'auteur d'un crime sexuel n'a pu être juridiquement considéré comme récidiviste parce que cette précédente condamnation avait été effacée de son casier judiciaire. C'est l'exemple que vient de citer M. le ministre d'État.

Il convient donc de faire en sorte que la loi garantisse effectivement la protection des Français en doublant le délai de réhabilitation pour les récidivistes et en maintenant les condamnations réhabilitées au bulletin n° 1 du casier judiciaire, accessibles aux seules juridictions, afin qu'elles puissent être prises en compte pour la récidive.

Le suivi des personnes inscrites au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions sexuelles, le FIJAIS, doit lui aussi être encore amélioré s'agissant des criminels les plus dangereux. Je vous propose donc de prévoir la possibilité, pour les juridictions, d'imposer une présentation mensuelle devant les services de police, et non pas seulement semestrielle, dans les cas les plus graves.

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