Monsieur le président, monsieur le ministre d'État, messieurs les ministres, mes chers collègues, je souhaiterais commencer mon intervention en attirant votre attention sur un certain nombre des remarques qu'ont formulées les très nombreuses personnalités - plus de soixante - issues de tous les secteurs intéressés par la prévention de la délinquance à l'occasion des auditions auxquelles j'ai procédé en qualité de rapporteur de la commission des lois et en présence de nombreux collègues.
Je n'avais pas oublié les propos décapants tenus en 2002 par Alain Bauer, spécialiste reconnu des problèmes de sécurité, devant la commission d'enquête sénatoriale sur la délinquance des mineurs, présidée par Jean-Pierre Schosteck et dont Jean-Claude Carle était le rapporteur.
Je vous en propose un rapide florilège : « La prévention en France n'a pas échoué. Pour échouer encore faudrait-t-il qu'elle existe.
De même, la sanction n'existe pas non plus. La France est le grand pays de l'impunité où le taux réel d'intervention, le taux d'élucidation de la police comme le taux de poursuites par les parquets, est infinitésimal.
Le taux de productivité du système judiciaire français est de 1 %. Tel est le pourcentage des peines qui sont prononcées et exécutées en France par rapport au nombre d'actes recensés.
On parle de violence et de sécurité alors qu'on ne les connaît pas, il faudrait commencer par établir un diagnostic ».
J'ai donc entendu à nouveau M. Bauer, devenu le président de l'Observatoire national de la délinquance. Il estime aujourd'hui que la volonté de connaissance des chiffres de la délinquance est un fait acquis, illustré notamment par le financement d'enquêtes auprès des victimes. Le diagnostic peut donc être plus précis et conduit à constater, par exemple, que les délinquants mineurs n'ont jamais été aussi jeunes, aussi réitérants, aussi violents et aussi féminisés, ce que confirment par ailleurs les données fournies par le ministère de la justice, qui, pour l'année 2005, recense 193.663 mineurs, sur un total de 800.000 mis en cause, soit près de 25 %.
Il note enfin deux évolutions intéressantes. Les violences non crapuleuses, celles qui n'ont pas pour objet principal l'accaparement d'un bien, augmentent de deux à trois fois plus vite que les violences crapuleuses, ce qui semble bien exiger une réponse éducative et sociale, et pas seulement policière. Quant au taux d'élucidation, il a beaucoup progressé, passant de 26 % à 33 %.
J'ai entendu, bien sûr, les principales associations de maires, qui, sans donner un blanc-seing au projet de loi dans son ensemble, expriment cependant un large consensus sur le fait de placer le maire au coeur de la prévention.