Le second axe du texte qui m'interpelle est la place donnée au maire dans la mise en oeuvre de la politique de prévention.
Parlementaire de Seine-Saint-Denis, département exposé aux problèmes de délinquance mais qu'il ne faut pas, loin de là, réduire à cela car on y trouve des jeunes brillants, des familles heureuses et des entreprises qui fonctionnent, je suis également un maire qui, au même titre que les villes de plus de 10 000 habitants, sera concerné par la mise en place des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, ainsi que des conseils pour les droits et devoirs des familles.
Sur ce point, je reste sceptique, monsieur le ministre, quant à la superposition de tels conseils et à leur réelle efficacité dans la pratique. En outre, les rendre obligatoires me semble contraignant pour des communes où la concertation existe et est déjà efficace, la mise en place de telles structures n'y étant finalement pas nécessaire.
Le texte prévoit, par ailleurs, de donner encore plus de pouvoirs aux maires, et parfois au-delà de leurs prérogatives originelles. S'il est opportun et indispensable de mettre le maire au centre du dispositif en raison de sa proximité et de sa connaissance de ses administrés, il faut lui donner pleinement les moyens de mettre en place les mesures qui s'imposent dans le domaine de la prévention.
Sachant, par exemple, qu'il m'a fallu trois mois pour faire appliquer par la police nationale un arrêté interdisant la vente d'alcool après vingt-deux heures dans un quartier sensible, alors même que cette décision était pleinement de mon ressort, je m'inquiète de savoir quelle sera ma marge de manoeuvre pour des prérogatives qui relèvent beaucoup moins de mes compétences.
Il ne s'agit pas de transformer le premier magistrat d'une ville en supershérif omnipotent, comme certains voudraient nous le faire croire. En effet, ne l'oublions pas, le projet de loi prévoit que le maire doit travailler en concertation étroite avec des intervenants extérieurs, en particulier avec le préfet et le conseil général, ce qui constitue une garantie s'agissant du contrôle de son action.
Pour autant, ces garanties d'un travail collectif de tous les acteurs concernés ne doivent pas freiner l'action du maire pour assurer la sécurité de sa ville et de ses administrés.
Telles sont, monsieur le ministre, trop brièvement évoquées, les quelques remarques que je voulais porter à votre connaissance avant d'aborder la discussion de ce texte.
Même si je suis réservé sur quelques-uns des points qui y sont traités, je reconnais qu'il constitue une avancée notable pour notre pays.
Hier, le champ de la prévention n'était qu'un flou artistique. Demain, le fait de l'inscrire dans le marbre de la loi contribuera à donner une certaine lisibilité à l'action menée, pour réduire durablement la délinquance en s'attaquant à ses causes. Prévenir le mal est toujours mieux que le guérir. C'est pourquoi je soutiendrai, sans arrière-pensée, le présent projet de loi.