Intervention de Hubert Haenel

Réunion du 17 juillet 2007 à 21h45
Dialogue social et continuité du service public dans les transports terrestres — Suite de la discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Photo de Hubert HaenelHubert Haenel :

Par ailleurs, la législation interdit, je vous le rappelle, certaines formes de grève, en raison soit de leurs modalités, soit de leur objet.

On ne peut donc voir dans le droit de grève un absolu, un principe qui devrait l'emporter sur toute autre considération. Le législateur peut restreindre ce droit, dès lors qu'il le fait pour un motif d'intérêt général indiscutable et que l'atteinte au droit de grève est strictement proportionnée au but visé.

L'instauration d'un service minimum pour les services publics essentiels est apparue, dans de nombreuses démocraties comparables à la nôtre, comme le moyen de concilier les droits des salariés concernés avec les droits des usagers, qui doivent pouvoir compter sur la continuité des services publics.

La continuité appartient en effet, avec l'universalité, à la notion même de service public. Il est paradoxal de prétendre être un défenseur du service public et de s'opposer, dans le même temps, à l'instauration d'un service minimum. Si, réellement, le droit de grève n'a pas à être encadré, c'est que l'on n'est pas en présence d'un service public, puisque la continuité n'est pas essentielle : à ce moment-là, laissons agir le marché !

En réalité, s'opposer au service minimum, c'est s'opposer à la notion même de service public. Et c'est aussi, à mon avis, méconnaître la raison d'être du droit de grève. Celui-ci est un moyen de rétablir l'équilibre entre l'employeur et les salariés. C'est cette notion d'équilibre qui est centrale. Le droit de grève est un élément d'un ensemble de règles destiné à garantir un équilibre entre droits et obligations, pouvoirs et contre-pouvoirs.

Or, où est l'équilibre entre les agents grévistes des services publics et les usagers de ces mêmes services ? Les uns savent bien que la pérennité de leur entreprise et de leur emploi est assurée et qu'ils n'ont pas à craindre une retenue significative sur leur salaire ; les autres, souvent usagers captifs, se voient privés de leur droit d'aller travailler, de se former, ou encore de se soigner, sans qu'ils soient en rien partie au conflit. Le déséquilibre est flagrant.

Le droit de grève est, en son essence, un droit républicain, c'est-à-dire un droit qui rétablit l'égalité. On le détourne de sa finalité quand on en fait un instrument de pression sur les citoyens. L'instauration d'un service minimum est ainsi, dans son principe, un retour à l'égalité républicaine entre toutes les parties prenantes.

Le dialogue social, c'est la recherche en commun d'un juste équilibre entre les préoccupations légitimes qui sont en présence.

On n'avance pas dans le dialogue social par des psychodrames dont les usagers sont les principales victimes. En instaurant un service minimum, non seulement on respecte enfin les usagers, mais on crée les conditions d'un dialogue social pacifié, plus responsable, où la grève est un dernier recours et non pas un exutoire.

Je suis persuadé que ce texte met en place les conditions d'un retour au dialogue et à la raison dans des secteurs où, trop souvent, on a pris l'habitude de faire la grève d'abord et de négocier ensuite.

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